mercredi 13 avril 2011

Cinquante ans après les indépendances de ses colonies la France peine à se débarrasser de son masque colonial.

Les déclarations de ses principaux dirigeants de quelque bord qu’ils soient nous abreuvent de discours annonçant la volonté de changer la cynique politique africaine de la France héritée de l’intelligence de De Gaulle. L’un d’entre eux, en campagne pour la présidentielle, fut chaudement applaudi par les Africains grisés par ses belles promesses de « rupture » avec ces pratiques qui conviennent peu à la délicatesse française. Ils oubliaient que les promesses électorales n’étaient que des spéculations dont le but est de faire monter la côte d’un candidat. Une fois Président de la République, ce candidat réalisa la difficulté qu’il y avait, lorsqu’on est Français, de se départir de ces façons honteuses, mais très utiles pour les intérêts du pays. Malgré leur modernité, même ceux n’ayant pas connu l’époque coloniale des Nègres méprisés et considérés comme des grands enfants à qui il fallait nécessairement indiquer en quoi consistaient leurs intérêts, les politiques Français s’illustrent par leur incapacité à libérer la France de sa vision coloniale dans ses rapports avec ses ex-territoires d’Afrique. Ils n’arrivent pas à résister à la tentation, tels les dieux mesquins des épopées d’Homère et de la mythologie grecque lutinant les hommes soumis à leurs décrets, de vouloir façonner le destin politique et économique de ces pays pourtant indépendants depuis cinquante ans. Une curiosité ! Les autres pays colonisateurs, petit à petit, se libèrent de leurs façons de considérer ces pauvres diables de Nègres : à défaut d’y voir leurs semblables en humanité, ils travaillent au moins à les considérer comme des partenaires.

Aux intellectuels donc, aux sages, aux politiques courageux et à tous ceux qui pensent droit (la France en compte des milliers au mètre carré) d’aider les politiques Français à décoloniser leurs esprits. Défenseurs du genre humain dans sa diversité et dans son universalité, il est du devoir des penseurs de France d’inculquer à leurs princes, qui ne l’ignorent pas, que l’Afrique c’est aussi des humains qui ont le droit à l’autonomie, et au droit à disposer d’eux même. L'Afrique ce n’est pas que des réserves dont on se sert comme dans un grenier. On ne se comporte pas de la sorte entre « civilisés » !

Les ingérences malsaines de la France n’aideront certainement pas les Africains à bâtir des sociétés responsables et solides, propres elles aussi, au même titre que les autres, à prendre part au bal mondial auquel ils assistent encore en tant que « serviteurs ». Foncièrement décolonisés, ces hommes peu entrés dans l’histoire n’attendent plus que leurs partenaires, enfermés dans une période dépassée et désuète de l’histoire, se mettent à la page, qu’ils débloquent les verrous de l’histoire afin qu’ensemble ils jouissent des possibilités d’une relation décomplexée et honnête.

Accordées à contrecœur, favorisées par le contexte historique d’alors, les indépendances à la française n’étaient voulues que de pacotille. Par des accords léonins, elle s’arrangea à maintenir sous d’autres formes, plus avantageuses même que celles que lui garantissaient déjà le régime colonial, sa toute puissance dans ses ex-colonies. Elle y faisait la pluie et le beau temps en choisissant directement des dirigeants à sa solde pour continuer la sale besogne coloniale. Cette grande démocrate, patrie des droits de l’homme n’hésitait pas non plus à se faire brutale et à violer ces derniers si elle rencontrait des résistances quelconques. Les livres qui traitent de la question et les mémoires des Africains « humiliés et offensés » sont jonchés d’exemples. C’est simplement effrayant !

La chute du mur de Berlin, annonçant un monde nouveau, relayée par la mondialisation décloisonnant les peuples et les mentalités, ne furent d’aucun secours pour la France dans ses relations avec son enfant l’Afrique. Les changements des logiques commerciales, l’arrivée de nouveaux acteurs dans le jeu Africain ne réussirent pas à modifier l’attitude de la France indécrottable. Elle tient ferme la France, toujours là, s’arrangeant à placer ou à maintenir qui elle souhaite au pouvoir au Congo Brazzaville, au Gabon, au Togo, en Côte d’Ivoire, au Tchad et ailleurs. Saufs les visionnaires, que pour leur malheur la nature avait doté d’une lecture pertinente des faits historiques, nombreux d’entre les Africains crurent la France renouvelée, non, plutôt affaiblie par la concurrence coriace que lui font d’autres acteurs en Afrique.

L’épilogue détonnant et pétaradant de la décennie de troubles qu’a connue la Côte d’Ivoire, montre bien que les analyses selon lesquelles la France serait bientôt hors-jeu en Afrique s’avèrent fausses. Sous couvert d’une résolution des Nations Unies au rôle plus qu’ambigu dans ce pays, la France s’est clairement ralliée au camp du Président « reconnu par la communauté internationale » dont elle a instruit et puissamment appuyé les milices rebelles (devenues Forces Républicaines) jusqu’à la chute de l’ogre Laurent Gbagbo, outrepassant ainsi le mandat onusien. Applaudie après la sortie victorieuse de son armée, la France aurait récoltée une véritable victoire symbolique si elle avait mis tout dans poids dans le règlement du contentieux à l’origine de la crise armée qui ôte tout crédit au Président Ouattara dont les forces ont perpétré des massacres pendant leur avancée sur Abidjan. Elle serait alors considérée comme un véritable soutien des attentes démocratiques des Africains, et non comme soutien de ses amis dont un grand nombre sont des dictateurs impénitents.


Cunctator.

2 commentaires:

Unknown a dit…

Ndéngué kaka na lobi na facebook,

le plus gros du travail reviens aux africains eux-mêmes. C'est comme pour la démocratie, l'indépendance au fond, ne se décrète pas.

Finalement, 50 ans après, on a enfin compris qu'il ne suffit pas de signer des papiers, d'avoir un drapeau ou des pseudos institutions pour être réellement indépendant. Il faut encore en avoir les moyens, financier, économique et surtout humain.

Au fond ce qui manque à l'Afrique ce sont des femmes et des hommes de qualités qui travaillent pour le continent et qui lui font honneur.

Aujourd'hui tout le monde parle de la Côte d'Ivoire et des images humiliantes de l'ancien président. Mais l'Afrique ce n'est pas que la CI.

Le Ghana, il y a 2 ans, a organisé une élection présidentielle apaisé et qui s'est soldé par une alternance salué par le monde entier. C'est la preuve que les africains ne sont pas que capable du pire.

La décolonisation? Oui, mais d'abord na boule na bisso, le reste viendra.

Cunctator a dit…

"Au fond ce qui manque à l'Afrique ce sont des femmes et des hommes de qualités qui travaillent pour le continent et qui lui font honneur."

C'est bien cela

Par Dominique Ngoïe Ngalla et Philippe Cunctator qui nous livrent leurs réflexions sur le monde d'aujourd'hui : de l'Afrique clopinant sur le chemin de la modernité au reste du monde, de la complexité des enjeux politiques aux péripéties du fait religieux, nous découvrons sous la plume de Dominique l'âme du poète qui rêve d'un autre monde, mais n'oublie ni les brûlures de l'histoire ni la dure réalité du temps présent...

Quelques ouvrages de Dominique Ngoïe-Ngalla...





L'Evangile au coeur de l'Afrique des ethnies dans le temps court
; l'obstacle CU, Ed. Publibook, 2007 .




Route de nuit, roman. Ed. Publibook, 2006.




Aux confins du Ntotila, entre mythe, mémoire et histoire ; bakaa, Ed. Bajag-Méri, 2006.




Quel état pour l'Afrique, Ed. Bajag-Méri, 2003.




Lettre d'un pygmée à un bantu, mise en scène en 1989 par Pierrette Dupoyet au Festival d'Avignon. IPN 1988, Ed. Bajag-Méri, 2003.




Combat pour une renaissance de l'Afrique nègre, Parole de Vivant Ed. Espaces Culturels, Paris, 2002.




Le retour des ethnies. La violence identitaire. Imp. Multiprint, Abidjan, 1999.




L'ombre de la nuit et Lettre à ma grand-mère, nouvelles, ATIMCO Combourg, 1994.




La geste de Ngoma, Mbima, 1982.




Lettre à un étudiant africain, Mbonda, 1980.




Nouveaux poèmes rustiques, Saint-Paul, 1979.




Nocturne, poésie, Saint-Paul, 1977.




Mandouanes, poésie, Saint-Paul, 1976.




L'enfance de Mpassi, récit, Atimco, 1972.




Poèmes rustiques, Atimco, 1971.