vendredi 18 mars 2011

Le gouvernement se veut d'extrême droite quand Marine Le Pen s'essaie au populisme: le dérapage de Claude Guéant

« Les Français à force d'immigration incontrôlée ont parfois le sentiment de ne plus être chez eux, ou bien ils ont le sentiment de voir des pratiques qui s'imposent à eux et qui ne correspondent pas aux règles de notre vie sociale » a dit Claude Guéant, sherpa de Nicolas Sarkozy, récemment nommé Ministre de l’intérieur lors d’une intervention sur Europe 1 jeudi 17 mars. Ces propos stigmatisants et trouvant un bouc émissaire tout désigné, s’ils sont choquants, parce que venant d’une personne censée incarner l’esprit républicain rassembleur de tous les Français sous l’idéologie de l'Egalité et de la Fraternité, est surtout un aveu d’échec : la politique de l’immigration est depuis les législatives de 2002 gérée par l’UMP, M.Sarkozy, patron du Ministre a lui-même géré ce poste pendant longtemps. Si M.Guéant, patron des politiques d’immigration juge ces dernières incontrôlées, ce n’est pas aux immigrées qu’il s’adresse, c’est à son propre camp. C’est bien sous la direction de ministres de l’intérieur issu des rangs de l’UMP que les immigrés surtout lorsqu’ils ont la mauvaise teinte, le mauvais accent et qu’ils viennent de pays pauvres, sont traités comme des bêtes puantes et malfaisantes qu’il faut absolument bouter hors des frontières du paradis qu’est la France.

C’est oublier que si les Français, plus que d’avoir le sentiment « de voir des pratiques qui s’imposent à eux et qui ne correspondent pas aux règles de notre vie sociale », se sentent chaque jour un peu plus près du gouffre, ce n’est pas la faute des immigrés qui par des formules incantatoires ramenées de leurs pays de sauvages jettent les Français dans le déclassement, la chute de leur pouvoir d’achat, les angoisses tenaces face à des lendemains inquiétants, mais c’est bien la faute à un gouvernement, mauvais marin naviguant sur une mer agitée avec une embarcation et des instruments propres aux petites eaux paisibles. Ce n’est pas en effet le pauvre immigré analphabète, peu ou pas intégré, ne comprenant rien à nos belles institutions, aux devoirs des gouvernants qui définit les politiques dont dépend le bien-être des Français. C’est aux représentants auxquels les Français ont confié des mandats, notamment au Président de la République par le biais de son gouvernement à travailler sans cesse, à faire preuve de courage, de bon sens et d’imagination pour inventer les solutions permettant à la France de demeurer une nation au sein de laquelle sous le patronage des principes de la République, l’homme soit digne. Cette dignité de l’homme commence par la garantie de droits économiques et sociaux.

Or qu’avons-nous, un gouvernement pusillanime, tremblant devant le pouvoir de l’argent et de la finance, fort en gueule devant les tribunes internationales, mais poltron face à ses véritables adversaires ; qui se trouve toujours le courage de taper sur une catégorie de personnes à laquelle un arsenal de lois toujours plus rigoureuses les une après les autres ôte toute possibilité de déploiement réel et de vivre l’idéal républicain ; qui veut faire croire que le droit au logement, le droit à la santé, le droit travail et à l’éducation sont malmenés par des « moins que rien ». Si les Français « ont parfois le sentiment de ne plus se sentir chez eux » c’est bien parce que depuis des années personne ne reconnait la France aux beaux principes et aux valeurs tant enviées. Ce n’est pas les immigrés qui ont saccagé cet héritage ; ils sont d’ailleurs eux-mêmes étonnés une fois en France de ne pas retrouver ce que des siècles de notre belle histoire nous ont légué de plus précieux.

Des épouvantails de mauvais goût, rien d’autre ! Face à la montée en puissance de Marine Le Pen dont des sondages annoncent des résultats honorables à la présidentielle de 2012, le gouvernement, apprenti sorcier s’illustre dans la manipulation de sujets nauséabonds et dangereux dans l’intention d’attirer ceux que les thèses xénophobes du Front National attirent. Sur le plan de la stratégie une manœuvre si cynique, en principe source d’indignation dans une véritable République – mais qui en France, hormis le presque centenaire Stéphane, Hessel s’indigne encore ? –, pourrait être justifiée si après que les objectifs sont atteints on revenait à un débat républicain et constructif. D’un point de vue tactique le dispositif des hommes clés du Président de la République, Hortefeux puis Guéant, analysé et compris par Marine Le Pen et ses stratèges a conduit ces derniers à modifier eux-aussi leurs principes de déploiement.

A la tête d’un parti d'extrême droite, voulant donner à son mouvement une ambition et une envergure que ne peuvent lui donner les imbéciles traditionnellement acquis aux thèses de son père, car patauger dans la boue ne paie pas, du moins jamais très longtemps, elle laisse le soin à d’autres de faire de la politique aux ras des pâquerettes: flairant plus ou moins les causes du désintérêt pour la chose politique chez le peuple et observant la lourdeur et la faiblesse des partis de gouvernement à s’attaquer à ces causes, elle les prends à son compte. Marine Le Pen opère ainsi une révolution idéologique au niveau de son parti. Aucun thème dont il faut s’emparer pour marquer sa prise en compte des préoccupations principales des Français, fut-il privilège de la gauche ou du centre droit, n’échappe à ses attaques. Elle fustige désormais le capitalisme et la mondialisation dévoyés, ôte son manteau ultra libéral pour se faire l’avocate d’un État plus interventionniste, rend les élites responsables du chaos actuel et donne à son discours un ton plus social.

Sous ses nouveaux habits le Front National menace la démocratie française que des politiques peu courageux et surtout grossiers n’arrivent pas à défendre tant ils se complaisent dans une façon de gérer la chose publique, ersatz de politique très éloigné des principaux buts de cette dernière. Nous vivons pourtant une époque agitée avec une crise économique et financière sévère ne laissant entrevoir rien de rassurant, avec une crise des valeurs et des représentations qui dessine le Français sous les traits d’un homme banal, sans reliefs, si peu fidèle à l’image du Français raffiné et passionné de grandes causes. Tout est donc propice à l’avènement d’hommes politiques tels qu’on en a plus vu depuis des décennies. L’espoir est permis, c’est le seul exutoire de l’homme piégé par son destin tragique.


Cunctator

2 commentaires:

Unknown a dit…

Je penses qu'on a tord de sous estimé le sentiment anti immigrés qui monte, non seulement en France, mais également dans toute l'Europe.

Les difficultés économiques sur ce continent qui vont, malheureusement, s'aggraver peu importe le camp qui va emporter l'élection présidentielle ne sont pas susceptible d'inverser la tendance, bien au contraire.

Les difficultés économiques ne sont pas les seules raisons de cette monté de la xénophobie. Il y a d'autres raisons.

Moi ce n'est ni Marine Le Pen, ni Sarkosy et son gouvernement qui me vont peur. Ce sont les idées d'extrêmes droites. Elles progressent, c'est incontestable. Après on peut discuter à qui la faute ou comment faire pour les combattre.

Sinon, je partage ton avis. Le gouvernement Sarkosy a lamentablement échoué sur sa politique d'immigration. Ce n'est malheureusement pas une bonne chose, parce que cela ne profite pas à la gauche, estimé plus proche des immigrés, mais bien à l'extreme droite qui, elle, n'a pas besoin ou envi que les choses trouvent un dénouement. L'extreme droite se nourri de la peur et de l'angoisse des gens.

Cunctator a dit…

Personne ne sous-estime le sentiment anti-immigré, ce qui est fortement critiquable c'est qu'un gouvernement s'en fasse l'écho amplificateur. Les difficultés économiques ne justifient pas la haine de l'aure, des gouvernants intelligents et courageux doivent savoir montrer la voie au peuple, s'il sont élus c'est également pour leur aptitude à prendre les décisions nécessaires à la cohésion nationale

Par Dominique Ngoïe Ngalla et Philippe Cunctator qui nous livrent leurs réflexions sur le monde d'aujourd'hui : de l'Afrique clopinant sur le chemin de la modernité au reste du monde, de la complexité des enjeux politiques aux péripéties du fait religieux, nous découvrons sous la plume de Dominique l'âme du poète qui rêve d'un autre monde, mais n'oublie ni les brûlures de l'histoire ni la dure réalité du temps présent...

Quelques ouvrages de Dominique Ngoïe-Ngalla...





L'Evangile au coeur de l'Afrique des ethnies dans le temps court
; l'obstacle CU, Ed. Publibook, 2007 .




Route de nuit, roman. Ed. Publibook, 2006.




Aux confins du Ntotila, entre mythe, mémoire et histoire ; bakaa, Ed. Bajag-Méri, 2006.




Quel état pour l'Afrique, Ed. Bajag-Méri, 2003.




Lettre d'un pygmée à un bantu, mise en scène en 1989 par Pierrette Dupoyet au Festival d'Avignon. IPN 1988, Ed. Bajag-Méri, 2003.




Combat pour une renaissance de l'Afrique nègre, Parole de Vivant Ed. Espaces Culturels, Paris, 2002.




Le retour des ethnies. La violence identitaire. Imp. Multiprint, Abidjan, 1999.




L'ombre de la nuit et Lettre à ma grand-mère, nouvelles, ATIMCO Combourg, 1994.




La geste de Ngoma, Mbima, 1982.




Lettre à un étudiant africain, Mbonda, 1980.




Nouveaux poèmes rustiques, Saint-Paul, 1979.




Nocturne, poésie, Saint-Paul, 1977.




Mandouanes, poésie, Saint-Paul, 1976.




L'enfance de Mpassi, récit, Atimco, 1972.




Poèmes rustiques, Atimco, 1971.