samedi 6 juin 2009

Mes amis les livres

Personne pour partager mon monde, personne pour partager ma passion pour la vérité, l’authenticité et l'essentiel. Mes amis sont les livres ; ils me présentent à des personnes qui aspirent aux valeurs cardinales que sont l'amitié (selon la conception des classiques) et la fraternité. Les livres sont des amis précieux, ils m'ont fait connaitre les belles lettres qui, selon le docte Jérôme Coignard, lui même l'ayant emprunté au poète Théocrite, sont « l'honneur de l’homme, la consolation de la vie et le remède à tous les maux, même à ceux de l'amour » (Anatole France, La rôtisserie de la reine Pédauque).

Loué soit le ciel pour l'inspiration qu'il donna à Gutenberg, lorsque que ce dernier inventa les procédés d'imprimerie. Ami des livres d'après le témoignage qu'il fait de son commerce eux, pour Eric Poindron "les livres ont encore ceci d'utile et de rare: ils nous lient d'emblée avec les plus honnêtes gens; ils sont la conversation des esprits les plus distingués, l'ambition ds âmes candides, le rêve ingénu des philosophes dans toutes les parties du monde; parfois même ils donnent la renommée, une renommée impérissable, à des hommes qui seraient parfaitement inconnus sans leur livres."
Grace aux livres en effet, j'échappais partiellement à ce monde moderne absurde, pusillanime et voué à l'ennui, pour rencontrer des esprits universels et des résistants éternels: Erasme de Rotterdam, Montaigne, Rabelais, Aimé Césaire, Mongo Beti et le démiurge Platon entre autres.


Résultat de processus historiques intellectuels et sociaux, notre survie dépend donc de la connaissance de notre antériorité. Mieux que l'oralité des plus brillants griots, que le savoir des professeurs les plus érudits, les livres -surtout les plus fins qui, contrairement aux "in folio" épais en volume, regorgent d'un condensé de science insoupçonné-, nous aident à saisir, quand bien même de façon approximative, ce qui n'est devenu que fumée ou vague souvenir pour certains. Les sociétés du savoir livresque, c'est à dire diffusé, non pas occulte et secret, ne sont elles pas celles dont l'esprit a le plus perduré malgré la corruption des siècles?

Tant peu nombreux autour de moi sont ceux qui partagent mon appétit (de lecture), ma sensibilité aux petites choses et mon idéal intellectuel du vrai et du beau, je vais chercher cette amitié si bien décrite par Cicéron dans les livres. Ils ne partagent ni n'échangent à la manière des hommes, mais leur compagnie est bénéfique en ce qu'elle nourrit forcément qui les fréquente et leur ouvre des horizons insoupçonnés. Enfant je voyageais autour du monde avec Phileas Fogg, partageais les malheurs de Sophie et me retrouvais dans la bonté de la douce Camille des "Bons enfants" de la Comtesse de Ségur. Je découvris également dans "La Diaspora noire" Pouchkine, Toussaint Louverture, Martin Luther king, Marcus Garvey et bien d'autres. Adolescent je visitais Paris avec Anatole France, Hugo et Zola; Dickens, quant à lui, me fit imaginer les brumes et la pègre de Londres; la misère des Noirs en Afrique du Sud me fut contée par Alex Laguma dans "Nuit d'errance". Je ne compris presque pas l'ironie et la critique voltairiennes. Il fallut maintes péripéties à mon esprit alors en gestation pour naitre à cette philosophie, à bien d'autres aussi sans doute.

Il faudrait bien reconnaître qu'on ne devient pas ami de tout le monde, l'amitié naît de cette sorte d'affinité élective, cette sorte de communauté de vues qui nous lie d'emblée avec ceux qui deviennent nos compagnons. Reconnaissons donc à la différence des Anciens, pour qui l'amitié ne peut exister que chez "les hommes de bien", que l'amitié n'est pas seulement attirance par la vertu. Le quotidien, l'histoire et la littérature nous offrent de nombreux exemples d'amitié dans le vice et le crime; le genre de dévouement qu'on y trouve exalte également qui postule à la fidélité et au respect de ses engagements.
C'est ainsi que, revenant à nos amis les livres, il se trouvera des personnes qui, en fonction de leur être, apprécieront des livres jugés détestables par d'autres.

Pour ma part, la plus grande leçon apprise auprès de ces bons petits amis à deux sous, fussent-ils littérature, philosophie, biographies, sciences humaines, c'est que "le rapport liant tous les hommes est celui que dicte l'égalité de la nature, que n'entament pas les contingences de l'histoire et de la vie: comme être réduit en esclavage, être riche ou pauvre, beau ou laid ou infirme, etc. La part divine qui brille en chaque homme est la même chez tous" (Dominique Ngoie-Ngalla).


Philippe Ngalla-Ngoie

7 commentaires:

Anonyme a dit…

Le livre est un ami veritable pour moi il n'est pas hypocrite il s'ouvre a tous le monde et ne manque pas d'imagination il passe d'une mais a une autre sans broncher sans bouder et peut se faire ecouter par plusieurs en mêmem temps il est adulte ou enfant et ne vous lache que si vous n'avez plus besoin de lui un ami veritable le livre !
godelive MOUCKO

Anonyme a dit…

Tout à fait d'accord avec toi Godé.
Content de te retrouver sur cet espace.
Le couz Phil.

Lokassa a dit…

Je n'aurais pas à commenter cet article, tout le bien qu'on puisse penser des livres y est dit.Une remarque cependant, i faut garder à l'esprit que l'homme a également besoin d'action, d'expériences, car la vie ne s'apprend pas dans les livres. Admettons pourtant que l'expérience de tout ce que offre la vie est difficile, il faudrait des milliers de vie pour pouvoir les vivre toutes, c'est en ce sens que les livres sont d'utiles compléments à la vie elle même et à tout ce qu'elle nous enseigne.

Anonyme a dit…

Les affinités électives font que ... nous allons choisir le type de lecture qui nous convient, dans lequel nous nous reconnaissons...
L'aventure du livre serait de découvrir autre chose que ses préférences.
Cela revient à vivre, à explorer la vraie vie avec ses sentiments et émotions, qui peuvent séduire ou blesser, ses expériences plus ou moins réussies...
Puis revenir se plonger dans ses lectures favorites, baume pour le coeur et l'âme, y trouver l'espoir et la force de retourner à la vie...
Passer de la théorie à la pratique...
Confronter ses idées à la vie et aux amis de chair et d'os, de coeur surtout
Oser le dialogue et l'échange, si enrichissants
Pour découvrir "la part divine qui brille en chaque homme" (merveilleuse pensée)
Gabrielle

Anonyme a dit…

Personellement, la lecture étant avant tout un plaisir, je ne lis que ce qui me correspond et à ce que j'attend de la littérature...
Quant aux autres, quel ennui!surtout lorsqu'ils résonnent comme des fausses notes. ca gache nos impressions.

Philippe.

Anonyme a dit…

Oui, c'est cela, Philippe, la littérature en tant que plaisir.
Mais si on lui en demandait plus?
Pas seulement plaisir, mais découverte, exploration, interaction, connaissance ...
En s'aventurant sur d'autres terrains, on peut avoir d'heureuses surprises, même si cela bouscule nos préférences.
C'est aussi une façon de s'ouvrir aux autres et de vivre l'altérité
Gabrielle

Anonyme a dit…

"Pas seulement plaisir, mais découverte, exploration, interaction, connaissance ...
En s'aventurant sur d'autres terrains, on peut avoir d'heureuses surprises, même si cela bouscule nos préférences." Toutes ces choses que nous emmènent les livres contribuent au plaisir qu'ils procurent, elles s'ajoutent à la forme, à l'art même de dire, d'écrire.

Philippe.

Par Dominique Ngoïe Ngalla et Philippe Cunctator qui nous livrent leurs réflexions sur le monde d'aujourd'hui : de l'Afrique clopinant sur le chemin de la modernité au reste du monde, de la complexité des enjeux politiques aux péripéties du fait religieux, nous découvrons sous la plume de Dominique l'âme du poète qui rêve d'un autre monde, mais n'oublie ni les brûlures de l'histoire ni la dure réalité du temps présent...

Quelques ouvrages de Dominique Ngoïe-Ngalla...





L'Evangile au coeur de l'Afrique des ethnies dans le temps court
; l'obstacle CU, Ed. Publibook, 2007 .




Route de nuit, roman. Ed. Publibook, 2006.




Aux confins du Ntotila, entre mythe, mémoire et histoire ; bakaa, Ed. Bajag-Méri, 2006.




Quel état pour l'Afrique, Ed. Bajag-Méri, 2003.




Lettre d'un pygmée à un bantu, mise en scène en 1989 par Pierrette Dupoyet au Festival d'Avignon. IPN 1988, Ed. Bajag-Méri, 2003.




Combat pour une renaissance de l'Afrique nègre, Parole de Vivant Ed. Espaces Culturels, Paris, 2002.




Le retour des ethnies. La violence identitaire. Imp. Multiprint, Abidjan, 1999.




L'ombre de la nuit et Lettre à ma grand-mère, nouvelles, ATIMCO Combourg, 1994.




La geste de Ngoma, Mbima, 1982.




Lettre à un étudiant africain, Mbonda, 1980.




Nouveaux poèmes rustiques, Saint-Paul, 1979.




Nocturne, poésie, Saint-Paul, 1977.




Mandouanes, poésie, Saint-Paul, 1976.




L'enfance de Mpassi, récit, Atimco, 1972.




Poèmes rustiques, Atimco, 1971.