lundi 23 août 2010

La tentation de la bouffonnerie dans la littérature africaine

Depuis quelques décennies, passée la génération de Mongo Beti, Tchikaya U'tamsi, Sylvain Mbemba, Tati Loutard et Cheickh Amidou Kane, est née en Afrique une sorte de littérature marquée par le peu de soin qu'elle donne à la langue dans laquelle elle s'exprime. Les sujets abordés soient-ils de ton grave ou badin se servent d'une langue dont le niveau, la forme d'expression ou style donnent une image peu flatteuse de la littérature africaine pour peu qu'on soit exigeaxxnt. Ces auteurs, surtout les francophones que je connais le mieux, se proposant d'écrire dans une langue originale, propre aux africains, servent une mauvaise cause: l'enfermement de l'esprit africain dans le flou et le brouillon, peu capable de s'exprimer de façon intelligible.
C'est oublier que le but que se donne la littérature est d'informer, d'instruire, mais toujours au moyen du beau. C'est encore oublier que, civilisation orale, les noirs sont obligés de donner donner un tour plastique à leur langue, excellent moyen de mémorisation. Les paroles floues s'en vont vite en fumée, c'est pourquoi tels des tailleurs de pierre, ils cisèlent leurs discours et les ornent. Ecoutez les griots ces historiens et généalogistes, il est difficile de trouver plus beau. Ecoutez rendre une sentence dans un Mbongui, difficile de trouver plus grave. Là, comme l'orateur au sens des Anciens, on ne persuade qu'au moyen d'une langue belle et puissante (Démosthènes, Cicéron). Or la majorité des écrivains célébrés par l'occident aujourd'hui sont complètement déconnectés de tout, sans ancrage. D'où sortent-ils, diable! Pas de parenté avec la grande langue française; pas de parenté non plus avec les orfèvres africains du verbe. Et cependant ils sont satisfaits puisqu'ils plaisent aux blancs en écrivant de cette façon.
A la vérité, pour qui se donne la peine d'aller y regarder de plus près, l'Afrique ne manque pas d'orfèvres du verbe, mais ils sont ignorés par l'Occident incapable de se représenter une Afrique autre que bouffonne, ayant assigné à la littérature africaine d'autres buts: amuser la gallerie tout à fait à côté de l'essentiel.Car enfin qui écrira aussi beau et bien que Césaire et Senghor si peu célébrés en occident leur préférant des écrivains dits originaux, mais dont les insuffisances sont criardes. Insuffisances brillament justifiées par le prétexte de tendre à une littérature libérée, meilleur exutoire à l'originalité de la création. En aucun art, la reconnaissance du talent ne s'obstient au détriment des exigences de l'expression du beau. Or la littérature est un art. Ecrire, quelque soit le principe que l'on se donne lorsque l'on choisit cette industrie, a des exigences. Nous sommes fatigués de ces littératures africaines oiseuses. Peu de livres, en effet, s'inspirent de la grave crise des valeurs que traverse l'Afrique. La littérature africaine est donc à déniaiser; la vocations des africains n'est pas d'être les saltimbanques des sociétés sérieuses à qui il manque quelques divertissements tant elles travaillent. Qu'on nous montre ces oeuvres mettant au centre de leurs préoccupations les grandes valeurs dont en permanence on nous rabat les oreilles. Comparaison n'est pas raison certes, mais nous aimerions nous aussi avoir une littérature de grand souffle inspirée des réalités du petit peuple des bidonvilles et des villages avec leur misère, leur ingéniosité et leurs crimes crapuleux. Comment, si on est écrivain de vocation, c'est à dire qu'on a du talent, ne pas tirer des personnages denses d'un tel univers. Pas d'autre moyen pour la littérature africaine de s'inscrire dans l'universel.
Cunctator.

48 commentaires:

Anonyme a dit…

C'est exactement cela, merci! "Avant" quand je choisissais un de ces livres francophones (ou quel que soit le nom qu'on veut bien leur accorder, car là non plus, ce n'est facile d'appeler un chat, un chat) on était sûr de trouver une littérature d'un merveilleux français épuré. Maintenant, il faut se contenter d'une histoire racontée à plus ou moins de ponctuation, plus ou moins de verdeur,...
Est-ce Goethe ou Montaigne? qui disait, ... lorsqu'on en a fini avec les contemporains, qu'il est bon de retrouver les auteurs anciens!

Cunctator a dit…

je vois que nos impressions sont sensiblement les mêmes.

"Maintenant, il faut se contenter d'une histoire racontée à plus ou moins de ponctuation, plus ou moins de verdeur,..."

PNN a dit…

Jean Paul Sartre est semi alsacien, moi bantou,d'une génération très éloignée de la sienne, mais nous sommes pourtant tous deux d'accords que «l'écrivain, comme tous les autres artistes, vise à donner à ses lecteurs une certaine affection que l'on a coutume de nommer plaisir esthétique et que je nommerais plus volontiers, pour ma part, joie esthétique; et que cette affection, lorsqu'elle paraît, est signe que l'oeuvre est accomplie.»

Anonyme a dit…

Cher cunctator, votre votre pamplet sans concession semble oublier que certains auteurs dont vous n'aimez pas le style, puisqu'il s'agit essentiellement de l'aspect esthétique de la littérature, s'adressent à des publics bien différents, et que la majorité des lecteurs, c'est un phénomène de notre temps, ne goutent pas à la grande classe littéraire...
Au sujet de l'instruction, c'est peine perdue. Elle est à éviter si le propos est de plaire coûte que coûte au public. devrions nous vous rappeler comme Anatole France en son temps, pourtant moins avantagé en niaiserie que le notre que"le lecteur n'aime pas à être surpris. Il ne cherche jamais dans l'histoire que les sottises qu'il sait déjà. Si vous essayez de l'instruire, vous ne ferez que l'humilier et le fâcher. Ne tentez pas l'éclairer, il criera que vous insultez à ses croyances."

Bien à vous cher ami et encore merci pour cet article.

Anonyme a dit…

Ne sous-estimons pas le lecteur, amenons-le au Beau!
Malgré lui et sans y penser, il saura apprécier la valeur des mots vrais.
Gabrielle

Cunctator a dit…

@Gabrielle, à relire les propos de notre ami anonyme, une sorte d'ironie y transaprait. Ses affirmations sortes de constat maquillées sont en fait des charges:"c'est un phénomène de notre temps, ne goutent pas à la grande classe littéraire[...] Au sujet de l'instruction, c'est peine perdue. Elle est à éviter si le propos est de plaire coûte que coûte au public[...]Le lecteur n'aime pas à être surpris. Il ne cherche jamais dans l'histoire que les sottises qu'il sait déjà. Si vous essayez de l'instruire, vous ne ferez que l'humilier et le fâcher. Ne tentez pas l'éclairer, il criera que vous insultez à ses croyances "
Je vous laisse faire votre commentaire.

Cunctator a dit…

@Gabrielle: "Ne sous-estimons pas le lecteur, amenons-le au Beau!
Malgré lui et sans y penser, il saura apprécier la valeur des mots vrais." j'aime beaucoup.

Anonyme a dit…

Merci!
Je ne goûte pas l'ironie d'un constat d'échec...
Si l'on apprenait plus de poésie en cours (primaire, collège...) le goût du mot serait mieux développé.
C'est à chacun d'oeuvrer vers le beau.
Ainsi, je n'impose rien à ma fille, mais je laisse traîner le livre... que j'ai aimé, que j'aimlerais qu'elle lise ...
En vacances, sans télé, nous emportons un recueil et chaque soir, le livre passe de main en main, chacun lit un poème, à tour de rôle. On aime ou pas, on commente.
Nous passons beaucoup de temps entre espace culturel et librairie.
Un enfant qui a compris le rôle de la lecture est un adulte sauvé.
Savoir également comprendre ses goûts et proposer le bon livre,adapté au tempérament de l'enfant. Ne pas hésiter à lire aussi le livre jeunesse qui l'a emballé, pour pouvoir en discuter et montrer ainsi qu'on respecte ses choix. Le partage est important.
Les gestes de la vie sont des petits riens si simples, sincères et efficaces
Il y a l'instruction qui fait ce qu'elle peut et il y a l'éducation qui soulève les montagnes.
Gabrielle

Anonyme a dit…

Que dire Gabrielle, c'est ainsi que je vois moi même l'éveil à la lecture. Il ne s'agit pas de forcer l'enfant, mais plutôt de l'inviter au livre. Puis, petit à petit on développe une amitié vis-à-vis du livre, à tel point qu'on finit par se demander si on peut s'en passer.

A l'heure de l'hypermédiatisation, de l'industrialisation culturelle, que penses-tu du rôle de la critique et des autres propagateurs. Perry Anderson dans un ouvrage sur le déclin de la culture française, parle d'une critique médiocre...

Philippe.

Anonyme a dit…

Pour toi chère amie du beau. "L’esprit de critique est un esprit d’ordre; il connaît des délits contre le goût et les porte au tribunal du ridicule, car le rire est souvent l’expression de la colère, et ceux qui le blâment ne songent pas assez que l’homme de goût a reçu vingt blessures avant d’en faire une. On dit qu’u...n homme a l’esprit de critique lorsqu’il a reçu du ciel non-seulement la faculté de distinguer les beautés et les défauts des productions qu’il juge, mais une âme qui se passionne pour les unes et s’irrite des autres, une âme que le beau ravit, que le sublime transporte, et qui, furieuse contre la médiocrité, la flétrit de ses dédains et l’accable de son ennui." Antoine de Rivarol.

Philippe.

Anonyme a dit…

A mon avis... il n'y a plus de critiques
Il ya des auteurs qui écrivent le plus de livres possible (avec de moins en moins de pages, de plus en plus de répétitions d'un livre à l'autre, sans parler encore verdeur ou ponctuation), puis qui assurent la promotion de leur roman en le commentant eux-mêmes.
Aucun n'a encore dit: "N'achetez pas cela, c'est d'un vide..."
Ensuite, il ya l'uniformisation de la pensée par la mode: il faut avoir lu tel ou tel auteur incontournable sur les médias, au mépris de toute originalité, de toute intelligence, de toute affinité.
Ne surtout pas avouer une lecture insipide!
Alors qu'il suffit de "fouiner" dans les nouveautés comme dans une bibliothèque (caverne d'Ali Baba!) pour trouver le trésor littéraire qui saura ravir notre âme... en dehors des sentiers battus!

Bien, je lis Perry le marxiste et je reviens! :-)

Merci Philippe pour cette belle pensée de Rivarol, j'adore!
"furieuse contre la médiocrité, la flétrit de ses dédains et l’accable de son ennui" voilà l'attitude critique idéale et si fière!
Diderot disait, dans une phrase que je ne retrouve pas, qu'il faut voir le Beau en toutes choses, seulement le Beau...
C'est une bonne méthode aussi
A bientôt! Gabrielle

Anonyme a dit…

L'uniformisation, la standardisation,même au niveau des attitudes culturelles est un des avatars de la société de consommation. Une réflexions à ce sujet est en gestation.

Merci Gabrielle.

Philippe.

Anonyme a dit…

J'ai hâte de lire cette nouvelle réflexion!
Gabrielle

Anonyme a dit…

"Broyés par des institutions culturelles dont la fatalité est de nous aliéner, nous prétendons créer une littérature qui soit l'expression authentique de notre moi collectif."
Mongo Beti.

Anonyme a dit…

Quite interesting!
Writing of course is a pathway of informing a wider audience on our experiences with an aim of educating the people and enlightening their spirits for a better management,if they were in ur shoes.These experiences could be inspiring,saddening,joyful,...but at the end of the day,something expressed by the author is retained by the readers.The book of leonora MIANO (L'interieur de la nuit) is for me an exceptional example because through this book,a true picture of how the whites see the Africans is painted,a bit of of the colonial and slavery story as well to update the younger and present generation of their roots,history,backgraond,values and identity.No perfect way of passing facts to the next generation.

Anonyme a dit…

Quite interesting!
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Anonyme a dit…

"Sans la langue, en un mot, l'auteur le plus divin
Est toujours, quoi qu'il fasse, un méchant écrivain."

Nicolas Boileau, Il est certains esprits.

Obambé a dit…

Hum !
Quelle charge !
Qu’entends-tu par « paroles floues » ?
@ suivre, O.G.

Anonyme a dit…

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With havin so much content and articles do you ever run into any issues of plagorism or copyright
violation? My blog has a lot of unique content I've either authored myself or outsourced but it looks like a lot of it is popping it up all over the internet without my agreement. Do you know any ways to help reduce content from being stolen? I'd certainly appreciate it.


Also visit my web-site: website

Par Dominique Ngoïe Ngalla et Philippe Cunctator qui nous livrent leurs réflexions sur le monde d'aujourd'hui : de l'Afrique clopinant sur le chemin de la modernité au reste du monde, de la complexité des enjeux politiques aux péripéties du fait religieux, nous découvrons sous la plume de Dominique l'âme du poète qui rêve d'un autre monde, mais n'oublie ni les brûlures de l'histoire ni la dure réalité du temps présent...

Quelques ouvrages de Dominique Ngoïe-Ngalla...





L'Evangile au coeur de l'Afrique des ethnies dans le temps court
; l'obstacle CU, Ed. Publibook, 2007 .




Route de nuit, roman. Ed. Publibook, 2006.




Aux confins du Ntotila, entre mythe, mémoire et histoire ; bakaa, Ed. Bajag-Méri, 2006.




Quel état pour l'Afrique, Ed. Bajag-Méri, 2003.




Lettre d'un pygmée à un bantu, mise en scène en 1989 par Pierrette Dupoyet au Festival d'Avignon. IPN 1988, Ed. Bajag-Méri, 2003.




Combat pour une renaissance de l'Afrique nègre, Parole de Vivant Ed. Espaces Culturels, Paris, 2002.




Le retour des ethnies. La violence identitaire. Imp. Multiprint, Abidjan, 1999.




L'ombre de la nuit et Lettre à ma grand-mère, nouvelles, ATIMCO Combourg, 1994.




La geste de Ngoma, Mbima, 1982.




Lettre à un étudiant africain, Mbonda, 1980.




Nouveaux poèmes rustiques, Saint-Paul, 1979.




Nocturne, poésie, Saint-Paul, 1977.




Mandouanes, poésie, Saint-Paul, 1976.




L'enfance de Mpassi, récit, Atimco, 1972.




Poèmes rustiques, Atimco, 1971.