dimanche 30 décembre 2007

Europe-Afrique: le sommet de Lisbonne. Quand les riches tentent de dicter leur loi aux pauvres

La tenue du sommet Europe –Afrique, à Lisbonne, au Portugal, ne devait rien au hasard. Elle revêtait, pour l’occident comme pour l’Afrique, une haute valeur symbolique ; avec, en perspective, l’espoir de rapports enfin humanisés entre deux vieux partenaires dont l’un est devenu, par la faute de l’autre, la risée du monde. Le Portugal, comme chacun sait, s’était taillé en Afrique, après trois cents ans de traite des noirs féroce, un immense empire colonial. Vulgaires et foncièrement racistes, les colons portugais s’y montrèrent cruels et impitoyables. Jusqu’à l’indépendance de cet empire acquise dans le sang, malmenés, chosifiés à l’instar de ceux des colonies belges, espagnoles, britanniques et françaises, les noirs des colonies portugaises vécurent en étrangers dans leurs propres pays. Joao Gomes s’en est souvenu ; et, avec des accents de repentance qui ont dû faire bondir Nicolas Sarkozy de colère, il a évoqué, courageux, la question de la responsabilité de l’Europe dans le sombre destin de l’Afrique.

En bien des Européens, pour diverses raisons, existe, on le sait, un réel élan de sympathie pour l’Afrique et les Africains. De bonnes intentions aussi. Et volontiers, ces cœurs sensibles appellent les africains, « nos amis les Africains ». Seulement, l’enfer est pavé de bonnes intentions ! et cette épineuse question de la reconnaissance par l’occident de sa responsabilité dans les malheurs de l’Afrique et des modalités de réparation de la faute qui pourraient se traduire par la volonté de proposer des accords justes et équitables aux Africains est loin de faire l’unanimité au sein d’une Union Européenne trop près de ses sous, trop longtemps marquée par un rapport aux Africains tissé de mépris ; d’autant plus que la posture singulière Nicolas Sarkozy, ses pirouettes et son double langage ont de quoi brouiller les perspectives et entraîner les hésitants à faire bloc autour de cet homme si peu respectueux des Africains exaltés dans ses discours, malmenés dans les actes, (ces expulsions inhumaines, ce flirt scandaleux avec des hommes politiques Africains peu fréquentables…) L’ombre du fébrile Président français a plané sur le sommet de Lisbonne et en a empoisonné l’atmosphère. Visiblement encore mal dégagé du lien colonial par lequel la France et l’occident avaient tenu l’Afrique, et de ce fait prenant ses habitants infantilisés pour des gens incapables d’une riposte conséquente, et obséquieux, serviles, comme au bon vieux temps colonial, toujours prêts à se jeter aux pieds du maître pour implorer grâce, Sarkozy les rabroue volontiers comme des gamins de mauvais esprit, de toujours ressasser leur passé. C’est de cet homme que les Africains se sont souvenus au sommet de Lisbonne, où ses apartés flagorneurs avec quelques uns des Africains les plus irréductibles avaient quelque chose de la grimace du sorcier.

En tout cas, sa politique de l’immigration conduite par un homme de feu marquera pour longtemps la mémoire collective des Africains insultés. Et ce n’est pas l’entrée dans son gouvernement de femmes venues d’Afrique (juste pour donner le change) qui videra chez tant d’hommes et de femmes blessés, l’amertume de l’injure. Pas de surprise donc que les Africains aient rejeté en bloc les propositions et les projets d’accord de Lisbonne. Lisbonne était un marché de dupes.

dimanche 18 novembre 2007

La France face à son héritage (suite et fin)

Pauvres diables de Nègres ! Vous n’êtes rien que ces stupides sourires de panneaux publicitaires des banlieues parisiennes et des métros parisiens ! Vous n’existez pas. Or vous avez sauvé la France, vous les vrais amis de la France, l’ingrate métropole, qui, depuis vos indépendances, en reconnaissance pour bons et loyaux services, accumule sur votre parcours les obstacles de toute sorte pour vous empêcher de sortir de la sous-humanité, vous qui avez sauvé la France. Vous sur qui reposèrent au plus fort du péril, les destinées de la France. En cet épouvantable été de 1941, un non de Brazzaville et du Congo à l’appel fameux de De Gaulle eut suffit pour que la France fût perdue. Et cependant combien de français ont conscience aujourd’hui de devoir un peu de bonheur au Nègre Félix Eboué et aux tirailleurs sénégalais de Brazzaville, d’Abidjan, de Dakar, de Niamey, de Libreville que la France repousse aujourd’hui avec brutalité comme d’épouvantables bêtes puantes et malfaisantes, pour peu qu’il leur manque un petit papier ? C’est pourtant la France qui est responsable de l’immigration de ces Nègres : elle qui, par la férocité et l’égoïsme de ses multinationales rend leurs pays inhabitables. C’est vrai que, pour un peu de pétrole, pour un puits de pétrole, pour un peu de cacao et de banane, la France peur allumer une guerre civile dans n’importe quel pays francophone d’Afrique Noire. Et vive la francophonie, l’assommoir des nègres diplômés en demande de reconnaissance sociale ! L’exemple du Congo-Brazzaville et de la Côte d’Ivoire illustre excellemment cette affirmation.


Pour ses intérêts assis sur l’économie de traite imposée (avec quelle malice) à ces pays, par un euphémisme d’une ironie choquante dits pays en développement, l’Occident voudra à tout prix cette guerre civile et ethnique dont le vainqueur n’aura rien fait de mieux que d’accroître la misère des siens. Il faut plaindre ces dirigeants africains malhonnêtes qui, en permanence, complotent avec l’Europe contre le bonheur de leurs peuples à qui ils ne laissent pour seul et unique droit que celui d’applaudir leurs mensonges.


Le malheur du continent africain est peut-être d’avoir lié, de nécessité ou d’opportunité son sort à celui de l’occident. Mais l’histoire et la géographie rendaient inévitables des liens tissées de contradictions.


Au-delà des caractéristiques biologiques, si nettes dans leurs différences, par leurs formes comme par leurs expressions, l’Europe et l’Afrique sont bien loin l’un de l’autre. Un tel écart rendait improbable un lien de quelque affinité entre Blancs et Nègres. La tragédie du choc de ces deux cultures n’étonne donc pas. Encore que, sauf chez quelques intellectuels, et par réaction, les Noirs n’éprouvent généralement aucun sentiment de xénophobie contre les Blancs. Il faudra qu’un jour, psychologues et psychanalystes nous expliquent ce geste de sympathie spontanée qu’en dépit de tant de coups pendables que les Blancs leur ont fait, et ce n’est pas fini, les Noirs éprouvent toujours pour les Blancs. Elle ne me paraît pas une manifestation de l’admiration éperdue que suscite chez eux la prestigieuse civilisation des Blancs. Il n’est pas impossible que d’avoir été à leurs côtés (avec quelle vaillance) à deux des moments les plus sombres de leur histoire (1914-1918 ; 1939-1945), et d’avoir découvert la fragilité humaine de leurs arrogants colonisateurs ait fait naître en eux de la compassion pour les Blancs. Et qu’importe, dès lors, que passé le péril, ces Blancs ne se souviennent plus de ceux-là, qui auraient du les obliger, s’ils étaient civilisés comme ils le prétendent. Qu’importent la goujaterie de leurs alliés de circonstance. Ils n’en demeurent pas moins leurs frères en humanité. En Afrique, la famille c’est sacré. Se fondant bien, au contraire, sur des considérations étonnantes, ces drôles de frères en humanité élaborent des métaphysiques fumeuses qui justifient la théorie vraiment aberrante de l’infériorité de certaines races, (principalement la race noire), et s’en autorisent pour maintenir, le cœur et la conscience tranquilles, l’Afrique dans son état de mortel sous-développement, afin qu’elle ne devienne jamais autre chose que la nécessiteuse pourvoyeuse des matières premières dont leurs industries toujours plus développées et plus gourmandes ont besoin.

Le drame est que ce sous développement économique de l’Afrique, comme une conséquence nécessaire, s’accompagne chez les Noirs d’une dégradation croissante de la moralité et d’une déficience grandissante de la pensée. Leur jeu conjugué augmente sans cesse le déséquilibre et le désordre de sociétés qui, on peut le craindre, se soldera, le sida, la drogue, et toutes les autres épidémies aidant, par la disparition d’une race si mal aimée sur la terre des hommes. L’histoire nous enseigne que les indiens d’Amérique dont il ne reste aujourd’hui que quelques résiduels pour le plaisir du tourisme parqués dans des réserves comme des animaux, avaient disparu de cette façon.

lundi 29 octobre 2007

Les immigrés soumis au test d'ADN.L'indignation du président du Congo, Sassou Nguesso

Les immigrés, maghrébins et noirs d’Afrique (par euphémisme enveloppés dans la neutralité du mot immigré) se sont sentis orphelins le soir du vote, par le parlement Français, de la loi sur le tes d’ADN auquel seront désormais soumis les candidats au regroupement familial.
La mesure est une atteinte grave aux droits de l’homme dont, pourtant, les français sont depuis la révolution de 1789, les ardents défenseurs.

Alors Wade, le président du Sénégal pourtant impliqué dans la lutte contre l’immigration clandestine, a surgi pour dénoncer avec rage, la loi injuste et scélérate .incompréhensible quand on sait que ceux dont il s’agit viennent des anciennes colonies françaises, et donc des francophones dont par ailleurs, les aïeux, à deux reprises, étaient accourus au secours de la France menacée d’esclavage.
Wade est intervenu non dans l’espoir vain de faire reculer ceux qui portent encore les gênes de ceux-là, qui sans vergogne, ne craignant ni les dieux ni les hommes, avaient osé livrer aux nazis les juifs et les enfants juifs, Wade est intervenu simplement pour informer l’opinion mondiale civilisé du retour des barbares.
Pas encore remis, du choc du discours de Sarkozy à Dakar, l’Afrique se taisait hébétée.
Sauf Wade puis, plus personne. Puis à nouveau le grand silence malgré le profond malaise.

C’est alors Sassou Nguesso tenu par les mauvaises langues pour être l’âme damnée de l’Elysée en fait de politique africaine de la France, c’est alors donc que contre toute attente Sassou Nguesso s’est dressé pour emboîter le pas à Wade.
On l’a vu blême de colère et d’indignation et cherchant le mot juste pour dénoncer l’innommable. En fait pour ceux qui le connaissent bien, on n’attendait pas moins de celui qui, il y a des deux décennies, au nom du respect dû à tout être humain fût il nègre ou arabe, au nom de l’humanité, intacte et entière en chaque homme fût il nègre ou arabe mobilisa, infatigable, l’Afrique entière pour la libération de Mandela. On peut donc s’attendre à ce que cet homme de fier tempérament et qui a à ce point le sens de l’honneur, mobilise encore pour entraîner l’Afrique tout entière, et tout homme civilisé, à crier haro sur ceux qui, pour préserver la prétendue pureté de leur race et sortir du marasme économique qui trouve son origine dans la faillite de l’imagination et de l’inventivité des dirigeants français, diabolisent les maghrébins et les nègres qui n y sont pour rien.

Monsieur le président, merci pour, ce beau sursaut d’orgueil pour défendre l’Afrique insultée.

dimanche 7 octobre 2007

Les immigrés soumis au test de l'ADN: l'indignation et la belle colère du Président Wade

Homme de grande sagesse et patient, le président Wade avait laissé Nicolas Sarkozy développer sur l’Afrique Noire, avec sa brutalité coutumière (accentuée en l’occurrence par un rapport à l’Afrique, encore colonialiste) des thèses erronées, aberrantes et peu amicales pour quelqu’un qui prétend aimer l’Afrique. Le président Sénégalais faisait sans doute à son hôte, l’excuse de cette ignorance crasse des choses de l’Afrique Noire que les occidentaux, les Français notamment, se font presque un honneur de cultiver. Mais lorsqu’ il s’est agi de la loi vraiment honteuse faisant obligation aux immigrés (mais qui ignore que immigré ici est un euphémisme pour désigner les Noirs d’Afrique et les Maghrébins ?) désireux de faire venir leurs familles, de subir un test d’ADN qui apporte la preuve du lien génétique de l’immigré avec sa progéniture, outré, le vieux sage a explosé. Sans précautions de langage, il est sorti de sa réserve d’homme d’Etat pour condamner, indigner comme simple particulier la loi scélérate et honteuse indigne d’une société civilisée « soyez francs et, Etat souverains dites nous que vous ne voulez plus nous voir chez vous (…). Vous multipliez les obstacles à l’immigration. Aujourd’hui c’est le test d’ADN. Et ce sera quoi d’autre demain ? ». Voila qui est parler franc à des hommes qui se targuent d’être les champions de la franchise.
Plût au ciel que d’autres politiques africains eussent le courage du Président sénégalais, et l’audace intelligente de dénoncer des mesures dont il n’a que le Parlement français pour ne pas voir qu’elles ne sont pas racistes. Les subtilités de langage des amendements votés à la hâte n’enlèvent pas à cette loi son caractère profondément raciste, quoi qu’on dise. Malheureusement le Président Wade est seul à prendre ouvertement position et à dénoncer avec véhémence. Pourquoi les autres responsables politiques africains se taisent-ils. Ont-ils encore comme leurs grands-parents colonisés peur du Blanc, père fouettard ? Ou bien est-ce parce qu’ils sont des pachydermes, insensibles à l’honneur de leur race insultée ? Insensibles à ce qui ne touche pas leurs petites personnes.

Le silence des intellectuels français en revanche surprend moins. Certes leur combat est à l’origine de la loi bioéthique qui interdit les manipulations génétiques sur les êtres humains. Ces intellectuels français sont-ils au dessus des masses populaires françaises, d’après le CSA favorables à 47% à la loi sur le test d’ADN, et sont-ils sortis des doutes de leurs ancêtres des Lumières qui débattaient sans pouvoir conclure du point de savoir si le Nègre avait une âme humaine, auquel cas il devait être respecté dans sa dignité d’humain ? Dans le doute il faut s’abstenir certes et en bon cartésien attendre qu’on y ait vu plus clair. Mais dans une question d’éthique aussi grave comment attendre ? L’intellectuel n’est-il pas d’abord un réservoir de révolte et d’amour ?

vendredi 21 septembre 2007

La france face à son héritage (première partie)

La France non sans raison, le pays, (et pour cela respectable), de tradition humaniste le plus en vue d'Occident, de par sa position géographique, naturellement , presque de force, ouverte à tous les vents de l'histoire et donc à toutes les cultures on comprend que, de tous les flots humains venus de tant d'ailleurs, et lentement fondus sur son sol lui-même si divers, elle ait, d'âge en âge, de génération en génération, non sans beaucoup de bruit, parfois réalisé cette merveilleuse synthèse que traduit, d'abord, peut-être, cette belle langue française en laquelle, au XIIIe siècle déjà, le Florentin Brunetto Latini "la parleüre la plus délitable" (agréable). Et si on quitte la langue, et qu'on se place sur le plan moral, par exemple, se trompe-t-on si on affirme que, par son bel équilibre psychologique, l'homme français, en général, à l'instar de sa langue, compte parmi les plus belles réussites de l'humanité en marche?

Il n'est pas un pays d'Occident, qui, par sa culture et sa vision du monde, présente comme la France autant de titres à revendiquer l'héritage de Rome, et d'abord de l'Athènes des champions de la raison et des droits de l'homme que dans un discours qu'il met dans la bouche de Périclès, Thucydide célèbre avec une fierté méritée. Les sophistes et les philosophes , épicuriens et cyniques avaient travaillé à libérer l'homme de la terreur des dieux, et de ce hochet des petits dieux turbulents, facétieux et sans mœurs, furent désormais la valeur de référence. En France, l'éclosion des libertés, au péril de leur vie, revendiquées comme un attribut de l'homme, d'abord par une poignée d'intellectuels, proclamées pour finir, sur la place publique et montrées aux humbles mêmes comme l'attribut de tout animal répondant à la définition de l'homme, à quel que groupe humain qu'il appartienne, de quelle que strate sociale qu'il relève, ne fut pas un fait d hasard. Affleurait là, et de façon spectaculaire et exemplaire en cette Révolution de 1789, un vieux courant de pensée dont les racines, plantées dans le verbe iconoclaste et laïc de Protagoras d'Abdère, et de Gorgias de Léontinoï, puis transplantées dans le terreau du pragmatisme latin, furent reprises et définitivement greffées sur le discours universaliste des disciples de Jésus.
Elles sont depuis devenues le môle de la civilisation d'Occident. Si solide que les assauts répétés et multiformes des Barbares de toutes époques, Vandales, Arabes, Vikings, Nègres et caucasiens, s'y briseront. Par son ardeur à défendre pendant de longs siècles, le dépôt des principes sacrés de la civilisation de l'universel, et à les mettre dans l'esprit de tous les peuples de la terre, la France a fini par représenter, chez tous les peuples de la terre, la patrie des droits de l'homme.
Et d'abord la patrie de l'humanisme, le terreau des droits de l'homme. Les noms qui en illustrent le combat le combat en Occident contre des pouvoirs civils et religieux ignares et attardés sont connus. Epelons-en quelques uns: Lefèvre d'Etaples, Etienne Dolet, Guillaume Budet, Erasme de Rotterdam, Boccaccio, Dante et ces autres qui finirent sur le bûcher, poursuivis et persécutés pour leur foi et leur confiance en la nature raisonnable de l'homme, guignés de travers parce qu'ils affirmaient la transcendance de l'humain que l'esprit, sa composante essentielle, hisse au sommet de la hiérarchie des valeurs.


L'esprit qui est aspiration à l'amour, à la justice, à la vérité, à la beauté. L'esprit qui est liberté et raison, et la raison qui est exigence impérieuse de sens et d'intelligibilité repousse l'égoïsme du corps, rejette les valeurs vitales, condamne l'exploitation des faibles.
Les humanistes qui ont opté pour la conscience claire et la pensée ordonnée prirent l'engagement de libérer l'homme du déterminisme de l'instinct, afin que, tout en sauvegardant l'équilibre entre la chair et l'esprit, s'impose le primat du spirituel. Ce combat d'anachorète et de cénobite qui fut, à cause des exigences et des risques courus, le fait de quelques uns d'abord, l'affaire d'un petit groupe d'hommes entêtés, devait au cours des âges, marquer la France en profondeur, et faire d'elle, des millénaires après Athènes et Rome, le pays le plus aimable et le plus policé de l'Occident post-médiéval. Le pays de la chrétienté et de la chevalerie qui rendirent possible le christ de Cevron et sa beauté accueillante; le pays de l'Ange de la cathédrale de Strasbourg au beau sourire; le pays des plus belles cathédrales au monde: Bourges et Chartres; Reims et Amiens, Notre-Dame de Poitiers et Saint-Pierre de Moissac; et l'autre Notre-Dame, celle de Paris, debout sur son île comme une tour d e la foi surgie du rêve des hommes.
C'est cette France de l'ouverture accueillante, cette France du courage, de la vaillance et du dévouement qu'ont héritée ces femmes et ces hommes qui, aujourd'hui, affrontent avec une admirable détermination, les lois iniques, racistes et scélérates édictées par leur pays sur l'immigration. Ces Français et ces Françaises témoignent, par ce bel enthousiasme réfléchi, de leur volonté de croire en l'homme et de l'aimer. En dehors même de ceux-là qu'on voit à la pointe du combat pour une France toujours plus humaine, ils ses comptent par milliers, hommes et femmes, liés aux Noirs d'Afrique par l'amitié la plus pure et la plus noble.
Et c'est cela qui rend supportable à la catégorie des nègres à laquelle j'appartiens, toutes les injures que la France leur fait; toutes les injustices que la France leur fait subir […].

En face de cette France militante, la fierté et l'orgueil de tout homme honnête vivant en ce monde, l'autre France, dans laquelle Saint Louis ne se reconnaîtrait pas, ni l'abbé Grégoire le constitutionnel, l'ami des Noirs. Une France oublieuse de ses grandeurs passées, la France des cathédrales et de la foi; la France de Voltaire, le Voltaire de l'Affaire Callas; la France de Montesquieu, le défenseur de la cause des Noirs, la France de Saint-Just; la France des droits de l'homme qui embarrassent tant de Français aujourd'hui, surtout lorsqu'il s'agit des Nègres d'Afrique qu'ils n'ont jamais aimé que comme moyen de production. Eux qui ont tant aimé la France, ces nègres, eux qui ont tant payé pour la France, eux qui ont porté la France à bout de bras: 14-18; 39-45. Quand éclatent les deux guerres qui la mènent aux portes du désastre et de l'esclavage, la France fait de ces Nègres méprisés et moins bien traités en temps de paix que les toutous et les minets qui ornent les salons des bourgeoises de ses grandes villes, des troupes d'élite, la terreur de l'ennemi sur le champ de bataille.
Puis la guerre terminée et sauf l'honneur de la France, payés en monnaie de singe et mal honorés à empoisonner le sommeil de Senghor, ceux-là qui ont sauvé la France, les héros, sont renvoyés les mains vides à leur sombre destin. Ils redeviennent ces "macaques aux traits impossibles, et ces grands enfants" qui alimentent les conversations des cercles coloniaux.

dimanche 9 septembre 2007

Du nécessaire devoir de mémoire

Nous sommes sortis d’un siècle qui s’est illustré par de très grandes atrocités contre l’espèce humaine ; un siècle où l’homme a acquis des moyens de destruction inouïs ; un siècle où l’homme a rejeté l’humanité dont il se trouvait sur les pentes de la conquête.
Notre époque grouille d’une élite qui, bien qu’ayant perdu de son brillant, a somme toute le mérite d’être qualifiée comme telle. Les personnes constituant cette élite, la plus haute élite politique et financière surtout, ne sont plus mûs par de nobles idéaux comme du temps de Thémistocle, de Périclès, et de Caton l’Ancien.
Notre élite moderne a souvent cédé à la tentation de la facilité, du mensonge, de la corruption et enfin du cynisme. L’intérêt est vénéré comme un dieu ; ils le recherchent par tout moyen, même au prix de dizaines de milliers en pertes humaines.

La renaissance avait tourné l’Occident vers les valeurs et idéaux classiques que le Moyen-âge n’avait pas repris. L’Occident nouveau a continué sa lancée vers les siècles pour constituer une belle aventure : progrès des sciences, progrès de la mécanique, grandes découvertes géographiques, réformes théologiques, etc. Une chose, cependant, est venue tâcher ce beau tableau, c’est à cette époque de révolution intellectuelle, artistique et scientifique de l’Occident que débuta une grande injustice de l’histoire : la Traite Atlantique. Outre les énormes profits qu’elle promettait, les motivations de la Traite étaient racistes, car elle niait le caractère d’humanité à ces habitants des terra jadis incognita.

La tentative pour célébrer aujourd’hui cette tragédie est rangée aujourd’hui dans le registre de la « victimisation » par quelques intellectuels occidentaux, eux-mêmes relayés par certains hommes politiques. Ce qu’on ne reproche pas aux victimes de la Shoa qui ont tout loisir de revenir sur toutes les tragédies qu’ils ont souffertes à travers leur histoire torturée, la dernière étant les camps de concentration sous le régime nazi.
Et pourtant, se souvenir est simplement un moyen de comprendre ce passé torturé afin de s’en libérer, puisque ses conséquences continueront de marquer, même de façon subreptice, nos rapports réciproques. L’Allemagne, nation responsable s’est faite un devoir de reconnaître et de condamner la barbarie nazie.
Se souvenir n’est pas une position offensive. Point besoin, dans ce cas, de s’offusquer qu’un groupe humain rangé parmi les peuplades barbares il y’a peu pleure sur les malheurs des siens. Se souvenir est une façon de transmettre le relai, cette histoire particulièrement atroce. Si nous ne rejetons de cette façon notre passé, il peut nous rattraper. S’en souvenir est une façon de s’en libérer.

Philippe Ngalla-Ngoie

dimanche 26 août 2007

Jusqu’à ce qu’il n’en reste pas un seul

Le gouvernement français qui s’est fixé pour objectif 25.000 expulsions annuelles de sans-papiers, brule d’impatience d’y parvenir. C’est son droit le plus absolu, surtout si les immigrés sont les responsables de tous les malheurs de la France : chômage, pédophilie, incendies de pinèdes et autres délits qui empêchent les français de respirer. Il faut alors plaindre le peuple français trop vite convaincu par ses élus d’une telle supercherie. Mais alors au nom de l’humanité commune et de ses fondements philosophiques et moraux il faut regretter que emportés par leur rage xénophobe et raciste ceux qui expulsent oublient soudain qu’ils ont affaire à des êtres humains, et donc que tout en restant fermes ils ont le devoir d’humaniser les procédures et les rites d’expulsion. Le terme expulsion connote la violence physique dont tout homme de bonne volonté devrait avoir horreur. Ceux qu’on expulse avec tant d’inhumanité barbare ne sont pas de dangereux criminels pour qu’il soit nécessaire de leur passer les menottes, de les bâillonner parfois ; puis après les avoir ainsi humiliés, de les jeter sans ménagement dans les charters comme des sacs de merde.
Des traitements dont dans cette société française si délicate on épargne les chiens eux-mêmes, à moins qu’ils ne soient enragés. Que les policiers chargés de telles missions n’en aient pas la nausée, c’est peut-être là la preuve qu’ils ne sont encore que de rudes sauvages à civiliser. En tous cas il est troublant que ces choses aient lieu dans une France qui est, par le nombre d’intellectuels de haut rang au kilomètre carré, le cœur en quelque sorte de la conscience de l’Occident. Les intellectuels, ceux-là qui travaillent aux choses de l’esprit et de la conscience et qui sur les questions de morale et de politique réfléchissent au quotidien et, réservoir de révolte toujours, dénoncent les injustices et proposent des solutions. On ne les entend pas beaucoup sur le problème des immigrés où leur notoriété pèserait certainement lourd. Comment expliquer leur indifférence devant le drame humain que vivent les immigrés. Les positions partisanes et franchement racistes et xénophobes de certains d’entre eux sont connues (honte à la philosophie et aux belles lettres). Si l’intellectuel ne s’indigne pas devant les pratiques barbares de sa société, qui donc le fera à sa place ? Le théologien ? Erreur !
En dépit de la séparation de l’Eglise et de l’Etat suivie de violences monstrueuses, l’Eglise de France (catholique et protestante) est à droite, vote à droite. Et c’est bien connu, c’est en son sein que se recrutent les militants de l’extrême droite et les racistes de la pire espèce. C’est à croire que le christ était de droite !

mercredi 15 août 2007

Esprit cartésien et sagesse africaine

Achever le discours confus du monde en une parole précise, et j’ajouterai efficace. Vœu du philosophe qui résume la quête inlassable de l’occident, des présocratiques à René Descartes dont le discours fameux annonce et crée, enfin sorti du rêve des poètes, le bel aujourd’hui, la modernité efficace à laquelle notre monde saturé de matériel et plus que jamais assoiffé de mystère, ne reproche qu’une chose : d’avoir oublié que l’Homme ne vit pas que de pain. L’invasion de l’occident par le matériel compromet en effet gravement la modernité de la société contemporaine qui vire à l’utilitarisme prosaïque que justement rejette la sagesse africaine qui refuse de désacraliser le monde, le risque étant de tourner le dos au progrès dans sa version matérielle. Ainsi, esprit cartésien et sagesse africaine s’opposent sur le plan de leurs intentions. Et cette opposition se traduit par le développement contrasté des sociétés occidentales et des sociétés négro-africaines. Dans ce cas aucune de ces deux sociétés ne peut se prétendre véritablement développée. De la réconciliation de leurs deux visions du monde dépend peut-être bien l’avènement d’une authentique modernité : l’émergence d’une société de part en part traversée de rationalité certes, mais une rationalité qui n’expulse pas l’homme de lui-même, condamné en quelques sortes à vivre à la périphérie de lui-même, faute de vie intérieure. Lorsqu’il affirme que par la science l’homme doit devenir maître et possesseur de la nature, Descartes croyant soucieux du mystère du monde ne réduit pas cette possession et cette maîtrise à la seule nature matérielle. Il pense bien évidemment aussi à la dimension spirituelle de l’homme qui fait partie, c’est vrai, de la nature. Ce que la sagesse africaine avait bien vu, elle qui est, (c’est à la fois sa force et sa faiblesse) essentiellement prudence dans la conduite de l’homme au jour le jour et modération dans les désirs, effort pour se conformer à l’ordre de la nature. De sorte que le projet cartésien et la sagesse africaine qui sont tous les deux inscrits dans le même mouvement de l’esprit humain, qui par vocation désire savoir, ne diffèrent en fait que par leur localisation, l’objet visé et les procédures d’approche de cet objet. On eut dit une question de choix fait en fonction des cultures et des idéologies qui les sous-tendent, et dont les profiles portent trace de l’histoire de chacune d’elles ; les uns optant pour la conquête sous toutes ses formes, les autres évitant les risques physiques et spirituels d’un tel choix et peu avides des biens de ce monde, se contentant de peu. De ce choix, résulteraient entre l’occident et l’Afrique cette différence de regard sur le réel, cette différence d’attitude et de comportement devant la vie.Mais revenons à Descartes. Descartes représente dans l’histoire de l’humanité le point de rupture du cheminement de la pensée occidentale, le moment où s’achève l’ancienne, la pensée sauvage, poétique, et où commence la modernité. Le temps du distinguo, de la séparation des savoirs et des spécialisations ; le temps de la clarté de l’esprit dans son cheminement. Dans l’ancienne l’Afrique se reconnait. Elle est sagesse au premier degré où élan spéculatif et esprit critique s’imbriquent pour déterminer un art de vivre sous la haute vigilance de la raison. En occident, l’effort pour séparer science, religion et littérature (poésie) commence aux présocratiques et se poursuit jusqu’à Descartes. Il revint à Descartes d’y mettre de l’ordre. S’il eut quelque injustice chez Boileau à saluer en l’œuvre dès la naissance essoufflée de Malherbe, le tournant décisif de la littérature française, en revanche l’avènement de Descartes en philosophie fut bien plus significative, une véritable révolution. Et si aujourd’hui nous sommes dans le domaine de la pensée peu sensibles à cette rupture de ton et au changement de regard lié aux prises de positions de Descartes, c’est parce qu’une telle démarche de l’esprit fait depuis partie de notre culture, une habitude. Prenons le Discours de la méthode et un instant arrêtons nous sur les phrases qui allaient bouleverser la vision du monde de l’occident et jeter les bases de la modernité : « au lieu de ce grand nombre de préceptes dont la logique est composée, je crus que j’aurais assez des quatre suivants, pourvu que je prisse une ferme et constante résolution de ne manquer pas une seule fois à les observer. Le premier était de ne recevoir jamais aucune chose pour vraie que je ne la connusse évidemment être telle, c’est-à-dire d’éviter soigneusement la précipitation et la prévention et de ne comprendre rien de plus en mes jugements que ceux qui se présenteraient si clairement et si distinctement à mon esprit que je n’eusse aucune occasion de les mettre en doute. Le second, de diviser chacune des difficultés que j’examinerais en autant de parcelles qu’il se pourrait et qu’il serait requis pour les bien résoudre. Le troisième, de conduire par ordre mes pensées, en commençant par les objets les plus simples et les plus aisés à connaître, pour monter peu à peu comme par degrés jusques à la connaissance des plus composés, et supposant même de l’ordre entre ceux qui ne se précèdent point les uns des autres. Et le dernier, de faire partout des dénombrements si entiers et des revues si générales que je fusse assuré de ne rien omettre ». C’est de cette terrible ascèse des facultés de l’esprit qu’allaient sortir la science moderne dont nous savons les pouvoirs étendus. Toute la modernité de la société occidentale en sa foi en l’Homme et en sa jeunesse joyeuse se trouve enfermée dans ces quatre préceptes de Descartes. Ajoutons-y le célèbre «je pense donc je suis» qui place le je, l’Homme conscient en posture de responsabilité devant l’univers, et nous tenons les fondements philosophiques qui ont rendu possible le formidable progrès de l’occident et son optimisme conquérant. Le vœu de Descartes qui rêvait d’une philosophie pratique grâce à laquelle l’homme se rendrait maître et possesseur de la nature était comblé. Et c’est là, plus haute sagesse puisque pensée spéculative et action s’accompagnent pour servir au mieux l’homme.C’est peut-être le moment de proposer une définition de la sagesse pour savoir à quel étage de la sagesse est logée la pensée africaine. Pour savoir aussi jusqu’où elle est parente de la sagesse occidentale qui a rang de philosophie, et savoir où elle s’en sépare. Lorsque nous parlons de sagesse nous devons tout de suite abandonner l’idée colportée par le langage quotidien pour qui la sagesse est une certaine prudence terre-à-terre. Il est clair que nous sommes loin de la sagesse dont la philosophie est en quête. Celle-là ne peut engendrer le progrès. Celle qui est ensemble de recettes jamais revisitées. Et c’est le drame de l’Afrique. Sa sagesse est si loin de la philosophie que peu lui chaut d’aller à la quête de la sagesse au sens où l’entendaient les Grecs, pour qui elle est la totalité du savoir à la quête duquel est partie la philosophie de Descartes. La philosophie c’est-à-dire la forme de culture qui s’assigne pour objectif de réfléchir de façon systématique sur l’ensemble des problèmes théoriques et pratiques qui se posent à une société à un moment donné de son histoire.Les cultures qui ont opté pour la sagesse à l’africaine, par sagesse ennemies des excès, ont peur de penser en dehors des recettes éculées, elles travaillent sans cesse au respect de l’ordre naturel des choses dont elles ont garde de s’éloigner. Prométhée paraît n’avoir jamais séjourné chez elles. Ici le savoir empirique et approximatif a établi son règne. Mais que vaut un patrimoine culturel dont l’esprit n’exige aucune justification et ne conteste tel ou tel détail ? C’est alors que, plutôt qu’humus nourricier, la coutume et la tradition deviennent des impedimenta, des charges et des obstacles à la croissance et au progrès. Pour n’avoir pas pu ou voulu séparer science, religion et littérature, pour avoir voulu rester une pensée syncrétique, la sagesse africaine n’a jamais pu s’élever au dessus d’une simple réglementation artisanale de l’action humaine, se contentant d’être au mieux un art de vivre inspiré de coutumes nées au hasard des circonstances et conservées par habitude. C’en est tout le contraire de l’esprit cartésien, qui accepte volontiers de se remettre en question et de réviser ses procédures de connaissances ; en même temps qu’il les propose à toute conscience libre et responsable. Générosité donc de l’esprit cartésien apparu en violent contraste avec la sagesse africaine qui limite son savoir à une petite élite tristement égoïste (les sorciers et autres initiés). Et je ne pense pas que ce soit par crainte que « distribuées sans discernement aux masses et exploitées aveuglément par elles, les plus belles découvertes se montrent plus nuisibles qu’utiles ». En fait c’est parce que savoir c’est pouvoir « et plus essentiel le savoir, plus grand et par conséquent plus redoutable le pouvoir ». Mais il faut le savoir, le salut sera collectif ou il ne sera pas

dimanche 5 août 2007

L'ethnie cancer des Etats africains

Espace restreint des solidarités primaires et de fusion presque communielle de ses membres, l'ethnie qui se définit par l'existence d'un territoire, d'une langue et d'un patrimoine spirituel sacralisé par l'âge a, pour ses ressortissants, la douceur du nid maternel. Et cela explique le narcissisme dévotieux de ceux-ci, vis-à-vis d'eux même, vis-à-vis de tout ce qui appartient au groupe. Et cela justifie que l'ethnie se cadenasse, hostile à tout apport étranger, personne ou objet, qui, toujours, représente une menace dirigée contre l'intégrité du groupe. Fonctionnant sur la base d'affects, l'ethnie est par nature foncièrement xénophobe. L'étranger n'y est admis, intégré qu'à la condition de renoncer à son identité.La France elle même rejoint la position de l'ethnie qui exige des immigrés installés sur son sol de renoncer à leurs particularismes. L'ethnie a horreur de la différence. Or, suite dramatique de la colonisation, aucun Etat africain qui ne soit le regroupement forcé et arbitraire d'une multitude d'ethnies opposées, pour beaucoup d'entre elles, par des différences et des particularismes parfois fortement soulignés. Source de tensions permanentes que, probablement, une révision courageuse et intelligente des frontières léguées par la colonisation aurait pu dissiper. L'entêtement paresseux des politiques et leur manque d'imagination ont fini par sécréter une espèce de destin qui s'est refermé sur ces Etats mal pensés, et à cause de cela condamnés pour longtemps à végéter; jusqu'à ce que soit trouvée une solution de bon sens pour juguler la misère et la violence identitaire, caractéristiques des Etats africains. La solution de bon sens et de courage par où sont passés tous ces pays d'occident qui nous fascinent (même si on ne veut pas l'avouer) consiste, au prix de cruels renoncements à soi, en l'obeïssance par tous aux principes d'organisation d'un Etat moderne, qui cesse par cela même d'être la propriété d'une ethnie. Parce que l'Etat est un autre espace où les liens de solidarité primaires de l'ethnie se sont élargis pour devenir des liens de solidarité primordiale. Ceux qui rattachent entre eux les citoyens, et souhaités aussi forts que les liens de solidarité primaires qui lient entre eux les membres d'une même ethnie. Une double allégeance donc, complémentaire plutôt qu'antagoniste.
Une telle conversion de l'ethnie au décloisonnement et à sa redéfinition, n'est possible que par le recul, forcément progressif, de la mentalité ethniciste au sein de l'Etat, par un effort constant des hommes de pouvoir pour se civiliser et devenir des citoyens qui incarnent des valeurs républicaines. Il est probable que le petit peuple suivrait un effort qui viendrait d'en haut. Mais cela passe passe l'éducation. L'intériorisation des valeurs républicaines n'est pas possible en dehors des institutions d'éducation. Les Etats africains ne peuvent, sous peine de mort, faire l'économie de l'éducation à la cité. Chacun, à commencer par les hautes sphères de l'Etat, qui sont le lieu du double discours, où s'entretient la mentalité ethniciste, chacun doit faire l'effort de se renoncer, d'avancer vers l'autre différent qui doit cesser d'être pour lui une menace, et ensemble avec lui, se lancer dans l'aventure de la construction de cette plus grande ethnie qu'on appelle la nation aux liens entre ses membres plus lisibles et chargés de plus hautes promesses. Mais qu'on ne s'y trompe pas, ça sera dur et difficile, étant donné l'idéologie xénophobe de l'ethnie, étant donné la médiocrité des hommes de pouvoir africains qui vivent en total décalage avec leur temps.

dimanche 15 juillet 2007

Les fondements historiques de l'étrange destin de l'Afrique noire

Lorsque, intellectuels ou politiques il nous arrive de réfléchir aux causes profondes des difficultés de l'Afrique noire à s'adapter aux mouvements de l'histoire, ses sociétés persistant,malgré tant de déclaration de bonnes intentions de ses dirigeants, à se comporter avec des mentalités d'un autre âge (tout en manifestant dans le même temps, de réelles aptitudes à comprendre et à faire usage des technologies modernes), il est rare que nous n'appelions pas tout de suite, d'un mouvement réflexe, la traite atlantique et la colonisation au banc des accusés. Une démarche au fond licite que chacun de nous comprend. Mais alors les responsables de nos malheurs une fois identifiés, nous devrions poursuivre la réflexion et nous demander pourquoi, lorsqu'il s'agit des savoirs et des technologies modernes, mis en condition, le Noir africain est de plein pied avec son siècle, et montre qu'il peut rivaliser avec l'occident dans certains domaines où celui-ci excelle, tout en se montrant inapte à gérer une société moderne. L'Etat par exemple dont la définition et les principes de fonctionnement sont copiés sur le modèle occidental, l'Etat reste pour lui une pure abstraction. Il a du mal a en intérioriser et à en vivre les règles et l'esprit. Ceux-ci lui restent étrangers. Sous l'inspiration de sa tradition et de sa culture, d'instinct le détenteur du pouvoir en fait une affaire personnelle, appropriée et protégée comme un patrimoine familial.

Comment alors comprendre un tel paradoxe? Tout le monde se souvient de la savoureuse boutade de cet homme: "l'africain a la tête dans le nucléaire et les pieds dans l'argile". Elle nous renvoie à la contradiction, dans ses comportements, de l'africain placé entre ces deux ordres de réalités opposées: le savoir et les technologies qu'il incarne d'une part, d'autre part le système de représentation et de pratiques, les catégories de pensée auxquelles celles-ci sont liées. C'est l'opposition du matériel (les savoirs et les techniques) et de l'idéel (les représentations du monde et leurs logiques). Si l'humanité progresse, on observe que ce n'est pas au même rythme, selon qu'on se trouve dans l'ordre du matériel ou dans celui du spirituel. Le progrès matériel est plus rapide que le progrès spirituel (l'esprit et la conscience). Et c'est le grand problème de l'Afrique, si attardée dans ses mentalités écrasées sous le poids trop lourd d'une histoire trop difficile dans laquelle l'avait enfermée un bien tragique destin.



Il appartient alors à l'historien de remonter aux causes de tant de déboires. La traite des Noirs? Oui. La colonisation? Oui encore. Et quoi d'autre, car la traite atlantique et la colonisation, horribles et tragiques certes, ne sont pour l'historien que les causes immédiates de faits qui probablement ne seraient même pas apparus, en tout cas avec une telle ampleur sans la cause lointaine dont la traite atlantique et la colonisation sont les conséquences directes. Il faudrait rappeler les conséquences néfastes sur l'histoire et le destin de l'Afrique, du facteur géographique et écologique. La configuration géographique et écologique du continent africain, voila semble-t-il, la cause lointaine principale du drame africain. L'Afrique est entourée par la mer, de sorte que, jusqu'au XVè siècle où l'Occident modernise son système de navigation, la barre rendit ses côtes inaccessibles. De sorte que, sauf en sa bordure méditérranéenne, l'Afrique restât totalement coupée du reste du monde, se privant de ce fait des contacts féconds avec les civilisations brillantes de l'Inde bhouddique, de la Mésopotamie et de l'Egypte pharaonique, plus tard ptolémaïque, romaine, arabe enfin. Le désert pour ces civilisations succésives resta un obstacle infranchissable. De toute façon l'eussent-elles franchi qu'elles ne seraient quand même pas allées plus loin. La forêt équatoriale avec ses mouches tsé-tsé les arrêtait net. Au Vè siècle avant notre ère, on se souvient, un phénicien, Hannon, se prit d'audace et, excellent matelot (il le tenait de sa race) s'embarqua avec une poignée de compagnons; et ayant doublé le détroit de Gibraltar, mit le cap sur le Sud. Il semble n'avoir jamais dépassé les eaux maritimes de la Guinée. La barre toujours.

Même au temps où il y'en eu de Noirs, (Narmer par exemple) les Pharaons échouèrent dans la recherche de solutions pour dépasser la Nubie voisine (le fameux pays de koush), et atteindre l'Afrique profonde. Celle-ci resta pour eux un mystère dont ils ne connurent que les Pygmées qu'ils firent venir à la cour pour la curiosité. Il faut relire à ce propos Hérodote qui s'était aventuré en Egypte au milieu du Vè siècle avant notre ère.

L'Afrique resta donc isolée jusqu'au milieu du XIXè siècle où elle s'ouvre enfin à l'audace de deux explorateurs anglais, Speck et Burton. Les Pharaons désiraient pourtant tant savoir! Ils durent se contenter de récits forcément déformés que leurs faisaient les nubiens sur l'Afrique profonde. C'est de cette façon, par nubiens interposés, qu'ils furent informés de l'existence de cette race de nains qu'Hérodote appellera Pygmées. En sens inverse les choses de l'Egypte pharaonique parviennent dans l'Afrique des sources et de l'au delà du Nil certes, mais parasitées par la trop grande distance et les trop nombreux relais (de bouche à oreille), à l'arrivée elles n'ont plus aucune consistance. Les héllènes à qui la proximité géographique avec l'Egypte profite viendront s'y abreuver directement, à la source. Pythagore, Platon et tant d'autres.

Si inventive fut-elle, mais privée du heurt correcteur avec l'expérience des mésopotamiens, alors en avance sur l'Egypte en bien des domaines et de plus loin, l'Inde, l'Afrique tourna en rond avec des recettes technologiques toujours les mêmes. On sait que le retour du même au même appauvrit forcément. Sur le plan politique, l'Afrique ce sera toujours le pays de la royauté divine (le pays des rois dieux, intouchables). L'éducation à la république et à la démocratie qui est comme le dit si joliment Paul Ricoeur, une aventure éthique, sans tradition, l'éducation à la démocratie sera longue et pénible en Afrique. Ouverte aux grecs et aux romains, ceux-ci l'y eussent initiée et probablement lui eussent évité la tragédie de la traite atlantique et arabe. Parce qu'en démocratie, fut-il son oncle maternel ou son père, aucun citoyen n'en vend un autre. Et sur le plan de la civilisation matérielle visible par laquelle on juge du degré de maturité d'une civilisation, parce qu'on y avait pas été initié, il n'y'aura pas en Afrique noire de ville avant la colonisation. Des villes de pierre. Car la polis où s'assemblent des libres citoyens n'est pas un tassement désordonné de huttes de paille et de torchis.
Mais comment autrement sans connaissances techniques en architecture où constamment est fait appel à la mathématique et à la physique. L'expérience de la muraille de Zimbabwe est difficile à expliquer en dehors de l'influence arabe. Elle resta d'ailleurs sans suite. Aux confins de l'ère culturelle arabo bèrbère, l'expérience de Tombouctou resta elle aussi sans suite faute d'une vulgarisation suffisante. Le petit peuple ayant été tenu à l'écart. Faute de villes qui organisent et encouragent les savoirs vulgarisés, l'Afrique n'aura pas de mathématiciens ni de philosophes capables, grâce à l'apprentissage des techniques et des règles du raisonnement logique, d'articuler un système de concepts en quoi on reconnait la philosophie qui est réflexion rigoureuse sur les problèmes de la société de son temps. On en resta donc à la sagesse terre à terre des proverbes sur le contenu desquels aucun discours critique ne revient jamais, le proverbe énonçant une vérité éternelle, indiscutable. Or, la critique et le débat contradictoire, voila, les racines du progrès dans l'ordre du matériel, comme dans l'ordre de l'idéel. Hors de là commence le royaume de l'obscurantisme et de l'idéologie justificatrice et mystificatrice. Le domaine où règnent les sorciers avares de leurs connaissances.

L'Afrique sera sauvée le jour où, dans le domaine du savoir et de la connaissance comme dans celui de la gestion des hommes, elle acceptera que s'instaurent l'expression libre des opinions et le débat contradictoire déja esquissés dans feue la palabre africaine enterrée sous nos démocraties bancales. Cloisonnée, il avait manqué à l'Afrique l'audace de Rome et d'Athènes.

dimanche 1 juillet 2007

Le sens et la signification du concept de renaissance pour un négro-africain

Renaissance doit s’entendre comme plongée dans le passé retrouvé pour nous sauver des périls du présent et pour nous mettre à l’abri de la menace du futur. Et on sait dans quel bien terrible bourbier se trouve l’Afrique contemporaine, et quelle menace de destruction plane sur elle. Ce ne sont donc ni les analyses, ni les projections des économistes qui la sauveront dans l’immédiat, si un retour lucide à son passé n’est effectué. Et non pas pour le plaisir léger d’un dépaysement ! La solution aux problèmes africains : politiques, économiques, culturels, viendra du recours à un certain nombre de valeurs de civilisation africaine authentiquement humaines retrouvées et vécues de façon courageuse. Nécessaires certes, la politique et l’économie ne suffisent cependant pas pour soulever cette vielle terre d’Afrique qui, derrière le néon et les palaces de ses villes, continue à vivre au néolithique. Les Romains disaient : quid leges sine moribus ? transposons : quid politica et oeconomica sine hominibus, que valent la politique et l’économie sans les hommes (pas n’importe lesquels). Seulement ceux-là qui sont capables de renaître aux valeurs africaines de culture. Pas n’importe lesquelles. Les valeurs authentiquement humaines façonnées au coin de l’universel.

Le regard fixé sur le futur, un pied dans le présent, l’autre dans le passé qui traverse le présent, telle est la posture du « renaissant ». Ce passé auquel il retourne n’est pas pour lui un refuge contre la morosité du présent. Stock précieux de l’expérience des générations, il lui sert seulement des points d’appui pour la conquête du futur que, présent éternel, le passé toujours entrevoit. En tout cas, c’est cela que l’occident en crise d’identité avait saisi dans les humanités gréco-romaines. Dans les moments de grand équilibre de la Grèce et de Rome, celles-ci peuvent bien apparaître comme une quête pathétique du sens de l’homme. L’effort émouvant d’une communauté culturelle pour connaître et déchiffrer le destin de l’homme posé comme valeur absolue, idéal supérieur à réaliser.

La découverte de Rome et de la Grèce antiques par l’occident enlisé dans la civilisation d’un Moyen-Age qui commençait à manquer de perspectives éclaira soudain ce qu’aux Lumières, et déjà sous Rabelais, on allait appeler les « ténèbres gothiques » que Rabelais dans sa langue particulière nomme «l’infélicité des Goths ». Pour l’Afrique noire dont le lien généalogique et historique avec les splendeurs de l’Egypte pharaonique est loin d’avoir la linéarité irréfutable qui rattache l’occident chrétien à la Rome de Caton l’Ancien, et à l’Athènes de Socrate et de Platon, de Thémistocle, de Périclès et de Thucydide, par delà l’Illiade et l’Odyssée d’Homère, renaissance voudra dire retour et recours, non à un passé de gloire souvent imaginaire (en dehors de l’Egypte, mais trop controversée comme production nègre pour être pour les Noirs un pôle d’identification qui incite à l’action). Mais retour et recours à ces valeurs de culture dont on devine l’authenticité et la grandeur humaine à travers les fragments que, parfois, par bonheur, il en reste après leur broyage par la traite négrière et la colonisation. Ce sont ces valeurs là qu’il va falloir que l’Afrique inventorie, et reconstitue (car il n’en reste que des fragments) pour, ensuite, une fois qu’elles auraient été coulées dans les manuels scolaires, les inculquer aux écoliers et aux étudiants des facultés. Travail de longue haleine, d’investigation patiente, prudente, historique autant qu’anthropologique, psychologique autant que sociologique. Jusqu’à ce que l’Afrique mutilée soit à nouveau rassemblée et s’approprie sa culture, et que la sève de celle-ci la libère de tant d’impedimenta (obstacles, pesanteurs) venus d’une histoire torturée et de traditions brouillées.

lundi 25 juin 2007

Un peu de poésie

Au Christ orphelin


Comme approchaient le frisson de pâques
Et le bruissement des palmes des grands passages
J’ai voulu te sculpter dans du bois dur, Jésus,
Avec ta tête de douleur et ta tunique de haine
Te sculpter pour me remémorer et prendre
A pleines mains ta folie, moi le mauvais enfant
Pour revivre le mystère de ta venue au carnaval
De l’homme, le roi démissionnaire

Comme approchaient le frisson de Pâques
Et le bruissement des palmes des grands passages
J’ai voulu te sculpter dans du bois dur, Jésus
Ainsi toucher de mes pauvres mains indignes
Ta tête de douleur au jour du Golgotha
Ce jour couleur de rien où tu fus tellement seul
Sans ami, abondonné de ton père même.
Marie ta pauvre mère en sanglots en pleure
De douleur et de peine.
Et Jean, ton frangin n’y comprend rien.
En ce jour couleur de rien
Personne pour te dire le mot qui console.
O Christ, tu sais ma tristesse
Christ inconsolé ; Christ orphélin comme moi-même je le suis
Mais que peuvent sur ta tristesse infinie
Ces chansons d’un sou que j’ai composées
Pour les enfants des Kouryles qui ont faim
Et mes pauvres petits gars de Mandou-au-trois-portes ?
Dis, que peuvent mes pauvres chansons
Sur la plus grande douleur qui fut jamais ?





La fête des faux monnayeurs


On m’a dit : cœur inquiet et dépeuplé
Courage, voici que se lève l’aube
Voici le grand commencement du grand siècle
Pour les hommes Nègres qui jamais ne furent à la fête.
Avancez hommes sans existence qu’on vous couronne !
Demain vous prendrez part à la fête
Princes oubliés, réparation sera faite ;
Nous sommes au midi du jour et de l’âge
Avancez pour le grand partage ;
Ni Blancs ni Noirs, assez des couleurs et des distinctions
Hommes sommes nous, et frères.
Abolies aussi bien soient les factions
Avancez c’est la fête
Et excusez nous pour le retard.
Chut ! me dit un vieux Nègre hanté du vent
Surtout ; n’osez
C’est la fête des faux monnayeurs




Prière pour être enterré à Mandou


Lorsque la nuit sera descendue
Sur ma paupière close à jamais
Et que ma carcasse humiliée
Demandera à retourner à ses origines,
Permets ô Dieu
Que je prenne mon repos parmi les ruines
De Mandou déserté par ses fils oublieux.
L’ouragan des passions ou l’effroi de la mort
Les dispersa par toute la terre
Où le soir, lorsque le cœur s’alourdit,
Ils se souviennent en pleurant.

Là couché sous un humble tumulus,
Comme tant d’autres fauchés,
Jeunes et vieux avant la funeste diaspora
J’attendrai l’heure du jugement.
Sur ce tertre sans gloire il n’y aura rien
Que de pauvres fleurs des champs
Et l’humble croix latine.
Et le passant avisant ce modeste mausolée
Lira avec un pleur au coin de son œil rougi :
Ici repose Dominique NGOIE-NGALLA
Un rien mandouan qui ne fit rien pour sa patrie
Si ce n’est qu’il l’aima avec piété,
La paix sur lui et qu’il dorme tranquille.

mardi 12 juin 2007

prendre l'évangile au sérieux

Enseignant à l'Université d'Amiens, Dominique Ngoïe Ngalla reçoit la Voix Protestante. Propos recueillis par Eliane Humbert.

Comment voyez-vous le Congo ?Pourquoi les peuples d'Afrique se battent-ils sans arrêt, pourquoi tant de guerres et de désordres ?

Il semble que les Africains ne parviennent pas à construire quelque chose de viable. Je pense qu'ils sont encore sous le choc des siècles d'esclavage et de colonisation. Cela fait partie de leur inconscient collectif et ils en souffrent sans le savoir. L'argent ne peut pas suffire, le désordre est dans les têtes ! Ici, en France, en toutes circonstances - perte d'un être cher, accident, traumatisme quelconque - on fait appel à des psychologues. Pensez aux Africains, massacrés et broyés pendant 500 ans… Et il n'en resterait rien ?


Il y a aussi des rivalités entre ethnies ?

Le problème n'est pas là : nous n'avons pas su gérer la démocratie, et tout le monde est responsable, entre autres, les intellectuels qui ont fait de bonnes études en France. Longtemps les programmes d'enseignement congolais et français ont été exactement les mêmes. Nous sommes donc des noirs de culture française, si bien que quand nous nous sentons rejetés, la frustration est terrible. Posséder deux cultures est une chance énorme. Mais la culture africaine, très riche et remarquable et bien antérieure à la colonisation, est ignorée, niée. Les intellectuels africains ont tendance à l'oublier et à penser sur le mode occidental. Il y a comme un conflit intérieur entre ce qu'ils sont et ce qu'on leur a dit de devenir. C'est souvent la source d'une perturbation psychologique, qu'on veut ignorer.
La France peut-elle aider l'Afrique ?Sous la colonisation le niveau de l'enseignement était excellent, or il ne reste plus rien : à l'université de Brazzaville, 25 000 étudiants sont sans livres, la bibliothèque a brûlé pendant la guerre... Et ici je vois qu'à la fin de chaque année on jette des livres !La France a des opportunités extraordinaires : faire vivre les institutions, organiser des partenariats entre lycées, entre universités, faire de l'animation culturelle, ouvrir des centres culturels dans les quartiers et les bidonvilles - la lecture est une passion : des enfants lisent le soir sous les lampadaires publics parce qu'ils n'ont pas de lumière chez eux - faciliter la venue d'étudiants après le bac, car la France n'est pas à une contradiction près : souhaiter l'expansion de sa langue dans le monde et refuser qu'on entre chez elle !Des étudiants de toute l'Afrique sont nombreux et bienvenus aux Etats Unis et au Canada où des universités ont créé des chaires de culture et de langues africaines : le bambara, le ningala, le swahili... En Afrique, la génération qui vient parlera anglais. Pourtant la francophonie devrait permettre des initiatives mais rien ne se fait et les africains sont déçus.
L'Eglise a-t-elle un rôle à jouer dans la reconstitution du pays ?Oui, sans aucun doute, mais les prêtres font trop dans l'imitation du modèle français et ce n'est pas cela qui aidera l'Afrique. Il faudrait qu'ils se convertissent en anthropologues, sociologues, psychologues pour voir l'Afrique de l'intérieur. Ils restaurent la façade, mais les problèmes sont plus profonds et plus graves. La démarche protestante de collaboration avec des organismes sur place est bonne.Je voudrais que les chrétiens d'occident regardent les choses en face. Jusqu'à quand attendrons-nous pour prendre l'Evangile au sérieux ?

C'est à dire ?

Au 3e siècle, Tertullien assure les autorités que les chrétiens sont partout des exemples et qu'il n'y a pas meilleur soldat, meilleur fonctionnaire, meilleur enseignant... Parce qu'ils s'efforcent de prendre l'Evangile au sérieux.Et nous, qu'est-ce qui nous arrive ? Est-ce parce que la société de consommation nous a endormis que nous ne sommes plus éveillés aux problèmes du monde ? Tant de gens sont descendus dans la rue contre la guerre en Irak : que ne le fait-on plus souvent et pour d'autres causes ! Quand Jésus dit à Pierre : " va au large " il ne parle pas seulement de la petite mer de Tibériade, mais du monde. Aussi longtemps que j'aurai un grain de foi, c'est ce que je penserai.


Que souhaitez-vous pour votre pays ?

La violence qui s'est exprimée au Congo résulte d'une accumulation d'injustices mal réparées. Malheureusement, aucune ethnie n'a le privilège de la violence et de la cruauté et ceux qui ont eu recours à ce mode d'expression sont à plaindre. Peut-être faut-il les aider à comprendre qu'on peut faire autrement. On ne peut pas leur en vouloir, je n'ai aucune haine, je suis malheureux pour eux.Je souhaite que personne ne condamne l'Afrique. L'histoire n'est pas close. Le Saint Esprit n'est pas mort. Il nous reste à coopérer avec lui.
ExerguePosséder deux cultures est une chance énorme.


Dominique Ngoie Ngalla est aujourd'hui rentré au Congo mais il réside en France

dimanche 10 juin 2007

Odirint dum metuant. Qu'ils me haïssent, pourvu qu'ils me craignent.

Les Noirs devraient faire du propos du dictateur romain leur devise. A méditer tous les jours. l'histoire des vivants, quelle qu'en soit l'espèce ,est, Darwin avait fait là une belle découverte, une lutte permanente, où les faibles sont éliminés. L'harmonie sociale résulte toujours d'un équilibre de forces antagonistes. Une union tensionnelle des forces qui grandissent et s'affermissent en s'opposant. On trouvera difficilement dans le monde un groupe humain où, sans réticences instinctives de départ le Noir est accepté comme il est. Sa couleur de peau de si sinistre symbolique dans tous les autres groupes humains, ajoutée à d'autres différences physiques, le désigne illico à la mise à l'écart et à la margnalisation. De la couleur de sa peau et du profil de son visage, découlent, d'après les penseurs occidentaux, de terribles faiblesses intellectuelles et morales. Il apparait dans l'imaginaire de ceux-ci comme un raté de la création. Naître Noir devient alors, comme le dit cet humoriste, un handicape . Mais à la différence des autres handicapes celui du Noir n'inspire ni pitié ni compassion, il suscite bien au contraire un inexplicable sentiment d'agression. Hegel qui pourrait bien résumer le génie intellectuel de l'occident pensant trouve le Noir inapte à devenir un sujet de l'Histoire et le condame à végéter dans l'infra-humanité, recouvert de nuit noire. L'avis du philosophe de la phénoménologie de l'esprit a suscité et alimenté un mouvement de pensée dont les conclusions sont connues: avec le Jaune, mais à une échelle plus bas que le Jaune, le Noir est un être inférieur. De son infériorité ontologique découle son infériorité sociale. La République de Jules-Ferry ,on s'en souvient, fit de cette aberrante affirmation son crédo. Le colonialisme y trouva la justification de ses procédés barbares. La même science occidentale qui avait fabriqué au Noir ce statut l'a depuis réhabilité. Mais, le discours est une chose fût-il scientifique, sa pratique sociale en est une autre. L'erreur ou le mensonge scientifiques avaient eu le temp de structurer une mentalité. De sorte que, malgré que tous les jours en grand nombre les Noirs admnistrent par leur réussite la preuve de l'erreur d'un tel jugement (pas seulement dans le sport, mais dans tous les domaines d'activité), le Noir reste peu crédible auprès des descendants de Darwin e du comte de Gobineau, l'auteur de l'Essai sur l'égalité des races. Mentez mentez ,disait Voltaire, il en restera toujours quelque chose.

Le grand malheur est que la victime a intériosé l'image peu flatteuse que le Blanc lui avait fabriquée et inculquée. Noir signifie inaptitude aux choses de l'esprit, et vices moraux graves:luxure, vanité, mensonge, paresse Aussi simple. expéditif! Ceux qui énoncent de si terribles contre-vérités sont-ils raisonnables? Et en ce qui concerne le vice, oublie-t'on que c'est la chose la mieux partagée du monde? La bassesse, la mesquinerie ne sont pas des attributs du seul nègre. Pour le Noir, la solution à sa discrimination en occident et dans le reste du monde, il la trouvera dans sa tête et dans ses mains. D'abord se convaincre, à partir de l'expérience ( il y'a deux ans, agé seulement de 14 ans, à l'age où la moyenne des français entrent en troisième, un petit Noir originaire de Côte-d'ivoire n'obtint-il pas le bac ici même en France; en tout cas les exemples sont nombreux) que pour être porteur d'une couleur décidée de malheur par les occidentaux, il est pleinement homme; qu'il n'existe pas de demi-homme comme il existe des demi-dieux das la mythologie grecque; que chaque homme, rappelons Montaigne, " porte en lui la part entière de l'humaine condition"; que l'éclosion de celle-ci est seulement un problème de milieu, et que placé dans les mêmes conditions de naissance et d'existence que le Blanc, le Noir peut tout ce que le Blanc peut ( Cheick Modibo Diarra de la Nasa, créateur d'un engin envoyé sur Mars, l'a prouvé). Ces Noirs brillants qu'on rencontre ici et là en occident ne doivent pas apparaître comme des exceptions. Rencontrant quelque Noir intellectuellement doué, beau ou ayant de l'éducation, certains occidentaux disent, surpris:"tu n'es pas comme les autres!". Loin d'être un compliment à son destinataire, celui-ci doit l'entendre comme une injure à la race. Le Noir doit le savoir. le tout est une question de milieu et d'audace. Oser se servir de son intelligence, et d'abord se persuader que les Blancs ne sont pas des dieux, qui feraient des choses dont les Noirs seraient incapables. Une elle prise de conscience mettrait fin à bien des complexes paralysants. Inverseraient, ou du moins équilibreraient les rapports du Noir et du Blanc. Une chose: si le Noir veut que le Blanc le respecte et le prenne au sérieux, qu'il s'affirme. Ce sera le commencement de la fin de la discrimination qui ne repose pas tant sur la couleur de la peau avec tout ce qu'elle suppose de négatif, et d'autres différences physiques, que sur le doute que tel qu'il apparait marqué du sceau négatif du destin, le Noir soit capable de quoi que soit qui vaille. C'est, chez bien des occidentaux une croyance forte bien enracinée. LeBlanc oublie la laideur supposée chez un Noir qui réussit. Le Blanc, l'homme tout court, ne respecte que celui qui le défie et ruine ses certitudes. Les chinois et les indiens, il n'y'a pas si longtemps encore traités à peine avec moins de mépris que les nègres, grâce à leur grande capacité à entrer en modernité, sont devenus pour les occidentaux des partenaires redoutables. Pour les Noirs la reconnaissance sociale est ussi à ce prix. A contrepente faire à leur tour le chemin emprunté par les asiatiques. Le look black: les tignasses tressées des hommes portant anneaux aux oreilles comme des pirates et tous ces comportements de dérision n'imposeront pas l'Afrique à l'attention d'un monde en concurrence où il n'y'a pas de place pour les plaisantains. Pour s'imposer dans le monde et se faire respecter, les juifs qui sont au moins aussi mal-aimés que les Noirs, ont dû se résoudre à travailler de façon à toujours se placer parmi les meilleurs. Et non pas par la dérision mais par la science et les oeuvres de l'esprit.

mercredi 30 mai 2007

VAnitas Vanitatum et omnia vanitas,vanité des vanités tout est vanité

Louis XIV mourant regrettait son amour excessif de la guerre. Lui qui avait vécu dans le faste et la pompe, avait le cœur gros de laisser la France meurtrie par des guerres interminables. Pour le repos de son âme, il faut souhaiter qu’à l’article de la mort, Mobutu qui avait tant mal aimé ce brave peuple du Congo au point de falsifier son nom, ait eu le coeur gros de le laisser ruiné, presque détruit. Rien pourtant ne manquait au Zaïre de Mobutu pour être heureux à faire pâlir d’envie ses voisins francophones plutôt mal lotis : des terres immenses au sol et au sous-sol à ce point gâtés par la nature qu’on croirait leurs richesses inépuisables. Pour un pays tropical où en général l’homme est rare et peu entreprenant, des hommes nombreux, dynamiques, pressés, on le croirait, de rattraper le temps que les colons belges et flamands leur avaient perdu pendant près d’un siècle. Il n’est pas, (sauf le kamdjatka et l’excessive Sibérie) une seule région du monde habité où tu ne rencontres un concitoyen de Mobutu, des Amériques aux îles du Pacifique, jusqu’au dos de la terre (na sima ya mokili) !
Et pour qu’y faire ? Pour s’amuser en bon nègre étourdi, même si personne ne veut de cet immigrant impénitent ? Non pas. Cet homme qui n’est pas triste et qui ne dédaigne ni les jeux ni la danse, s’il court le monde, c’est pour apprendre. Les voyages forment l’homme. Le zaïrois de Mobutu a soif d’apprendre parce qu’il veut gagner. Et il sait que pour gagner, il faut avoir appris. Aussi, vous ne trouverez pas derrière ses facéties, nègre plus studieux, plus sérieux, plus appliqué à ce qu’il fait.
Je veux bien croire avec ses amis les occidentaux qui ont tiré de sa folie des grandeurs le meilleur parti, je veux bien croire que le Sesseseko perdu d’orgueil et de vanité a été un génie politique, mais je veux surtout croire que pour qu’il n’ait pas fait du Zaïre un grand pays moderne, il faut qu’il ait été un bien mauvais génie. Cet homme féroce, s’il s’était souvenu, lorsque, ivre de vaine gloire, il se donnait un règne sans partage et sans limite dans le temps, que, venu de la poussière, tout homme retourne à la poussière, se fut-il conduit avec une telle arrogance effrontée ?

Extrait de Combats pour une renaissance de l’Afrique nègre, Parole de vivant, Espaces culturels, Paris 2002

dimanche 27 mai 2007

La construction de murs de protection contre l'étranger, une tradition bien occidentale

Construit au lendemain de la 2è Guerre Mondiale par l'Union Soviétique pour protége le bloc socialiste de la contagiondu capitalisme, le mur de Berlin fut baptisé "mur de la honte" par le bloc capitaliste qui y vit une triste reculade de la civilisation et e l'humanisme. Jour et nuit, en faction dans de sinistres miradors et armés jusqu'aux dents, des centaines et des centaines de vigiles montent la garde. Cerbères inflexibles, sourds à la prière, gare aux téméraires! Il n'en manqua point. Aussi, tout le temps qu'il resta debout, le sinistre ouvrage fut régulièrement arrosé du sang de milliers de milliers d'hommes et de femmes qui tentaient de le franchir pour échapper aux horreurs du camp marxiste. et lorsqu'en 1989, il fut abattu, le mur, quel homme, quelle femme,en deça comme au delà, n'exulta de joie? L'espoir revint que l'humnité à nouveau allait se remettre en marche. Et l'utopie qui nourrit le coeur des hommes. L'utopie dela fraternité entre tous les hommes de la terre. Par delà les appartenances ethniques, religieuses ou politiques. Entre les hommes il y'a mieux à faire que de se guigner de travers et d'échanger des coups comme des malpropres.

C'était sans compter avec la force des traditions. la tradition si elle n'est métamorphosée en vie créatrice se transforme en implacable destin. Dresser des murs protecteurs contre différents de soi et qu'on couvre de tous les péchés d'Israël pour ustifier leur rejet, et chose ncienne en occident. Aux IIIè-IVè sicle de notre ére comme chacun sait, Rome inqiète des incursions de ses voisins du nord fit construire sur toute la longueur du Danube un grand mur, le limes;avec sur toute sa longueur des garnisons pour tenir en respect tous ceux-là qui cherchaient à pénétrer dans l'empire pour profiter de ses merveilles. On sait ce qu'il advint du mur fameux: au bout d'un siècle de harcèlement par des populations chassées de leurs pays par des conditions d'existence intenables, il céda. Ce fut alors un ruée épouvantable qu'avec une meilleure politique des frontières, Rome eut évitée. Huns, Vandales, Goths, Wisths, Francs et Lombards, en quelques décennies furent maitres de l'Occident tout entier. Face à l'obstination désepérée des immigrés la force des armes et la violence furent impuissantes. rome aux abois ne sut plut à quels dieux se vouer. Rome céda et détruisit le limes. Et grand bien lui fit: les barbares injectèrent du sang neuf à l'occident usé par la débauche.

Dans les relations des peuples il en toujours été ainsi à travers l'histoire de l'humanité. Celle-ci ne peut progresser que par la fécondation réciproque des différences. Ce que l'occident appelle "miracle grec" n'est un miracle que pour les ignorants. Derrière il y'a toute la civilisation de la Mésopotamie et plus loin de l'Inde bouddhiste et brahmanique. Il est dangereux de résister avec arrogance à la différence. Les constructeurs du mur de Berlin semblent ne s'en être pas souvenus. Ce qui est compréhensible, puisque, chez les marxistes, le progrès de l'Histoire, et donc des sociétés humaines, dépend de l'oubli du passé. On se répète alors avec une gravité émouvante: "du passé faisons table rase!" Or, l'amnésie est préjudicible aux sociétés humaines. Comment, si le passé ne compte pas, définir mon identité et celle de la communauté à laquelle j'appartiens? C'est Bergson qui dit avec justesse que "la conscience est un pont jeté entre le présent et le passé". L'occident en aurait-il donc subitement manqué qui, pour se protéger contre l'immigration, vient de jeter entre son territoire et l'Afrique,dont elle a tiré tout le profit à travers l'Histoire (et ce n'est pas fini), un dispositif politico-militaire destiné à refoulé dans leurs déserts et leurs forêts les barbares d'Afrique; avec le coeur d'autant plus tranquille que la consolidation de l'Union Européenne éloigne pour longtemps entre les occidentaux le spectre d'une guerre por laquelle les africains seraient encore utiles. Pour l'heure, et à cause de cette fausse lecture de l'Histoire, les candidats à l'immigration devront attendre que l'occident où ils rêvent de s'accomplir choisisse parmi eux, ceux qui, par leur intelligence, comme autrefois les esclaves par la force leurs muscles, peuvent être utiles à l'Occident. Pour le reste, c'est-à-dire les moins doués, et pour cette raison condamnés à ne jamais sortir de leurs pays de misère, l'Occident à fait la promesse de s'attaquer à la pauvreté dans ces pays. Ce qui va stopper du même coup l'immigration massive, la source qui l'alimente ayant été tarie.

Je ne demande qu'à le croire. Seulement, suite au long sac des économies africaines le sous-développement des sociétés est tel qu'il faudra un improbable plan Marshall pour sortir du bourbier la majorité d'entre elles. L'intention est sans doute bonne. Mais on sait aussi que l'enfer on est pâvé. Le poids des mentalités occidentales concernant l'afrique est tel que l'occident n'est pas prêt pour entreprendre pour l'Afrique une telle opération de sauvetage. Et puis l'habitude du pillage tranquille de l'afrique étant bien prise, l'occident à l'appétit insatiable aura bien du mal à s'en défaire (l'habitude est une seconde nature). Ses industries sont gourmandes. Que faire pour se passer de l'uranium du Niger, du pétrole du Golf de Guinée, du cuivre, du diamant, du cacao, du bois,etc que l'occident obtient pour une bouchée de pain. La tentation est donc bien grande en vérité de continuer à les prendre à ces conditions là.

Par calcul abondonnée par l'occident à des dirigents indignes qui sont aussi les amis de l'occident, le développement de l'Afrique n'est pas pour demain. Autant dire que l'immigration clandestine a encore de beaux jours devant elle. Comme hier pour ces pauvres gens enfermés derrière le mur de Berlin, et comme autrefois pour les barbares d'au-delà du limes romain, le désespoir des africains aura raison du dispositif politico-militaire dressé contre eux. L'immigration est un phénomène naturel. De la nature dit le poète ou le philosophe, il ne faut pas s'éloigner d'un pas. Celui qui s'en élogne le paye bien cher souvent. Pour éviter que la traque de l'immigré ne pose plus de problèmes qu'elles n'en résout, par exemple créant entre les nations des tensions dangeureuses, ou inspirant aux candidats à l'immigration des idées diaboliques, il faut humaniser l'immigration.

mardi 15 mai 2007

Mahoung' ma Nsimba

La paix et le bonheur sur toi, grand Seigneur à qui Dieu me fait encore la grâce, ce jour de serrer la main! Que les temps sont changés. Devenus bien mesquins, et lançés à fond de train vers ce qu'ils appellent le bonheur, mais qui doit faire se retourner dans leurs tombes Aristote et saint Thomas-d'Aquin, les hommes d'aujourd'hui ressemblent de plus en plus à des fauves.

Insensiblement, il s'était tourné vers la croupe chauve d'un groupe de mamelons où, dans l'attitude du lutteur, se tordaient de vieux palmiers noueux. Une grande animation intérieure mit des éclairs dans ses yeux faibles. Dans leur gravité tourmentée, ces palmiers paraissaient les témoins farouches d'un événement mémorable par quoi s'était exprimée une grande époque de l'Histoire de son pays. C'est là, il s'en souvint, que pour avoir voulu rester des hommes, sont couchés quelques-uns des plus valeureux de nos pères. Mort violente dont la cruauté était cependant adoucie par celle de l'ennemi couché sur le même champ de bataile, et qui doit maintenant rendre compte devant la justice d'en haut, du déséquilibre de notre société. Si notre civilisation dissipée et les hommes émasculés qu'elle produit ont perdu le sens de le loi et des principes qui donnaient aux initiés la connaissance des phénomènes de la nature et le gouvernement du monde, c'est la faute de la civilisatioin occidentale qui travaille à tourner la nôtre en dérision. Mais c'est la grande faiblesse de cette civilisation d'occident de mépriser tout ce qu'elle ne peut ramenerà ses catégories de pensée, pour en proposer une définition de type mathématique. Comme si tout pouvait être enfermé dans ces simplifications, nécessaires sans doute, comme exigence de l'esprit humain, mais dangereuses dès qu'on oublie qu'elles ne représentent qu'un moment du déchiffrement de la nature. Cette civilisation d'occident a certainment tort d'ériger en preuve formelle de la fausseté des systèmes de connaissance différents du sien, son incapacié à y voir clair.
[...] Ancien séminariste tonsuré Mahoung' ma Nsimba était l'un des premiers lettrés de son pays. La vivacité de son intelligence avait séduit ses maîtres, et lui avait mérité d'aller en Europe pour parfaire sa formation. Mais le spectacle de l'exploitation sauvage de sa patrie et le tohu-bohu des guerres d'exterminaion allumées par les sages d'Europe qui s'ingéniaient pourtant à expliquer et à justifier tant de violences par des arguments de sophistes, révoltèrent l'hôte aimable et timide de la maison du père Libermann. Mahoung' ma Nsimba revint d'Europe l'esprit tout retourné, et ayant perdu la foi en cette civilisation prestigieuse d'occident que ses fils, jusque là, avaient présentée comme une haute pentecôte à laquelle tous les hommes de la terre étaient conviés. Maintenant retiré à M... son village natal, il employait les loisirs d'une retraite méritée à méditer sur la fragilité des oeuvreshumaines et le estin de l'Afrique condamnée, pour longtemps, il lui semblait, à faire les frais de la démesure et de l'intempérance des Blancs encouragés par la naïveté des Noirs compromis. Atroce est l'ordre de l'Histore, soupira-t-il. On ne s'y taille pas une place sans dure ascèse. sans purification intérieure, sans cesse reprise. Ecrasé par le foisonnement de sa trop riche nature et prise dans la guangue de ses mythes auxquels elle ajoute la sottise et la cupidité de bien de ses maîtres, l'afrique en oubliait la raideur de l'escalier de l'Histoire; plutôt, s'étant trouvée nez à nez avec l'Histoire, elle s'était découragée devant ses exigences et avait replongé bien vite dans le cadre intemporel des ses mythes douillets; tout en organisant un discours lyrique su l'ascension de l'Histoire! Seulement l'Afrique n'avait jamais cru en l'Hstoire qui peut servir tout juste à inspirer des contes et des légendes si chers aux civilisations émasculées ou pusillanimes!
extrait de "L'ombre de la nuit", Atimco, 1994

lundi 14 mai 2007

La nation, sédimentation continue de différences

Empilement, puis fusion, sous la longue durée de communautés aux traditions diverses et contrastées, une nation n'est pas une ethnie, qui s'est elle même construite sur le mode de la nation, au terme d'un processus complexe de fusion d'éléments d'origines culturelles diverses.La nation et l'ethnie sont donc du côté de l'histoire et de la culture, et non de la nature. Elles sont chacune à leur échelle, un processus, un cheminement, un travail de l'homme sur soi. Dans ces conditions, parler de français de souche, de belges de souche, d'italiens de souche, de portugais,d'espagnols de souche, etc, ne signifie pas grand chose; puisque, tout compte fait, sur cet espace territorial appelé nation, il n'est personne qui ne soit venu d'ailleurs. Pas même ses premiers habitants (les indigènes des latins). Puisque, avant leur installation, il n'y avait personne, un no man's land. Il vaut donc mieux, lorsqu'on parle d'identité nationale, viser son homogeinété culturelle plutôt que l'épaisseur temporelle de l'installation sur son territoire de sa population. Les populations qui ont fini par fomer le peuple français ne sont pas arrivées sur le territoire de la France en même temps. Aux celtes: allobroges, éduens, séquaniens, etc, s'étaient ajoutés, pour former la communauté culturelle homogène que nous connaissons,chacun à des moments différents, vandales, goths, wisigoths, huns, ostrogoths, francs, lombards, arabes, Vikings enfin, en attendant le grand déferlement du XIXè siècle. Et cependant tous fondus à terme les uns dans les autres, greffés les uns sur les autres, depuis ils sont tous français. Leurs souches françaises sont donc culturelles d'abord. La dimension géographique de celles-ci est secondaire. Du point de vue géographique, tous à un moment donné de leur existence furent des immigrés. Ce qui peut leur donner l'illusion à tous d'être des français de souche, c'est sans doute l'identité de la couleur de peau qui rend invérifiable le caractère sédimenté du peuplement de la France par tant de communautés aux tradtions à l'origine si diverses.

La pigmentation de la peau justement, voila le problème qui fache et qui retarde la rencontre de l'humanité à Babel. Babel, mythe certes, mais si belle utopie! Des Antilles françaises ou d'Afrique Noire, le Noir, en France- le spot publicitaire du CRAN (Cercle representatif des associations noires) le rappelle chaque jour à la télévision- est comme l'arabe, à cause de sa couleur de peau, l'objet de discriminations multiples: à l'embauche, au logement, dans les lieux de loisirs, etc. Or, des Antilles ou d'Afrique, le Noir fait partie de l'histoire de la France. Pour sa crédibilité et l'harmonie entre ses composantes culturelles, la France s'oblige ainsi à un devoir de mémoire. Le passé et l'histoire de la France traversent le présent de chaque français; ils sont des éléments constitutifs de l'identité de chaque français. De sorte que des Antilles ou des anciennes colonies, au même titre que ceux qui viennent d'Italie, de Croatie, de Roumanie et d'ailleurs en Europe, le Noir dont on a tendance à faire un sous-français, qui ne serait pas français à part entière, le Noir donc fait partie de l'héritage de la France. Il avait contribué à le forger. Il est donc injuste de l'empêcher d'avoir part à cet héritage.Pour ceux-là, immigrés, avec ou sans papiers, d'avoir été dans le passé aux côtés de la France au moment où celle-ci était aux abois, et aujourd'hui de travailler au maintien et à l'expansion de la langue française par la francophonie, sont des titres suffisants pour revendiquer, sans être traités d'effrontés, qu'eux-mêmes et les anciennes colonies d'Afrique d'où ils viennent soient traités avec moins de désinvolture par la France que le devoir de mémoire oblige à se comporter autrement vis-à-vis d'eux. La grandeur d'une nation comme la France se vérifie à sa constance dans l'amitié, à sa fidélité à tenir les engagements pris par le passé vis-à-vis de ceux qui l'avait obligée. Ainsi ça devient moralement gênant lorsque, quel que soit leur statut, les immigrés que tant de législations agressives jettent dans le stress et l'angoisse permanente, viennent des pays qui ont avec la France un lien historique qui, par sa nature et sa durée, est loin d'être ordinaire. Il parait que désormais dans la candidature pour l'immigration en France la connaissance de la langue française ou même seulement un commencement de connaisance de la langue française est un critère décisif. C'est bien, c'est très bien. Parce qu'il ne faut pas vivre en autiste dans le pays de son choix, et qui vous accueille. La question est alors: que fera-t-on des immigrés venus des pays francophones? On les voit chaque jour rudoyer comme tous les autres qui ne savent pas un mot de français. Encore que ceux-ci, pour cette raison, ne méritent pas d'être traités avec si peu d'humanité. "Chaque homme, rappelle Montaigne, porte en lui la part entière de l'humaine condition" (Montaigne, Essais, III).

mardi 8 mai 2007

La France et l'Afrique demain

Avec l’élection de Nicolas Sarkozy, tissées de magouilles et d’intrigues depuis les indépendances, les relations de la France et de ses anciennes colonies devraient s’assainir, à entendre la déclaration du Président élu. Ces pays devraient cesser d’être le pré-carré de la France pour devenir des partenaires économiques à part entière. Non certes parce que, plus que le général de Gaulle, plus que Georges Pompidou, Giscard d’Estaing, Mitterrand, et Jacques Chirac, Sarkozy nourrirait des sympathies particulières pour les Noirs, mais parce que, c’est là, pour lui, le meilleur moyen d’endiguer l’immigration, clandestine et non clandestine dans ce pays. A la base donc, non un élan de générosité, mais de froids calculs. Les statistiques le montrent, et les discriminations à l’emploi, le Noir n’est pas en France le bienvenu. Vade retro, Black ! Naturellement pour des problèmes de survie, le Black mal-aimé se cramponne. Il sait que dans cette France pour le salut de laquelle ses parents, ses grands-parents, ses arrières grands-parents avaient généreusement versé leur sang, il est guigné de travers. Certes la République le protège comme elle peut, mais n’a cesse en même temps de lui rappeler qu’il est un immigré. Par ailleurs sa présence massive, croit-on, fait que de nombreux français se trouvent au chômage.

Le petit peuple français est naturellement sensible à la simplicité d’une telle idéologie. C’est en tout cas la position du Front National sans le vote massif duquel Nicolas Sarkozy ne serait probablement pas élu Président de la République Française. Il a bénéficié, on l’a vu, de 66% des voix de ce parti haineux et xénophobe. Parce que tout simplement Le Pen battu, Sarkozy restait le seul à porter les espoirs des nationalistes et des chrétiens xénophobes. Sauf à lui voler ses matières premières : cacao, pétrole, uranium, cuivre, diamant, etc, sur le plan économique, l’Afrique Noire n’est d’aucun intérêt pour la France, qui, au contraire a tout à gagner à concentrer ses efforts à la construction de l’Europe à laquelle il manquerait cependant quelque chose si on ne l’arrimait aux pays de la Méditerranée du sud : le Maghreb et le Proche Orient dont il faut à tout prix faire des partenaires privilégiés, à défaut de les intégrer à l’Europe. Ces pays du sud de la Méditerranée représentent en effet un énorme potentiel économique, et leur poids dans la politique internationale est considérable. Il convient donc, si proches de la France et de l’Europe, de les avoir avec soi.

Mais l’Afrique ?(entendez les pays au sud du Sahara, l’Afrique Noire, puisque dans l’esprit des ressortissants de cette région, qui d’ailleurs comme leurs autres voisins les européens, n’ont pas une haute idée des Noirs, le Maghreb ne fait pas partie de l’Afrique, et qu’ils s’offusquent de s’entendre appeler africains. Mais on sait quelle tranche sombre de l’histoire de l’Afrique explique que les maghrébins prennent leurs distances avec leurs voisins Noirs) . Mais l’Afrique donc ? Sans illusion pour le moment, je pense qu’elle sera laissée pour compte par la France et l’Europe ; quitte à la piller, aussi longtemps que, sur l’échelle du monde, son poids économique sera dérisoire et que ses dirigeants depuis les indépendances hommes de main des politiciens occidentaux et bourreaux de leurs peuples ne prendront pas conscience du drame de l’Afrique, pour agir avec plus de dignité et de sérieux dans la gestion de leurs pays jusqu’aujourd’hui allégrement livrés aux multinationales.

Dans quelques jours, quelques semaines comme toujours depuis longtemps, les chefs d’Etat de l’Afrique noire monteront à l’Elysée pour faire allégeance à Nicolas Sarkozy. Plaise au ciel que l’ardent théoricien de l’immigration choisie se souvienne de ce qu’il a dit dans sa déclaration du 6 mai au soir, et tienne parole pour dire à ses hôtes, les yeux dans les yeux : « chers amis, avec moi la donne a changé. De même que j’ai déclaré la guerre à l’immigration clandestine, dès aujourd’hui, je la déclare aux dictateurs auxquels sans répit je donnerai la chasse, c’est le seul moyen pour gagner la guerre contre l’immigration clandestine. »

dimanche 6 mai 2007

A propos de l'immigration choisie

Pour les personnes dites de couleur, issues de l'immigration, volontaires ou forcées (l'esclavage), la bonne et généreuse intention de la droite française de recourir à l’immigration dite choisie pour stopper l'immigration clandestine, origine, selon elle, de tous les maux dont souffre la société française, a d'étranges et troublantes résonances avec la traite des Noirs, et rappelle le caractère tenace d'un vieux et triste réflexe marchand devenu hélas trait de mentalité chez beaucoup. 400 ans de civilisation et de progrès n'ont pas encore réussi à le gommer de la tête de beaucoup. La traite des Noirs appelés aussi bois d'ébène à cause de leur haute valeur marchande était une opération commerciale dans laquelle la valeur de l'article mis sur le marché était déterminée après examen un minutieux par les qualités vérifiables de l'article: pour les hommes, la force physique fondée sur la qualité de la dentition, la forme de la musculature, la taille, l'âge bien entendu. Pareil pour les femmes. Plus les seins qui devaient être bien en place, et naturellement pleins. La qualité de telles pièces d'ébène garantissait leur rendement économique; et tant pis pour l'avenir démographique, économique, culturel et social des régions d'Afrique d'où ces malheureux étaient arrachés.
Placée dans la perspective de la traite des Noirs qui a façonné les rapports entre l'Afrique et l'occident l'immigration choisie est un prolongement à peine dissimulé de la traite des Noirs. Elle reproduit les conditions de l'esclave nègre privé de la moindre sécurité affective et sentimentale, puisque l'immigré choisi n'a pas le droit de faire venir sa famille. Il est une machine à produire, pas un être humain qui a besoin pour s'épanouir, que soient réunies un certain nombre de conditions de la vie sociale, et satisfaits des besoins prioritaires qui ne sont sans doute pas, d'abord, un salaire, certes incomparablement plus élevé que celui qui lui est alloué dans son pays d'origine. Mais pour qu'un homme soit heureux l'argent suffit-il? Multiplier les mesures inhumaines contre l'immigration clandestine, mettre tant d'entraves à l'immigration régulière, n'est certainement pas le plus sûr moyen de régler le problème de l'immigration clandestine. En tout cas faire de l'immigration un hème central de campagne électorale, c'est se donner des facilités et abuser les français sur les causes réelles de la crise de l'économie et de la société françaises, malades non de l'immigration noire et maghrébine, mais de leur vieillissement et de l'incapacité des politiques français à innover.

Le lourd héritage de la traite des Nègres

Lorsque, au 19è siècle, à des dates différentes, les pays d’occident qui avaient pris une part active à la traite des Noirs la condamnent et prennent des lois qui l’abrogent, la pratique inhumaine et barbare avait derrière elle 400 ans de ravages de l’Afrique. Elle en aura pour longtemps scellé le sort. Pour longtemps, la traite laissa avili ce continent ; avilissant du coup le bourreau. On ne prend pas, sur une durée aussi longue, tant de plaisir sadique malsain à broyer autrui, sans y perdre un peu de son âme, sans conséquences psychologiques fâcheuses inscrites dans le temps long, pour la victime et le bourreau Les pratiques qui accompagnèrent la traite des Noirs et sa justification métaphysique devaient marquer en profondeur la culture occidentale et fournir aux scientifiques des éléments de la théorie racialiste fameuse de la hiérarchie des groupes humains. Déduite de l’observation des niveaux technologiques atteints par chacun d’eux, et des différences biologiques qui expliquent, d’après ces scientifiques, ces différences de niveaux. Des groupes humains qui présentent par rapport aux européens les différences biologiques les plus marquées, les Noirs en l’occurrence, occupant le bas de l’échelle où ils apparaissent comme un raté de la création.

En France, prenant au sérieux ces aberrations du comte de Gobineau, sur des générations, l’Ecole de Jules Ferry les inculqua à des millions d’écoliers. Elles allaient avoir de funestes conséquences sur la colonisation qui fut, comme chacun sait, brutale et barbare. Elles furent au principe de ces expositions où, avec d’autres « curiosités exotiques », des indigènes Noirs des colonies françaises d’Afrique et du Pacifique fournirent la matière, en 1930 et 1932, des expositions coloniales de Paris. Pour que, il n’y’a pas si longtemps de nous, des peuples civilisés aient pris plaisir à traiter de cette façon des êtres humains, il faut croire qu’ils ne les plaçaient pas bien haut sur l’échelle humaine ; à supposer qu’ils les classaient parmi les humains. En tout cas, dans les colonies où existaient des lieux interdits aux Nègres et aux chiens, sale macaque était l’injure que les blancs, à plaisir, chaque jour, jetaient à la figure des colonisés. Les plus innocents de ces indigènes qu’on traitait ainsi en sous-humains et qui ne le jugeaient pas sur ce comportement venu d’une mauvaise éducation, finirent par croire à la supériorité raciale déclarée du Blanc. Commence alors pour eux (la majorité, malheureusement) cette terrible torture morale qui chez certains donneront ces névroses d’angoisse décrites par Frantz Fanon dans Peau noire masques Blancs.

L’abolition de la traite des Noirs et la fin de la colonisation, son prolongement, n’ont pas changé la perception et l’image sinistre que les occidentaux s’étaient faites du Noir. Celles-ci étaient devenues des faits de culture qui commandent des attitudes, ordonnent et orientent des actions. Or, sans être une hypostase, la propriété de la culture est la résistance au changement. Certes, elle change, mais combien lentement ! Quoi d’étonnant alors si, même chez les meilleurs, les occidentaux qui ne connaissent des cultures africaines que ce qu’en a dit la littérature coloniale émaillée de fantaisies exotiques, ne vont pas sans une certaine réticence de réflexe en quelques sortes, au devant des Noirs ? Naturellement ceux d’entre eux qui sont allés en Afrique, et qui se sont efforcés de comprendre l’âme noire, en reviennent souvent frappés par la grande capacité d’amitié du Noir.

Pour faire reculer la xénophobie et la discrimination raciale qui frappent les Noirs en occident, la loi ne suffit probablement pas. C’est le regard de l’occidental tout entier qu’il faut façonner, éduquer. C’est donc à la culture de ce pays qu’il convient d’abord de s’attaquer. Parce que c’est elle qui dicte ces comportements que, dans leur grande majorité, les occidentaux adoptent vis-à-vis des Noirs. Enseigner à l’école, dès le plus bas niveau, que la différence est bonne et fécondante. Que, en dehors des valeurs universelles présentes dans tous les groupes humains : la justice, l’amitié, le respect d’autrui et de son bien, la vérité, etc, toutes celles dont une civilisation peut s’enorgueillir sont relatives. Que, mis à part un petit nombre d’aberrations, tout à fait contingentes, d’ailleurs, toutes les cultures sont d’égale dignité, et que par conséquent, des humains relevant de groupes et de cultures différents peuvent parfaitement cohabiter pacifiquement ; pour peu qu’ils soient à l’écoute de la raison, qui conduit à relativiser les différences et à réduire les distances, pourvu qu’elle ne soit pas viciée.

Qu’on observe, en France par exemple, la vie des crèches et des jardins d’enfants où la République, au nom de la fraternité humaine, ferme les yeux sur les origines sociales, religieuses et ethniques des enfants. Ici, entre ceux-ci, spontanément des liens se tissent ; n’écoutant que leur instinct, têtes blondes et têtes crépues s’assemblent et fusionnent pour célébrer la vie. L’attrait dilectif est déterminé d’abord par le fait qu’on a le même âge, qu’on est tous des poètes venus d’un fabuleux royaume nommé enfance. Qu’on est tous des poètes nés pour célébrer le monde ensemble. Voilà la seule chose qui importe pour les enfants, loin du monde des adultes pleins de calculs incompréhensibles pour eux. Les enfants nous donnent là une leçon d’ouverture et d’accueil de la différence. Pour moi, ils sont tous le « Petit prince de Saint-Exupéry : « si je diffère de toi, loin de te léser, je t’augmente » (Saint-Exupéry, Lettre à un otage).
Encore sans malice, les petits d’homme, que plus tard abrutissent le discours et le comportement des parents, se moquent des barrières sociales et ethniques. Voilà pourquoi les peuples dits sauvages mais qui ont encore le charme sans malice de l’enfant sont si accueillants pour l’étranger ; curieux et sans doute désireux de savoir, ils adoptent vite. Face à la différence, surtout quand elle est biologique, la xénophobie est une caractéristique des sociétés industrielles civilisées, occidentales et asiatiques, furieusement protectrices de ce qu’elles appellent leurs biens. Roulée dans l’imaginaire collectif, qui n’épargne ni les savants, ni le petit peuple, la vigueur du contraste des pigmentations qui justifia et légitima la traite des Noirs l’entretient. L’ombre de la traite des Noirs sans cesse accompagne l’occident, rendant toujours problématique entre l’Afrique et l’occident le rapport de confiance souhaité.


Dominique Ngoie-Ngalla

Par Dominique Ngoïe Ngalla et Philippe Cunctator qui nous livrent leurs réflexions sur le monde d'aujourd'hui : de l'Afrique clopinant sur le chemin de la modernité au reste du monde, de la complexité des enjeux politiques aux péripéties du fait religieux, nous découvrons sous la plume de Dominique l'âme du poète qui rêve d'un autre monde, mais n'oublie ni les brûlures de l'histoire ni la dure réalité du temps présent...

Quelques ouvrages de Dominique Ngoïe-Ngalla...





L'Evangile au coeur de l'Afrique des ethnies dans le temps court
; l'obstacle CU, Ed. Publibook, 2007 .




Route de nuit, roman. Ed. Publibook, 2006.




Aux confins du Ntotila, entre mythe, mémoire et histoire ; bakaa, Ed. Bajag-Méri, 2006.




Quel état pour l'Afrique, Ed. Bajag-Méri, 2003.




Lettre d'un pygmée à un bantu, mise en scène en 1989 par Pierrette Dupoyet au Festival d'Avignon. IPN 1988, Ed. Bajag-Méri, 2003.




Combat pour une renaissance de l'Afrique nègre, Parole de Vivant Ed. Espaces Culturels, Paris, 2002.




Le retour des ethnies. La violence identitaire. Imp. Multiprint, Abidjan, 1999.




L'ombre de la nuit et Lettre à ma grand-mère, nouvelles, ATIMCO Combourg, 1994.




La geste de Ngoma, Mbima, 1982.




Lettre à un étudiant africain, Mbonda, 1980.




Nouveaux poèmes rustiques, Saint-Paul, 1979.




Nocturne, poésie, Saint-Paul, 1977.




Mandouanes, poésie, Saint-Paul, 1976.




L'enfance de Mpassi, récit, Atimco, 1972.




Poèmes rustiques, Atimco, 1971.