lundi 14 mai 2007

La nation, sédimentation continue de différences

Empilement, puis fusion, sous la longue durée de communautés aux traditions diverses et contrastées, une nation n'est pas une ethnie, qui s'est elle même construite sur le mode de la nation, au terme d'un processus complexe de fusion d'éléments d'origines culturelles diverses.La nation et l'ethnie sont donc du côté de l'histoire et de la culture, et non de la nature. Elles sont chacune à leur échelle, un processus, un cheminement, un travail de l'homme sur soi. Dans ces conditions, parler de français de souche, de belges de souche, d'italiens de souche, de portugais,d'espagnols de souche, etc, ne signifie pas grand chose; puisque, tout compte fait, sur cet espace territorial appelé nation, il n'est personne qui ne soit venu d'ailleurs. Pas même ses premiers habitants (les indigènes des latins). Puisque, avant leur installation, il n'y avait personne, un no man's land. Il vaut donc mieux, lorsqu'on parle d'identité nationale, viser son homogeinété culturelle plutôt que l'épaisseur temporelle de l'installation sur son territoire de sa population. Les populations qui ont fini par fomer le peuple français ne sont pas arrivées sur le territoire de la France en même temps. Aux celtes: allobroges, éduens, séquaniens, etc, s'étaient ajoutés, pour former la communauté culturelle homogène que nous connaissons,chacun à des moments différents, vandales, goths, wisigoths, huns, ostrogoths, francs, lombards, arabes, Vikings enfin, en attendant le grand déferlement du XIXè siècle. Et cependant tous fondus à terme les uns dans les autres, greffés les uns sur les autres, depuis ils sont tous français. Leurs souches françaises sont donc culturelles d'abord. La dimension géographique de celles-ci est secondaire. Du point de vue géographique, tous à un moment donné de leur existence furent des immigrés. Ce qui peut leur donner l'illusion à tous d'être des français de souche, c'est sans doute l'identité de la couleur de peau qui rend invérifiable le caractère sédimenté du peuplement de la France par tant de communautés aux tradtions à l'origine si diverses.

La pigmentation de la peau justement, voila le problème qui fache et qui retarde la rencontre de l'humanité à Babel. Babel, mythe certes, mais si belle utopie! Des Antilles françaises ou d'Afrique Noire, le Noir, en France- le spot publicitaire du CRAN (Cercle representatif des associations noires) le rappelle chaque jour à la télévision- est comme l'arabe, à cause de sa couleur de peau, l'objet de discriminations multiples: à l'embauche, au logement, dans les lieux de loisirs, etc. Or, des Antilles ou d'Afrique, le Noir fait partie de l'histoire de la France. Pour sa crédibilité et l'harmonie entre ses composantes culturelles, la France s'oblige ainsi à un devoir de mémoire. Le passé et l'histoire de la France traversent le présent de chaque français; ils sont des éléments constitutifs de l'identité de chaque français. De sorte que des Antilles ou des anciennes colonies, au même titre que ceux qui viennent d'Italie, de Croatie, de Roumanie et d'ailleurs en Europe, le Noir dont on a tendance à faire un sous-français, qui ne serait pas français à part entière, le Noir donc fait partie de l'héritage de la France. Il avait contribué à le forger. Il est donc injuste de l'empêcher d'avoir part à cet héritage.Pour ceux-là, immigrés, avec ou sans papiers, d'avoir été dans le passé aux côtés de la France au moment où celle-ci était aux abois, et aujourd'hui de travailler au maintien et à l'expansion de la langue française par la francophonie, sont des titres suffisants pour revendiquer, sans être traités d'effrontés, qu'eux-mêmes et les anciennes colonies d'Afrique d'où ils viennent soient traités avec moins de désinvolture par la France que le devoir de mémoire oblige à se comporter autrement vis-à-vis d'eux. La grandeur d'une nation comme la France se vérifie à sa constance dans l'amitié, à sa fidélité à tenir les engagements pris par le passé vis-à-vis de ceux qui l'avait obligée. Ainsi ça devient moralement gênant lorsque, quel que soit leur statut, les immigrés que tant de législations agressives jettent dans le stress et l'angoisse permanente, viennent des pays qui ont avec la France un lien historique qui, par sa nature et sa durée, est loin d'être ordinaire. Il parait que désormais dans la candidature pour l'immigration en France la connaissance de la langue française ou même seulement un commencement de connaisance de la langue française est un critère décisif. C'est bien, c'est très bien. Parce qu'il ne faut pas vivre en autiste dans le pays de son choix, et qui vous accueille. La question est alors: que fera-t-on des immigrés venus des pays francophones? On les voit chaque jour rudoyer comme tous les autres qui ne savent pas un mot de français. Encore que ceux-ci, pour cette raison, ne méritent pas d'être traités avec si peu d'humanité. "Chaque homme, rappelle Montaigne, porte en lui la part entière de l'humaine condition" (Montaigne, Essais, III).

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Par Dominique Ngoïe Ngalla et Philippe Cunctator qui nous livrent leurs réflexions sur le monde d'aujourd'hui : de l'Afrique clopinant sur le chemin de la modernité au reste du monde, de la complexité des enjeux politiques aux péripéties du fait religieux, nous découvrons sous la plume de Dominique l'âme du poète qui rêve d'un autre monde, mais n'oublie ni les brûlures de l'histoire ni la dure réalité du temps présent...

Quelques ouvrages de Dominique Ngoïe-Ngalla...





L'Evangile au coeur de l'Afrique des ethnies dans le temps court
; l'obstacle CU, Ed. Publibook, 2007 .




Route de nuit, roman. Ed. Publibook, 2006.




Aux confins du Ntotila, entre mythe, mémoire et histoire ; bakaa, Ed. Bajag-Méri, 2006.




Quel état pour l'Afrique, Ed. Bajag-Méri, 2003.




Lettre d'un pygmée à un bantu, mise en scène en 1989 par Pierrette Dupoyet au Festival d'Avignon. IPN 1988, Ed. Bajag-Méri, 2003.




Combat pour une renaissance de l'Afrique nègre, Parole de Vivant Ed. Espaces Culturels, Paris, 2002.




Le retour des ethnies. La violence identitaire. Imp. Multiprint, Abidjan, 1999.




L'ombre de la nuit et Lettre à ma grand-mère, nouvelles, ATIMCO Combourg, 1994.




La geste de Ngoma, Mbima, 1982.




Lettre à un étudiant africain, Mbonda, 1980.




Nouveaux poèmes rustiques, Saint-Paul, 1979.




Nocturne, poésie, Saint-Paul, 1977.




Mandouanes, poésie, Saint-Paul, 1976.




L'enfance de Mpassi, récit, Atimco, 1972.




Poèmes rustiques, Atimco, 1971.