mercredi 10 décembre 2008

Les écrivains, la crise et la misère du monde

Habitués à ne porter attention qu’aux aspects les plus douillets de notre condition, nous cherchons à en oublier la misère, ce désarroi intrinsèque, celui dont nous devons nous libérer afin de devenir maîtres de nos dons et capacités, des Hommes.
Nous sommes désormais adeptes de l’avènement d’une réalité enchantée, féerique, que nous invoquons à coup de déclarations utopiques empreintes d’affect et d’émotivité pour les politiques ; et de publicité repoussant sans cesse les limites du possible pour les industriels. Même la littérature est frappée par ce phénomène, avatar de la modernité tardive.

Lorsque l’on braque le projecteur sur la partie la plus « humanisée », dit-on, de l’humanité, on constate qu’elle a oublié de nourrir l’Homme en elle pour s’adonner corps et âme à la poursuite rêves hédonistes, à l’euphorie et à l’économisme. Difficile de trouver ailleurs plus ingénieux en matière de réalisation de profits et plus au fait du réalisme économique. Dans certaines contrées de cette humanité d’avant-garde, certains yeux et certains sourires reflètent "le billet vert". Fini la capacité à s’émouvoir réellement pour les choses dépourvues de valeur lucrative ou non prometteuses de profits. L'émotion commandée par la surexposition médiatique des catastrophes humaines de tous genres n'est plus au rendez-vous, elles font partie de la normalité, nous y sommes habitués: des monceaux de cadavres aux enfants faméliques, victimes de la famine, tout y est. Les chaines de télévision et les magazines aux grands tirages nous disent de quoi il faut être ému. Tant-pis pour les victimes des événements tragiques non médiatisés, vos malheurs ne sont pas générateurs de "buzz".
Cette société est celle du modèle libéral débridé qui, depuis quelques décennies, règne sans partage sur le monde.

Lorsque le système fonctionnait, tout allait bien ; personne n’était à plaindre, même pas les pauvres, ces millions de personnes jetées à la misère : ils n’avaient qu’à être aussi habiles que les autres. Leur pauvreté était entendue comme le résultat de leur paresse ou de leur ignorance volontaire des canaux de l’enrichissement. C’était oublier que, selon l’idéologie dominante, le capital l’avait définitivement emporté sur le travail, sauf à compter les encouragements du fameux « travaillez plus pour gagner plus », slogan qui a compté de beaucoup dans le ralliement de la classe populaire au candidat du centre droit français aux élections présidentielles de 2007.
Travailler plus serait le souhait des abonnés aux contrats à temps partiel et autres contrats précaires. Travailler toujours plus lorsque les revenus du travail stagnent et que ceux du capital ne cessent de s'envoler, que les salariés s'enfoncent chaque jour un peu plus dans la pauvreté?

Avec le surgissement de la crise financière, cette bête féroce créée par les apprentis sorciers que sont les génies de la finance est sortie de sa cage. Tel le Minotaure, elle coûte beaucoup à la communauté tant elle fait des victimes ; elle a même déjà mangé quelques uns de ses créateurs.
Aveuglés par la promesse de gains toujours plus élevés, ces as de la finance naviguaient à vue, après avoir jeté tous les instruments de contrôle et de navigation, sur une eau aux multiples écueils et bancs de sables.
En sortant de sa cage ouverte par la crise des sub-primes, le monstre a tout fracassé. De grandes institutions y sont passées, des patrons ont été limogés, des salariés continuent d'être licenciés.

Autrefois moqué, négligé, hors jeu, promis à une mort prochaine par les acteurs du libéralisme dérégulateur, dont font partie les maîtres de la finance, nouveaux faux monnayeurs, l’Etat est tout de suite intervenu. C’est Thésée!
L’acteur gênant d’hier est nécessaire aujourd’hui. Cette intervention bien que nécessaire, s’est montrée plus prompte à secourir les pyromanes. Ne nous étonnons pas, les mêmes lui riront au nez une fois que ces naïfs bouffis d’orgueil financier et économique se jugeront à l’abri. La reconnaissance n’habite pas les gens peu habitués à la frugalité, l’abondance leur est naturelle. Ils n’ont ni la gratitude, ni la générosité du pauvre.

L’Etat n’a pas tendu la main aux victimes réelles de la crise : les pauvres et toutes les personnes situées à la lisière de la misère, Dieu sait qu’ils sont nombreux !
Déjà oubliés pendant que le bal de la finance se déroulait sans fausse note apparente, oubliés même par les écrivains, dont la mission, du fait de leur sensibilité et de leur aptitude à l’indignation, est de réagir à l’injuste. Faut-il réveiller ceux qui, tels Zola, Hugo et bien d’autres, s’étaient illustrés par l’exposition de cette difformité de l’humanité.
Lorsque la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme fête ses soixante ans, les droits qu’elle consacre à toute l’humanité sont loin d’être une réalité. Le combat reste à mener tant que demeurent des maux comme la famine ; oh la vilaine ! Elle a encore progressé (963 millions de personnes souffrent de la famine, soit 40 millions de plus qu’en 2007). Le droit à l’éducation, le droit au logement, le droit à mener une vie familiale normale, n’en parlons même pas : les revendications et manifestations de tout ordre au sujet de ces derniers sont assez éloquents. Quant à la protection contre l’arbitraire de la puissance publique, l’affaire "Libération" est encore récente pour nous rappeler que là aussi, même dans une grande démocratie, les choses ne sont pas au point. Vigilance et combat permanent sont nécessaires pour plus de dignité.

J’en rappelle donc aux écrivains, surtout ceux d’Afrique, afin que leur œuvre soit la voix des « damnés de la terre ». Ne laissons pas la littérature être gagnée par la logique de consommation. Elle oriente la production sur l’affect, le mièvre et le sensationnel.
Les écrivains sont des artistes, la logique industrielle en fait des artisans dont l’œuvre est dénuée de singularité et de charge symbolique. Ils se sont laissé prendre au jeu, leur oeuvre ne s'inscrit plus dans l'Histoire, c'est à dire dans l'immuabilité de la condition humaine.
L'insuccès crée de l'aigreur, nous dira-ton, mais il n'est pas question d'amertume ici, un simple étonnement devant les façons inouïes des écrivains d'aujourd'hui.

Dans ce monde, n’ayons pas peur des mots, et ne voyons pas là du pessimisme; dans ce monde où beaucoup de nos semblables vivent un cauchemar du fait d’un économisme créateur de misère sociale, on ne saurait se priver d’œuvres qui évoquent et dénoncent ce spectacle de mauvais goût . Les artistes sont ces fous du roi à la parole débridée ; leur âme porte naturellement vers les incohérences ou les beautés de l’humanité.
Point de mauvaise foi, reconnaissons qu'il est encore des auteurs aujourd'hui, qui se définissent par leur combat ou simplement par une proximité a ras le sol de la réalité. Hommage à eux.

Philippe Ngalla-Ngoie

vendredi 21 novembre 2008

Election de Barack Obama, le bel exemple de l'Amérique

Dans un monde où l’imaginaire est rempli de préjugés pour la plupart dégradants au sujet des Noirs, élire un président issu de cette race que Hegel, Gobineau et tous ceux qui pensaient comme eux rejetaient dans l’infrahumain, dans le pays le plus puissant du monde, jusqu’ici gouverné exclusivement par des WASP (white anglo-saxon protestant) sans compter l’intermède de Kennedy, relevait de la gageure.


L’élection de Barack Hussein Obama comme quarante quatrième Président des Etats-Unis d’Amérique, qui vient de nous prouver que cela est possible, nous donne là un bon exemple : à force de courage et de volonté il est possible de transcender les barrières raciales et de reconnaître, comme Montaigne et tous les autres humanistes, que tout homme, qu’il vienne des Kouriles ou du Kalahari, porte en lui l’entière part de l’humanité.


L’exemple est beau non seulement du fait de l’histoire torturée de ces Noirs mal aimés d’Amérique dont nous connaissons tous la tragique épopée, mais parce que les Etats-Unis montrent qu’ils n’ont pas peur d’affronter leurs contradictions et leurs différences. Les Blancs on le sait, ont dû, petit à petit, céder face au combat exemplaire de ces fils Noirs d’Amérique en mal de reconnaissance dans un pays qu’ils ont contribué à construire.


Le combat pour les droits civiques d’il y a une cinquantaine d’années, animé par Martin Luther King, Malcom X, les Black Panthers et plein d’autres personnes, avait permis d’envisager un avenir meilleur ; il était devenu possible aux fils d’esclaves d’accéder aux plus hautes fonctions économiques, académiques et politiques. Ce combat a profondément transformé la société américaine, il lui a permis de sortir de l’immobilisme auquel la destinait son histoire et d’ériger une société fluide, dans laquelle on n’occupe pas forcément la même place qu’à la naissance. Chacun peut désormais occuper la place que ses ambitions se proposent d’occuper. Grâce au courage et à la lucidité des américains, le rêve hier encore utopique de Martin Luther King s’est réalisé.


Barack Obama, ce type avec un drôle de nom comme il le dit lui-même, a commencé à susciter l’engouement bien au-delà de son pays dès l’annonce de sa candidature aux primaires démocrates. Ce fils d’africain n’a pas seulement conquis les africains, mais il a aussi séduit les européens. Les français, d’après un sondage, étaient près à voter pour lui à 78%.
Une question cependant vient à l’esprit lorsque l’on voit l’enthousiasme des français et des autres européens au sujet de Barack Obama. Est-il un nouveau gadget pour nous autres modernes englués dans cette société du spectacle, n’est-il qu’un nouvel objet de distraction pour nous modernes toujours en quête de sensationnel; l’expérience de Barack Obama est elle possible ailleurs qu’aux Etats-Unis ?


L’accès à la Présidence américaine de Mr Obama n’a été possible que par la prise en compte par les institutions américaines des revendications politiques de ces minorités, de leurs possibilités d’accès à des institutions dont leur appartenance raciale leur fermait d’emblée les portes. L’Amérique de Barack Obama assume sa diversité et souhaite en profiter pleinement.


Pour une Europe qui en de nombreuses situations s’inspire des Etats-Unis, même de ses erreurs, il y a en ce cas un gros retard.
En France il n’existe pas officiellement de cloisonnement ethnique ou de communautarisme ; il n’existe donc pas officiellement de problèmes relatifs à la représentation ou à l’insertion des minorités, il y a la République. Trois fois faux ! On est plutôt tentés d’ignorer ces différences sensées être fondues dans le creuset républicain. La France ne regarde pas les différences en son sein, elle tend plutôt à l’identité nationale. Le principe de citoyenneté est affirmé mais pas appliqué. La République pourvoit d’emblée à l’égalité, certes, mais cela n’est possible en pratique que par la mise en œuvre de mesures positives concrètes tendant à la réaliser, ou du moins à corriger les effets négatifs d’une altérité non assumée.


Philippe Ngalla-Ngoïe

dimanche 26 octobre 2008

Odirint dum me metuant. Qu'ils me haïssent, pourvu qu'ils me craignent.

Les Noirs devraient faire du propos du dictateur romain leur devise. A méditer tous les jours. L’histoire des vivants, quelle qu'en soit l’espèce, est, Darwin avait fait là une belle découverte, une lutte permanente, où les faibles sont éliminés. L'harmonie sociale résulte toujours d'un équilibre de forces antagonistes. Une union tensionnelle des forces qui grandissent et s'affermissent en s'opposant. On trouvera difficilement dans le monde un groupe humain où, sans réticences instinctives de départ, le Noir est accepté comme il est. Sa couleur de peau de si sinistre symbolique dans tous les autres groupes humains, ajoutée à d'autres différences physiques, le désigne illico à la mise à l'écart et à la marginalisation. De la couleur de sa peau et du profil de son visage, découlent, d'après les penseurs occidentaux, de terribles faiblesses intellectuelles et morales. Il apparait dans l'imaginaire de ceux-ci comme un raté de la création. Naître Noir devient alors, comme le dit cet humoriste, un handicape. Mais à la différence des autres handicapes, celui du Noir n'inspire ni pitié ni compassion, il suscite, bien au contraire, un inexplicable sentiment d'agression.


Hegel qui pourrait bien résumer le génie intellectuel de l'occident pensant trouve le Noir inapte à devenir un sujet de l'Histoire, et le condamne à végéter dans l'infra-humanité, recouvert de nuit noire. L'avis du philosophe de la phénoménologie de l'esprit a suscité et alimenté un mouvement de pensée dont les conclusions sont connues: avec le Jaune, mais à une échelle plus bas que le Jaune, le Noir est un être inférieur. De son infériorité ontologique découle son infériorité sociale. La République de Jules-Ferry, on s'en souvient, fit de cette aberrante affirmation son crédo. Le colonialisme y trouva la justification de ses procédés barbares. La même science occidentale qui avait fabriqué au Noir ce statut l'a depuis réhabilité. Mais, le discours est une chose, fût-il scientifique, sa pratique sociale en est une autre. L'erreur ou le mensonge scientifique avaient eu le temps de structurer une mentalité. De sorte que, malgré que tous les jours, en grand nombre, les Noirs administrent par leur réussite la preuve de l'erreur d'un tel jugement (pas seulement dans le sport, mais dans tous les domaines d'activité), le Noir reste peu crédible auprès des descendants de Darwin et du comte de Gobineau, l'auteur de l'Essai sur l'égalité des races. « Mentez mentez, disait Voltaire, il en restera toujours quelque chose ».

Le grand malheur est que la victime a intériorisé l'image peu flatteuse que le Blanc lui avait fabriquée et inculquée. Noir signifie inaptitude aux choses de l'esprit, et vices moraux graves: luxure, vanité, mensonge, paresse Aussi simple. Expéditif! Ceux qui énoncent de si terribles contre-vérités sont-ils raisonnables? Et en ce qui concerne le vice, oublie-t'on que c'est la chose la mieux partagée du monde? La bassesse, la mesquinerie ne sont pas des attributs du seul nègre. Pour le Noir, la solution à sa discrimination en occident et dans le reste du monde, il la trouvera dans sa tête et dans ses mains. D'abord se convaincre, à partir de l'expérience ( il y'a deux ans, âgé seulement de 14 ans, à l'âge où la moyenne des français entrent en troisième, un petit Noir originaire de Côte-d’Ivoire n'obtint-il pas le bac ici même en France; en tout cas les exemples sont nombreux) que pour être porteur d'une couleur décidée de malheur par les occidentaux, il est pleinement homme; qu'il n'existe pas de demi-homme comme il existe des demi-dieux dans la mythologie grecque; que chaque homme, rappelons Montaigne, " porte en lui la part entière de l'humaine condition"; que l'éclosion de celle-ci est seulement un problème de milieu, et que, placé dans les mêmes conditions de naissance et d'existence que le Blanc, le Noir peut tout ce que le Blanc peut ( Cheick Modibo Diarra de la Nasa, créateur d'un engin envoyé sur Mars, l'a prouvé).

Ces Noirs brillants qu'on rencontre ici et là en occident ne doivent pas apparaître comme des exceptions. Rencontrant quelque Noir intellectuellement doué, beau ou ayant de l'éducation, certains occidentaux disent, surpris: « tu n'es pas comme les autres! ». Loin d'être un compliment à son destinataire, celui-ci doit l'entendre comme une injure à la race. Le Noir doit le savoir. Le tout est une question de milieu et d'audace. Oser se servir de son intelligence, et d'abord se persuader que les Blancs ne sont pas des dieux, qui feraient des choses dont les Noirs seraient incapables. Une telle prise de conscience mettrait fin à bien des complexes paralysants. Inverseraient, ou du moins équilibreraient les rapports du Noir et du Blanc. Une chose: si le Noir veut que le Blanc le respecte et le prenne au sérieux, qu'il s'affirme. Ce sera le commencement de la fin de la discrimination qui ne repose pas tant sur la couleur de la peau avec tout ce qu'elle suppose de négatif, et d'autres différences physiques, que sur le doute que tel qu'il apparait marqué du sceau négatif du destin, le Noir soit capable de quoi que soit qui vaille. C'est, chez bien des occidentaux une croyance forte bien enracinée. Le Blanc oublie la laideur supposée chez un Noir qui réussit. Le Blanc, l'homme tout court, ne respecte que celui qui le défie et ruine ses certitudes. Il n'y'a pas si longtemps encore, traités à peine avec moins de mépris que les nègres, grâce à leur grande capacité à entrer en modernité, sont devenus pour les occidentaux des partenaires redoutables.


Pour les Noirs, la reconnaissance sociale est aussi à ce prix. A contrepente faire à leur tour le chemin emprunté par les asiatiques. Le look black: les tignasses tressées des hommes portant anneaux aux oreilles comme des pirates et tous ces comportements de dérision n'imposeront pas l'Afrique à l'attention d'un monde en concurrence où il n'y'a pas de place pour les plaisantins. Pour s'imposer dans le monde et se faire respecter, les juifs qui sont au moins aussi mal-aimés que les Noirs, ont dû se résoudre à travailler de façon à toujours se placer parmi les meilleurs. Non par la dérision mais, par la science et les œuvres de l'esprit.

Leur admiration aux USA où le Noir est frappé d’infamie, Martin Luther King, Louis Armstrong le musicien, Duke Ellington, Jessie Jackson, Mohamed Ali et tant d’autre du monde des lettres et de la science, ne le doivent pas à une malodorante tignace de méduse, ni à des oreilles décorées de fantasques anneaux, mais à leur capacité à intégrer la société de leur temps, à leur effort constant pour se placer parmi les meilleurs. Avant d’être le prisonnier exemplaire qui suscite compassion et impose le respect à ses geôliers même, Nelson est un gentlemen tout droit venu de l’Angleterre victorienne. Obama grâce à qui le rêve de Luther King a chance de réaliser, fût resté ignoré et n’aurait pas à ce point bousculé l’électorat américain focalisant sur u Noir d’origine obscure la conscience américaine blanche, s’il n’en avait fait le pari et mis toute son intelligence à le gagner.

dimanche 21 septembre 2008

L’Ethnie dans l’Etat africain comme un vers dans un fruit

L’Etat africain (le primat accordé à l’économie et à ses problèmes a souvent masqué la cause du mal), ce ne sont pas comme en Asie et naturellement en Occident qui peut bien servir de référence, ce ne sont pas des populations hétéroclites par leurs origines culturelles, sur des siècles et des millénaires, patiemment rassemblées par une même histoire, pour former à terme un même peuple coulé dans un même moule culturel et idéologique dont les membres partagent une même vision du monde. Un bloc compact. Une conscience collective. Un inconscient collectif. Un sentiment d’appartenance fort. Une identité collective opposée à d’autres identités collectives. Un même esprit qui imprègne la pensée la plus haute, les gestes les plus simples de l’existence quotidienne de chaque individu. A l’inverse faute de mécanismes réels de régulation des particularismes, longtemps après les indépendances, l’Etat africain reste un conglomérat de communautés culturelles. Les membres de chacune d’elles ayant gardé, en dépit du broyage de leurs cultures par la colonisation, la conscience forte de leur appartenance groupale et l’instinct de groupe qui les place en rapports agonistiques instinctifs vis-à-vis des autres groupes. Des tensions sourdes ou ouvertes traversent forcément de tels Etats à configuration multiculturelle.


Une telle situation sociologique conflictuelle fut d’abord le fait des villes et des grandes agglomérations qui aspirent la majorité des populations de l’arrière-pays. Et comme la ville vit en osmose avec l’arrière-pays, l’image généralement négative qu’à la ville les individus venus des horizons culturels divers ont les uns des autres, est vite répercutée dans l’arrière-pays où elle renforce l’instinct tribal de rejet de l’autre différent. Pour harmoniser ces différences au sein de l’Etat et réduire les tensions entre les groupes qui le composent, comment faire ? Le régime de parti unique avait cru trouver la solution : inculquer à tous les mêmes valeurs, les mêmes pratiques. Le parti unique oubliait que la colonisation avait poursuivi les mêmes objectifs : assimiler les populations aliénées de leurs cultures, leur imposer celles du colonisateur. On sait le résultat. Ce fut un échec. Bien au contraire l’initiative coloniale renforça chez chacun la conscience de la singularité de son identité. Brimant les libertés et opprimant au moins autant que la colonisation, le parti unique échoua dans sa poursuite d’une âme collective, d’un peuple à façonner. Il suscita chez ses nombreuses victimes (à l’exception du groupe dont relevait le détenteur du pouvoir) l’amertume et la haine qui aboutirent à son rejet unanime dans toutes les conférences nationales souveraines auxquelles, sous diverses formes, presque toute l’Afrique eut recours pour se libérer des crocs du parti unique.


Restait donc à essayer de la démocratie appelée de tous leurs vœux par toutes les conférences nationales souveraines. En instaurant la démocratie on espérait enterrer définitivement l’ethnie et libérer le pouvoir confisqué par un groupe d’individus de même origine culturelle. Le pouvoir reviendrait au peuple souverain qui l’exercerait par l’intermédiaire de ses représentants. Or le peuple souverain qui transcende les groupes n’existait pas alors ni depuis. A la place, des peuples et des nations divisées par des intérêts de groupe, de surcroit mal instruits des droits et devoirs du citoyen. L’instauration de la démocratie ne transfigure donc pas d’un bloc, pour leur donner une âme et une conscience collectives, des gens et des groupes de gens opposés par leurs cultures et leurs trajectoires historiques. L’Etat, garant de la communauté des citoyens reste pour eux une belle abstraction dans laquelle personne ne se reconnait et aux principes de laquelle par conséquent personne ne veut obéir, justement parce que ils ne se retrouvent pas dans les principes de cet Etat qui ne sont pas ceux du groupe dont ils relèvent. L’Etat est si étranger à chacun d’eux que chacun peut le piller sans vergogne ni remord. Il n’est de patrimoine commun et donc vénérable que celui construit par ses ancêtres. Or, où sont dans les Etats africains les ancêtres communs sacralisés qui inspireraient la vénération de leur héritage ? Il n’y a pas entre les différents groupes composant l’Etat africain d’histoire commune, d’héritage commun. L’histoire commune commence avec la colonisation subie par tous. Cette histoire n’a pas eu une épaisseur suffisante pour secréter une consciente collective et des mythes fédérateurs de tous ceux qui l’ont vécue. L’Etat africain reste de ce fait un espace social où des communautés aux différences affirmées n’ont de liens entre elles que juridiques et abstraits. Il manque la charge affective qui soude. L’écart qui sépare les groupes s’est davantage creusé après les indépendances, quand commence la lutte pour le pouvoir que chaque groupe désirait ardemment s’adjuger pour l’honneur et le prestige, sans toujours savoir exactement ce qu’il en ferait. Dans ce contexte de confiscation du pouvoir, l’adversaire politique est vite perçu comme un ennemi à traiter comme tel. Ce qui a pour conséquence pour les vaincus et les exclus du pouvoir, une amère frustration et le repli identitaire avec la rumination de la défaite et la haine du détenteur du pouvoir et de son groupe, surtout que ce dernier ne se fait pas faute d’écraser les vaincus de son arrogance méprisante. Ainsi va la démocratie à l’Africaine (sauf dans de rares pays), bancale, loin de l’éthique de respect des principes arrêtés en commun. Parce, que justement, ces principes ne font partie de l’histoire et de la culture de l’Afrique.


Pour autant les africains qui savent les bienfaits relatifs de la démocratie en Occident où elle est devenue une dimension culturelle de ce pays, doivent-ils désespérer d’y arriver jamais ? Certes non. La démocratie qui est un travail, un cheminement, un processus, heurte certes la nature humaine que le principe de réalité toujours contrarie. Mais l’africain ne relève pas d’une humanité différente de celle de ceux-là qui se sont faits à ses exigences. Il n’y a donc pas de raison qu’à force de travail et de sérieux que l’Afrique n’y arrive. Encore faut-il qu’elle prenne conscience des tâches qui l’attendent, qu’elle prenne la mesure de ce qu’il lui faut de volonté et de constance dans l’effort pour murir à la modernité et cesser de donner dans le bricolage politique où elle semble se complaire.


L’appétit du pouvoir et la volonté de puissance qui causent tant de ravages dans les Etats africains où ils ne sont pas réglementés, sécrétant l’arbitraire et la tyrannie, sont universels, communs à l’humanité tout entière. On ne doit donc pas en faire une espèce de péché originel des africains contre lequel la meilleure éducation ne peut rien. Dignité, volonté de dignité, constance joyeuse dans l’effort, ce sont des vertus des gens de la terre. En Afrique comme dans le reste du monde. Leur abandon progressif dans les pays africains depuis quelques décennies s’explique aisément par le défaut de formation des populations à la conscience citoyenne par les partis politiques dont ce devrait être la tâche prioritaire. Or nous savons que la majorité des partis politiques africains ont pour socle le groupe ethnique. Il serait donc temps de décloisonner l’ethnie exorcisée de ses fausses peurs. Son idéologie tenace est à ranger parmi les vers qui rongent de l’intérieur l’Etat africain.

mercredi 27 août 2008

Bouddhisme et réveil spirituel en occident

Un essor économique soutenu que les crises les plus sévères n’ont jamais arrêté que le temps très court de la réflexion des spécialistes pour y trouver solution, des prouesses scientifiques et technologiques inédites, la postmodernité paraissait avoir définitivement donné confiance à l’homme, enfin maitre et possesseur de la nature, réalisant la prophétie de Descartes. L’homme désormais capable de créer un paradis terrestre qui ne relèverait plus du mythe. L’expérience de cette force démiurgique allait creuser, déjà considérable, le déficit des croyances relieuses abandonnées aux bigotes. L’observance des pratiques religieuses au zénith de la civilisation, synonyme du triomphe de la raison et de l’autonomie de l’homme enfin affranchi du lien à une transcendance qui n’existe pas, fait ringard. D’autant plus que, loin de condamner des valeurs et des pratiques d’un siècle revenu au meilleur niveau de ce paganisme qui affligeait tant les Pères de l’Église primitive, nombre de ceux qui avaient pourtant fait vœu d’annoncer dans sa nudité l’Evangile libérateur, se sont laissé gagner par un discours et des pratiques qui vident notre existence de sens, nous vouant à une vie trépidante et frivole qui soulevait de dégout le cœur de Saint Paul :« buvons et mangeons, car demain nous mourrons ».
Mais voila que le discours et les pratiques hédonistes d’une société repue ont fini par lasser des cœurs inassouvis et inquiets. La civilisation du loisir et du divertissement au sens pascalien du terme n’a pas réussi à étouffer le désir d’éternité et le besoin de croire en une instance supérieure ordonnatrice logée au plus profond de la conscience humaine. Ce désir d’éternité et le besoin de trouver un sens à la geste humaine qui font douter que le bonheur soit limité au bon fonctionnement de notre carcasse et à la satisfaction de nos passions élémentaires expliqueraient ce retour en occident du goût pour les choses cachées, celles que la raison ne peut expliquer, et la ruée depuis une décennie vers le bouddhisme tibétain qui, plus que toute sagesse, avec l’altruisme chassé d’Occident par son économisme, est recherche d’élévation et d’harmonie spirituelles comme but unique de l’existence humaine.
Or, tout l’Evangile est là, que les occidentaux ont abandonné aux primitifs d’Afrique et d’Amérique latine. Le christianisme que leur rationalisme orgueilleux a infantilisé, et dont ils se sont détournés, avait pourtant pendant près de deux millénaires, enseigné à leurs pères ce que maintenant ils croient avoir découvert dans le bouddhisme tibétain qui, autant que le christianisme, est excellence et exigence d’excellence. Pas plus que le christianisme n’est une mode passagère, le bouddhisme tibétain ne l’est. Infatués d’eux-mêmes et façonnés aux valeurs de l’économie libérale, combien de temps nos néophytes du bouddhisme tibétain tiendront-ils dans leur nouvelle foi ? Mais il ne faut jurer de rien ; souhaitons leur d’aller jusqu’au bout de cette merveilleuse aventure et que, éclairés par la sagesse du Bouddha, ils transforment l’Occident malade de son système économique et social.

mardi 5 août 2008

A quelles conditions le développement de l’Afrique

L’Afrique va mal. De plus en plus. L’africain conscient, ou tout simplement celui qui aime l’Afrique, a la douloureuse impression que le recul de ce continent est proportionnel à l’amélioration constante des conditions d’existence dans le reste du monde dit en développement. En tout cas, du point de vue du bien être humain, l’écart ne cesse de se creuser entre l’Occident et l’Afrique Noire. Bénéficiaire intelligent des infrastructures économiques des Boers, l’Afrique du Sud se démarque nettement de cette Afrique où la conjonction de la naïveté, de la ruse et de l’imposture produit ce paysage effrayant qui frappe tout observateur même non avisé. Depuis la fin de l’apartheid, une classe moyenne active émerge de la population noire, même si la situation des townships reste préoccupante. Les causes profondes, les facteurs qui ont fabriqué à l’Afrique noire ce destin terrible ? Nous les connaissons : la traite négrière et la colonisation. Pour longtemps, elles avaient déréglé les rouages sociopolitiques, socio-économiques des pays africains, broyé leur cultures moquées, piégé et perverti le rapport de soi au monde, de la bonne santé duquel dépend l’épanouissement humain. Un gâchis incommensurable dont les chercheurs ne sont pas encore parvenus à révéler toute l’ampleur. Cette situation indique en même temps le devoir de conscience des africains sur l’état de leur société s’ils veulent s’en sortir. Ce n’est pas impossible. Le désordre des sociétés africaines peut être daté. Une séquence de l’histoire de l’humanité lui avait donné un commencement. Il peut donc cesser. Il n’est pas le résultat éternel d’un décret des dieux. Et cela engage la responsabilité des africains et de leurs partenaires.


La traite négrière et la colonisation, si elles furent une cause structurante du désordre africain, n’avaient pas pour autant scellé le destin de l’Afrique. Celui-ci reste déchiffrable A condition que les africains prennent conscience, remontent aux causes de leurs malheurs, et aient le courage de prendre à bras le corps des solutions difficiles. L’identification nous met sur la voie de la guérison, puisqu’on peut alors trouver le remède. Encore faut-il que le patient consente à suivre les prescriptions du médecin ; pourvu que le remède soit adapté. Aucune société ne s’est construite sur la fuite des responsabilités. Aucune société ne s’est construite en tournant le dos au bon sens. Je crains que, en dehors des cercles politiques où son usage est galvaudé pour ne plus rien vouloir dire, le terme responsabilité ait perdu son poids de sens en Afrique noire (nous parlons des affaires bien sur !). Cette Afrique noire où les élites inscrivent leur action dans la logique de prédation et d’exploitation qui avait pourtant nourri leur contestation du régime colonial. Tout en la condamnant de bouche, ces élites politiques reproduisent l’idéologie coloniale d’exploitation cynique, tant elles sont fascinées par l’économie consumériste. Progressivement elles se sont détournées de leur patrimoine culturel dans lequel elles devraient pourtant puiser pour trouver solution à nombre de mots qui assaillent les sociétés africaines. Elles singent le modèle occidental, quitte à s’en détourner avec horreur dès que ce modèle parle de devoir de conscience, de rigueur et montre l’effort individuel et collectif comme base du progrès de l’humanité et des nations.


Le défaut d’éthique citoyenne chez les élites africaines explique qu’elles vivent éjectées en quelque sorte hors d’elles-mêmes et vivent loin des préoccupations des populations dont elles prétendent être les dignes représentants. Des populations pourtant pas si sottes, qui sont passées maitres de la récupération, du recyclage et de l’économie informelle, dont, on peut bien le dire, vivent les masses africaines des bidonvilles et des villages, démontrant par là jusqu’où elles n’iraient pas si elles avaient des dirigeants honnêtes et attentionnés. Nos élites ne s’intéressent à ces populations qu’en permanence elles arrosent de leur arrogance méprisante qu’en période électorale où la voix de chaque femme, de chaque homme vaut son pesant d’or. Ces élites extraverties qui vivent en permanence branchées sur les médias occidentaux et les divertissements qu’ils proposent ne rêvent que de l’Europe. Tous les jours des avions en provenance d’Afrique en sont bondés, où on les reconnait à leur air suffisant. Cela fait qu’elles expatrient en Europe tout le produit de leurs rapines sans souci de l’Afrique à bâtir ; et parce que le développement de l’Afrique est le cadet de leurs soucis, c’est sans vergogne qu’elles la pillent avec la même fureur que hier les colons et depuis les indépendances, les multinationales qui se comportent en pays conquis avec la bénédiction des élites africaines elles-mêmes acquises à l’idéologie et aux valeurs criminelles des multinationales. Ce faisant ces élites sont parfaitement conscientes des haines tenaces que leurs populations nourissent contre elles (il s’agit là bien entendu des pays où sévit la malgouvernance. Des pays comme le Ghana, l’Ile Maurice, le Botswana, une infime minorité, s’en sortent assez bien). Voila pourquoi ces élites s’interdisent d’investir dans leurs propres pays l’argent qu’elles leur volent. Souci bien compréhensible, à tout instant, le produit inespéré de leurs rapines peut aller en fumée.


Seuls donc le respect scrupuleux des principes d’une gestion démocratique capable de régler le problème de l’ethnicisme peut inverser la tendance, provoquer un mouvement centripète de ces élites extraverties et faire naitre l’ordre dans des sociétés sécurisées. L’ordre et la confiance.

jeudi 24 juillet 2008

L’avenir démocratique de l’Afrique noire problématique à court et à moyen terme

L’espoir démocratique suscité au soir du retrait des forces coloniales s’était vite mué en frustrations amères. On peut évaluer celles-ci au regret du petit peuple des villages et des bidonvilles de feue la colonisation, pourtant encore bien présente à leur mémoire. « Quand, disent les pauvres gens, l’indépendance finira-t-elle? » C’est que, champions de l’arnaque et prédateurs sans vergogne, les régimes politiques qui prirent la relève de la colonisation, moins le désordre, héritèrent de celle-ci ses pratiques funestes de gestion économique. Instaurés par de jeunes gens sans expérience politique et peu vertueux pour la plupart d’entre eux, le socialisme et le marxisme ajoutèrent au désordre de l’ethnocentrisme libéré par le départ du colonisateur. Refusant de faire le jeu d’une seule ethnie de celles qui composaient le territoire de la colonie, celui-ci en avait, en effet, neutralisé le venin en les muselant toutes. Incapables d’élaborer un projet de société sensé pour leur Etat pluriethnique et de s’y tenir, les hommes politiques africains venus des ethnies ont le génie funeste de l’organisation du désordre comme moyen de gestion des affaires. La démocratie c’est quand même l’espace social de la réflexion permanente pour trouver le meilleur moyen pour un vivre ensemble le moins heurté possible, sans pour autant museler les libertés.


Au lendemain du discours fameux de La Baule, un vent de démocratisation parcourut l’Afrique entière, soutenu par la promesse du Président de la république française d’accompagner financièrement les efforts des pays qui accepteraient d’instaurer des régimes démocratiques. Les élans des commencements retombèrent bien vite. Les politiciens africains firent en effet vite l’expérience que, pratiquée à la lettre la démocratie n’était pas rentable pour eux. Ils avaient envie de durer au pouvoir, pour la vie si besoin ; ce que n’autorise pas le jeu démocratique sauf si des qualités exceptionnelles du détenteur légitime du pouvoir l’imposent au choix de ses concitoyens. Comme Périclès dans l’Athènes du Ve siècle. Or de tels hommes aux qualités et aux mérites exceptionnels ne sont pas apparus. Mandela est passé comme un météore. Seulement des hommes dotés d’un appétit exceptionnel du pouvoir et doués pour la manipulation. C’est un bien piètre génie, et malfaisant.


Le retour au parti unique faisant ringard et appelant bientôt la réprobation de l’Occident qui a gardé un œil sur l’Afrique, il fallait jouer le jeu tout en se moquant pas mal de la démocratie. C’est ainsi que sous le label démocratique, sont apparus des régimes à la vérité dictatoriaux où la peur et l’intimidation sont les grands moyens de la gestion des affaires. Intimidation d’une opposition qui n’existe que pour le principe, et dont, de toute façon, les consciences sont achetées. Mais existe-t-il une saine démocratie vénale ? Rétrécissement croissant de l’espace public d’expression où en démocratie en principe le citoyen se façonne et se libère, bref, revendique et conquiert ses droits.


Peut-on parler de démocratie là où sans mandat du peuple souverain, des groupes s’octroient des droits qui les placent au dessus du peuple souverain moqué et floué ? Dans les démocraties africaines le groupe culturel d’appartenance du détenteur du pouvoir, et bien entendu sa famille biologique apparaissent comme les dépositaires légitimes du pouvoir du peuple dont ils se réclament sans vergogne. Ils se croient habilités à parler en son nom, et bien entendu, en réclament tous les privilèges. Les démocraties africaines sont des démocraties ethniques. La différence les effarouche. Elles rêvent d’une homogénéité de l’espace politique qui se ferait sous la forme de l’identité ethnique. C’est pourquoi le détenteur du pouvoir a pour assise de ce pouvoir le groupe culturel auquel il appartient. Il l’instrumentalise pour son maintien au pouvoir. Et comme il a peur du vote du peuple, il dresse son groupe d’appartenance contre ce peuple constitué par les autres groupes, qui du coup deviennent ses adversaires politiques, presque ses ennemis. Voila pourquoi il convainc son groupe d’appartenance de l’hostilité de ces autres groupes, qu’il lui montre en permanence complotant contre lui. Le chef d’état africain est un partisan ethnocentriste qui gouverne et se maintient au pouvoir par le spectre de la guerre civile qu’il agite en permanence. L’horreur de la guerre dans les pays où elle a pu avoir lieu, rend alors les populations dociles et les dispose peu à revendiquer leurs droits bafoués.


Des progrès de la démocratie en Afrique sont impossibles ou du moins difficiles, si on ne tient compte d’un paramètre : la complexité culturelle des Etats africains. Impossible ou du moins difficile de parvenir à leur harmonisation si on ne trouve des mécanismes de régulation de leur différences, source permanente de conflits. Impossible si des valeurs et idéaux communs ne sont trouvés et des institutions librement mises en place. Impossible si aucune autorité politique ou morale, morale et politique ne veille à leur respect. Impossible tant qu’il existera des gens ou des groupes de gens qui ne se sentent pas concernés par la loi que le peuple souverain s’est donnée. Impossible enfin aussi longtemps que les politiques africains n’auront pas, un minimum le sens de l’Etat souverain qu’ils confondent avec leur patrimoine personnel. Mais la démocratie est un processus, une éthique de la liberté et du comment vivre ensemble. Seule une saine éducation la promet et la promeut.

vendredi 11 juillet 2008

Le Premier Ministre espagnol en appelle à la conscience de l’Europe devant le naufrage des candidats africains à l’immigration

Si nous n’aidons pas l’Afrique dans son combat contre le désespoir, c’est notre notion de progrès qui devra être révisée. C’est la déclaration en substance du Premier Ministre espagnol le 10 juillet 2008 à la suite d’un nouveau naufrage de clandestins africains. Les espagnols accourus pour secourir les rescapés ont été vivement émus, horrifiés, effrayés de trouver parmi eux de nombreux enfants en bas âge. Geste éminemment humain. N’a plus compté que les hommes à sauver. De façon spontanée le problème des papiers n’est plus venu à l’esprit de personne. Les rescapés à bout de force ont été portés à bout de bras comme des frères, spontanément. Et même un cellule psychologique a été mise en place pour des mères désespérées d’avoir perdu leur enfants. Le geste est digne d’une grande Espagne, humaine, fraternelle, communiant à la douleur et à la souffrance des désespérés.


Pendant combien de temps Sarkozy et Hortefeux ameuteront-ils encore la France et l’Union Européenne contre les immigrés dont il serait temps que l’Europe prenne conscience de la profondeur du désespoir et du bien fondé des aspirations ? Jusqu’à quand la conscience des Français restera-t-elle insensible et aveugle à une tragédie que seule un politique humaine et des lois inspirées par le destin solidaire de l’humanité peut arrêter. Une telle rigueur du sarkozysme pour protéger quelle civilisation et quelle économie, auxquelles une intelligence imaginative a vite trouvé solutions aux problèmes qu’elles posent ? Jusqu’à quand les contradictions entre l’éthique et le politique seront-elles toujours surmontées au profit du politique ? c’est en substance la question que posse le Premier Ministre espagnol pris de nausée devant les affres des clandestins contre lesquels la France de Sarkozy se croise pour réveiller la France au péril des immigrés et convaincre à rallier à ses positions les pays de l’union Européenne que des scrupules de conscience retiendraient encore. Et le Premier Ministre choqué, scandalisé que de lois inhumaines soient édictées contre des humains, de rappeler à ses pairs qu’une Afrique que l’Europe cesserait de piller pour enfin se résoudre à l’aider dans sa volonté de se construire, se détournerait de l’horizon européen.


Ce sont là propos de bon sens. Mais aussi longtemps que l’Occident ne mettra pas fin à sa politique africaine de prédation et n’aidera pas les africains à construire des Etats modernes, et tant que des potentats, rois fainéants accrochés à un pouvoir de droit divin continueront à gérer l’Afrique comme un bien familial (et encore que le droit veuille qu’on gère en bon père de famille !), rien, pas même la mort n’arrêtera les africains poussés par le désespoir. Ils continueront de fuir les tragiques conditions d’existence de leur pays.



Dominique Ngoie-Ngalla, Philippe Ngalla-Ngoie

mardi 24 juin 2008

Les fondements sociaux historiques des incohérences et du désordre de l’Afrique contemporaine

Jetant un regard sur l’Afrique noire du haut des Lumières, catégorique, Hegel ne lui donne aucune chance. Il la voit « couverte de nuit noire ». La vie de l’esprit y est impossible. Le verdict est sans appel. Quelques décennies plus tard, et résolument optimistes, les anthropologues du premier courant évolutionniste (Morgan et Taylor) réfutent la thèse du philosophe allemand. Pour eux les Noirs d’Afrique et toutes les sociétés similaires pour présenter des différences nettes par rapport à l’occident civilisé, n’en sont pas moins inscrits dans le même schéma d’évolution de l’humanité que l’occident. L’Afrique noire et ces autres sociétés sont donc « perfectibles ». Avec de la bonne volonté elles sont parfaitement capables de se hisser au niveau des sociétés occidentales les plus avancées : l’Angleterre victorienne et la France de la République. Le processus d’évolution de ces attardés prendra certes du temps, puisqu’ils devront traverser tous les stades d’évolution par lesquels l’occident était passé. Mais qu’importe le développement est au bout.
Ces anthropologues oubliaient une chose : en raison des grandes différences des contextes sociohistoriques de déploiement de la conscience et de l’esprit séparant l’occident et l’Afrique noire, le chemin des africains pour accéder au développement allait s’allonger considérablement. A la différence de l’Occident le destin de l’Afrique noire fut en effet exceptionnellement sinistre et féroce. Mettons à part son tragique isolement qui la tint loin de tout contact fécondant avec les grands courants de l’Histoire : l’Inde bouddhique, la Grèce des philosophes et des chercheurs, la Mésopotamie avec ses hardiesses intellectuelles, le Christianisme avec sa révolution religieuse et ses principes de rupture avec toutes les traditions, mais pour des raisons géographiques, contraint de ne pas aller plus loin que l’Egypte et l’Ethiopie. Pour des raisons géographiques là aussi, l’Egypte même ne put vraiment rayonner au-delà de la Nubie voisine. Son influence sur l’Afrique profonde resta donc dérisoire. Les explorateurs occidentaux du milieu du 19e siècle tombèrent sur une Afrique noire sahélienne, pourtant relativement proche de l’Egypte par la géographie et le milieu physique, à peine sortie de l’Age de pierre. Malgré l’architecture de leurs mythes, philosophiques à rappeler un certain Platon, les Dogons ne dépassent pas la technique de construction des troglodytes. Une civilisation balbutiante aux techniques rudimentaires qui autorisent à penser qu’elles n’eussent pas été telles si l’Egypte avait réussi à la pénétrer de son influence et de son génie. Ou alors il faudrait formuler l’hypothèse d’une terrible régression qui aurait ramené à l’Age de pierre une Afrique noire parvenue grâce à l’influence de l’Egypte à un stade d’organisation économique supérieur. Régression, mais il faudrait le prouver.
Deux siècles avant que ne commence la Traite des Noirs Ibn Battuta tombe sur des sociétés africaines noires du Sahel dont le niveau d’organisation n’était pas fameux. La traite arabe puis la traite atlantique profitent donc de ce faible niveau de civilisation pour opérer les prélèvements qu’elles voulaient. La traite sous ces formes eut été probablement impossible avec un meilleur niveau d’organisation des sociétés africaines. Les rapports de force entre l’occident, les arabes et l’Afrique ne laissaient pas beaucoup de chances à l’Afrique pour résister à un étranger qui leur voulait tant de mal. Pour l’Afrique l’entrée en modernité représentée par les arabes et l’Occident avec leurs sciences et leurs techniques s’opérait sous de fâcheux auspices. Jusqu’à l’avènement des deux traites et de la colonisation, l’Afrique était restée en jachère en quelques sortes. Rien n’avait encore compromis le développement de ses capacités intellectuelles et spirituelles. Un contact moins rugueux avec l’étranger les eut vraisemblablement épanouies. Leur broyage par la traite des esclaves et la colonisation laissa l’Afrique choquée ; jusqu’aujourd’hui. Le genre de névrose que décrivent Frantz Fanon et Albert Memmi n’est pas de celles qu’on guérit en quelques séances psychanalytiques. Encore que cette Afrique choquée par plus de quatre siècles de violences continuées n’ait pas vu accourir à sa rescousse nulle cellule psychologique. Les perturbations psychologiques profondes allaient donc se maintenir et se renforcer de génération en génération. Perturbation du rapport à soi et au monde, le manque de confiance en soi, une conscience malheureuse et la souffrance de n’être pas l’individu que le Blanc reproche au Nègre de ne pas être. Tout cela allait être pour le Noir africain source de tant d’incohérences dans le système de représentations et de pratiques. Et cela explique ces logiques tordues dans la gestion des affaires humaines confiées à des paranoïaques fonctionnant par ailleurs sans le support indispensable d’une solide tradition des choses du pouvoir d’Etat. Ce qui a sauvé l’Asie de la débâcle coloniale c’est de n’avoir pas fait l’objet d’une traite des esclaves, et aussi et d’abord, l’existence d’une tradition forte du pouvoir d’Etat, qui en Afrique fut ruiné par la traite des esclaves (à supposer qu’une telle tradition avait existé). Une tradition du pouvoir d’Etat, pour sa fidélité, appuyée sur des textes écrits. Moyennant quoi loin d’être aujourd’hui prostrée comme l’Afrique devant l’expansion arrogante de l’Occident, l’Asie lui tient au contraire tête et même menace son hégémonie. C’est une Asie psychologiquement sereine et ayant confiance en elle-même et qui sans complexe frappe aux portes du futur. Cette confiance que même arrimée à la puissante Egypte, l’Afrique subsaharienne aura du mal à retrouver, tant les séquelles du traumatisme de la traite sont partout présentes Mais c’est une Asie qui n’a pas derrière elle les horreurs de l’histoire africaine. En Afrique le vieux traumatisme laissé par la traite des Nègres et la colonisation est toujours là, qui de façon sournoise accule l’Afrique au bricolage. C’est lui qui est à l’origine de tant de comportements et de choix éthiques qui n’honorent pas l’Afrique. Et lorsqu’il affecte la conscience des dirigeants dans des pays de faible démocratie, on peut mesurer l’ampleur du désordre actuel et à venir d’autant plus que à la manière d’un lutin décidé à ne pas la laisser tranquille l’Occident, le mauvais ami, continuellement lui joue des mauvais tours.

jeudi 22 mai 2008

L’enfer des africains de couleur à l’étranger : le silence des politiques

L’individualisme, c’est bien connu, est la marque distinctive des pays industrialisés du nord.
Chacun pour soi. L’Etat cependant veille au destin de chaque citoyen. Le sens du devoir est au centre de ses préoccupations. C’est lui qui assoit la légitimité des élus du peuple choisis sur la base de la disponibilité à se mettre au service de leurs concitoyens ; de leur capacité à répondre à leurs sollicitations. Et pas de différence à faire entre ceux qui résident dans leurs pays et ceux qui résident à l’étranger, ou même simplement qui y sont en voyage. Et c’est pour cela que des agents officiels, ambassadeurs, consuls, sont établis dans des pays étrangers, avec entre autres missions de protéger les ressortissants des pays qu’ils représentent. L’avancement de ces agents officiels dans leur carrière est fonction du sérieux qu’ils mettent dans l’accomplissement de leur mission. Se présente-t-il une situation mettant en danger la sécurité des ressortissants de leur pays, ils en saisissent les autorités dans l’immédiat. Dans les heures, les jours qui suivent, la diplomatie se met en branle, à la recherche de solutions. Les autorités politiques au niveau le plus élevé de l’Etat du pays concerné s’en mêlent volontiers. On a vu le Président Sarkozy intervenir personnellement au Tchad dans l’affaire de « L’arche de Zoé ». Des citoyens français sont-ils assassinés en Mauritanie ? le ministre des Affaires Etrangères français agite aussitôt l’opinion internationale. Dans des délais très courts les assassins sont rattrapés et arrêtés. La séquestration d’Ingrid Betancourt par les maquisards de Colombie empoisonne le sommeil du président de la république française et des français. On pourrait continuer.

Les pays du Nord administrent ainsi aux pays du Sud qu’on voit très peu se mobiliser lorsque leurs ressortissants à l’étranger se trouvent en difficulté une belle leçon de responsabilité et de solidarité citoyennes. On a alors le droit de se poser des questions sur la signification du lourd silence de ces pays devant des situations qui en principe réclament d’eux une rapide et énergique intervention. Il ne se passe pas de mois, qu’en Europe, dans les pays avec lesquels ces pays du Sud ont des accords de coopération, dans les pays arabes du Maghreb, membres pourtant de l’Union Africaine, des étudiants ou des travailleurs immigrés d’Afrique noire et pas toujours en situation irrégulière ne soient victimes de violences raciales graves (des blessées graves, des morts mêmes). Bouche cousue dans leurs pays, bouche cousue à l’Union Africaine. Le cadet de leurs soucis ! Mais alors il faut penser que derrière cette insouciance ingénue il y a un problème. Ignorance de ces pays du Sud que le premier devoir de l’Etat c’est de garantir la sécurité de ses ressortissants, tous ses ressortissants, y compris ceux qui se trouvent à l’étranger, à la demande parfois de l’Etat lui-même : les étudiants, les stagiaires de tous horizons. Si c’est par ignorance, il faut alors plaindre ces pays africains, puisqu’ils ignorent le B.A-BA de leur mission. Timidité et peur du blanc (séquelles du traumatisme de la Traite négrière et de la colonisation ?). Probable !. Ces deux sentiments expliqueraient la reculade des pays africains devant les Blancs du nord auxquels il faut bien associer les arabes du Maghreb. Entre ces méditerranéens du sud et les méditerranéens du nord qui voit la différence ? Et à égalité ils furent tous les fossoyeurs de l’Afrique noire. Au point que c’est faire injure à un marocain, un algérien, un tunisien que de l’appeler africain.

Les africains qui pendant des siècles et des millénaires avaient souffert du racisme des arabes semblent en avoir gardé dans les replis de leur âme un souvenir trouble et effrayant qui continue à hanter et à subvertir leur rapports avec leurs partenaires de l’Union Africaine. Cela fait que lorsque des étudiants ou des stagiaires sont victimes d’actes de discrimination raciale dans les pays du Maghreb les autorités de ces pays ne bronchent, pas assurées que leurs homologues nègres des pays sub-sahariens s’accommodent d’une situation à la quelle elles se sont depuis longtemps résignées.
Nous venons de pointer l’ignorance de leur devoir citoyen comme étant la cause du silence des pays africains devant des situations où leurs ressortissants à l’étranger sont en danger, c’est probable, puisqu’ils ne réagissent pas plus lorsque ces situations se présentent en Afrique noire même

dimanche 20 avril 2008

Césaire, Nègre et africain jusqu'au bout

On a dit qu'il avait refusé le Nobel et l'Académie Française. Ça lui ressemble! Un énorme orgueil de race. Il n'est pas sûr que si on lui avait proposé, suprême honneur, le Panthéon, dont presque à l'unanimité la France maintenant le juge digne, il eût refusé, fidèle jusqu'au bout aux engagements de la négritude: "Nègre je suis, Nègre je resterai", fier d'être nègre, "entièrement français sans doute, mais français entièrement à part" comme il se plaisait à le répéter. Pour lui, recevoir les honneurs du Nobel, de l'Académie Française et du Panthéon, c'eût été se renier comme Nègre; refuser de se reconnaître de sa race, la race maudite par l'occident bien pensant, et que justement, pour cette raison, au détour d'une "bienfaisante révolution intérieure", il "accepte sans réserve…entièrement sans réserve" (Cahier d'un retour au pays natal). Cette race toute recouverte de "laideurs repoussantes" (Ibid.), et qu'"aucune ablution d'hysope et de lys mêlés ne peut purifier" (ibid.), il l'accepte et en honore jusqu'à ses laideurs parce qu'il "est beau-et bon-et légitime d'être-nègre" (ibid.).

René à l'âme noire au terme d'une longue et profonde maturation "comme le philosophe platonicien meurt à son corps pour renaître à la vérité" (Senghor, Orphée Noir, Situations III), Aimé Césaire repousse d'instinct des propositions qui sonnent à ses oreilles, s'il les acceptait comme une trahison de ses options philosophiques centrales. Et s'il devait les accepter ce serait à une seule condition: que l'Occident reconnaisse à la race noire tout entière et lui restitue sa dignité dont des siècles d'abrutissement et de brutalité l'avaient déchue. Proposer le Nobel, l'Académie Française et le Panthéon à celui qu'un anathème injurieux avait de façon tacite frappé d'ostracisme, interdisant de le faire figurer dans les manuels de littérature française (Lagarde et Michard, Castex et Surer, par exemple) et d'être enseigné en Martinique même, chez lui, suprême hypocrisie d'une métropole qui a du mal à se déniaiser pour éduquer son regard et sa conscience et ainsi cesser de classer les Nègres dans la catégorie des races inférieures. Jules ferry avait confié la propagation de l'aberrante idéologie à des instituteurs zélés. La France et l'Occident ont retenu la leçon. Le zèle de Sarkozy et la frénésie d'Hortefeux à expulser les Nègres s'expliquent ainsi. Aimé Césaire ne pouvait l'oublier. Il a vécu tout cela dans sa chair et dans son âme. Aimé Césaire ne pouvait le pardonner. Aimé Césaire le martiniquais, qui toute sa vie aura rappelé aux siens tentés d'oublier leur sinistre trajectoire qu'ils étaient d'abord nègres et africains, et que par conséquent -ils ont tendance à l'oublier-, ils avaient cause liée avec les Nègres d'Afrique.

dimanche 6 avril 2008

Immigration inquisition la honte de la France : un jeune malien de 29 ans en situation irrégulière pourchassé par la police se noie dans la Marne

Même s’il s’agit des noirs qu’on ne peut aimer sans éducation et sans exercice, ce n’est pas en perpétuant des pratiques par lesquelles les nazis ont à jamais déshonoré la mémoire de l’humanité que la France maintiendra dans le monde l’enviable réputation d’amie des hommes et de défenseur des droits de l’Homme que, sans l’avoir vraiment jamais prouvé, elle s’était taillée tout au long des âges. Le problème de l’immigration a surgi dans ce siècle sans amour, inventé par des politiques occidentaux sans imagination pour trouver des solutions dans des contextes sociaux-économiques difficiles. Alors des boucs émissaires étaient tout trouvés : les nègres et les arabes, d’abord, le reste des immigrés pauvres ensuite, sauf les américains qu’on ne chasse impunément, même pauvres. Déjà rejetés pour leur couleur de peau sur laquelle l’immonde imagination des Blancs brode à satiété, les Noirs par euphémisme appelés « hommes de couleur », et les maghrébins n’avaient aucune chance d’être regardés avec sympathie dans cet occident et dans cette France là où la gauche elle-même n’a pour eux qu’une politique molle dont s’encouragent la droite et l’extrême droite xénophobes.

Probablement choisi pour sa brutalité et son irrespect envers les Noirs, Hortefeux, le féroce ministre de Sarkozy peut ainsi mener contre les Noirs de France trouvés sans titre de séjour sa politique d’inquisition. Beaucoup en sont restés mutilés à vie ; quelques uns, dont cette chinoise défenestrée et ce jeune malien noyé dans la Marne, en sont morts ; sans que l’impitoyable ministre au cœur de Pierre mette fin à sa chasse aux immigrés, et modifie d’un iota sa politique. Sa politique de délation et de pièges. D’autant que, d’accord avec ces pratiques inhumaines exercées contre leurs propres concitoyens les politiques des pays des victimes se taisent. Des gens à l‘esprit mal tourné y voient comme au temps de leurs aïeux choqués par les brutalités de la traite des noirs et du colonialisme, la peur atavique du Blanc. En Afrique noire, en dehors de Wade qui de temps en temps explose en face du scandale, Bongo Ondimba seul se dresse et tient tête au Blanc.

Tout en regrettant que ce soit là la seule conduite possible pour ramener le blanc au bon sens et à la raison, on est tout de même fier que cet homme applique contre les français qui expulsent ses concitoyens la loi du talion : contre trois gabonais expulsés de France et molestés comme de dangereux malfaiteurs, trois français du prestigieux secteur pétrolier en situation irrégulière. La réciprocité est seule payante ici, qui rétablit la dignité du Noir.

La politique xénophobe de la France aura imposé cela à un homme qui a du tempérament et le sens de l’honneur. On peut regretter que pour un vieux pays d’occident, et qui se donne pour le plus civilisé du monde, et donc qui a pour l’homme ce merveilleux élan de solidarité fraternelle qu’ont chanté ses meilleurs poètes, il faille de telles situations pour cesser de se comporter en goujat vis-à-vis des « gens de couleur » en lesquels une grande partie de sa population refuse de voir des êtres humains dignes d’estime et d’abord de respect.

Hortefeux, que pour le malheur de son image et de sa politique, Sarkozy a fait entrer en son gouvernement est de ces français qui n’aiment pas les Noirs ; qui les détestent et les méprisent. En France ils ne sont pas les bienvenus. Et si je me trompe, il faudrait plaindre ce pauvre Hortefeux, puisqu’il serait méchant contre sa propre conscience, qu’il aurait alors tellement chargée et tellement torturée à pourchasser avec un acharnement diabolique les nègres et autres sans papiers qu’il en perdrait le sommeil.

lundi 18 février 2008

L’inculturation du christianisme en Afrique : des enjeux idéologiques dissimulés derrière une démarche pastorale. (*)

Faire participer activement les cultures africaines à la vie de l’Eglise africaine et du coup dilater l’Eglise universelle aux dimensions culturelles de l’Afrique. Tels sont les enjeux de départ de ce courant de pensée appelé inculturation ; qui concerne en fait toutes les chrétientés du tiers monde auxquelles l’Eglise avait par souci d’uniformité imposé un christianisme tout moulé dans les catégories des cultures occidentale et juive. Le concile Vatican 2 qui place au centre de ses préoccupations la volonté d’une plus grande ouverture de l’Eglise au monde encourage l’initiative. Sans se douter des risques de débordement auquel expose le flou d’un concept qui rend possibles mille glissements de sens, mille interprétations. D’autant plus que pour les africains ce courant de pensée naît dans la décennie qui suit l’ivresse des indépendances. Aucune surprise par conséquent que socialement et historiquement datée, l’inculturation chausse parfois les bottes d’une petite révolution et empreinte la rhétorique dénonciatrice et revendicatrice du combat de l’élite africaine contre l’impérialisme sous toutes ses formes. Cet ainsi que l’inculturation présente des traits de famille avec ces courants de pensée qui agitent l’opinion politique africaine. Optimiste et joyeuse comme eux, l’inculturation avance bardée de confiance naïve en l’avenir. Mais un avenir qu’elle se garde bien d’interroger. C’est ainsi qu’elle passe à pieds joints les enjeux prioritaires du chrétien : le courage d’incarner les valeurs évangéliques de justice, de partage et de paix dans une société africaine terriblement injuste et violente ; le combat citoyen pour la redéfinition du lien social malgré le discours officiel resté primaire et ethnique, source permanente de conflits et de guerres civiles. C’est pourtant ici qu’on attendait l’inculturation du christianisme qui se contente pour l’instant d’être une machine à produire des émotions collectives fortes, sans objet qu’elles-mêmes. Même si le prêtre ou le pasteur affirme que c’est pour la plus grande gloire de Dieu. En tout cas l’impressionnante ferveur des célébrations liturgiques paraît sans effet notable sur la qualité d’une spiritualité terre à terre, de plus en plus tournée vers la demande de satisfaction de besoins matériels et la protection contre le mauvais œil. L’inculturation paraît au contraire encourager l’ardeur de croyances sorcellaires. On attendait d’elle un sens chrétien toujours plus aigu du devoir et de la responsabilité sociale. Contre ces urgences l’inculturation paraît avoir opté pour la facilité qui peut se résumer en cette esthétique bruyante des célébrations du culte dont l’unique avantage est peut-être de divertir des fidèles qui s’ennuieraient sans cette dimension festive de la célébration. Grâce à l’inculturation l’Eglise africaine n’est pas triste. Mais à l’allure pédalée où va le processus il y a tout lieu de craindre qu’ils nous fabriquent une Eglise africaine du divertissement.

Ainsi militante et joyeuse, l’inculturation du christianisme en Afrique n’a pas dû décevoir ceux qui attendaient d’elle une Eglise africaine marquée du sceau d’une sorte de jeunesse éternelle, insouciante, où l’émotion en permanence explose. En quelques décennies elle a été capable de produire des formes d’expression inédites du religieux chrétien, conformes, dit-on à la sensibilité et à la vision du monde nègres. Il faut espérer que ceux qui travaillent à enrichir l’Eglise universelle d’une touche africaine se rendront compte un jour de leur erreur et s’efforceront de donner à l’Eglise africaine un visage plus digne conforme à l’idée élevée qu’on se fait de Dieu, dont le chrétien doit prendre garde d’oublier que ce Dieu a pour propriété essentielle d’être ombre et mystère. Parlant de la maison de Dieu, le psalmiste est saisi par toute son âme et dit terribilis est locus iste, c’est endroit est terrible ! La parole du vieux psalmiste paraît avoir inspiré un poème de Victor Hugo l’agnostique. Dans ce poème de coloration étrange le poète esquisse une description du séjour de Dieu où avait hâte d’aller Jean l’apôtre fatigué de la terre et des hommes :

Un jour, le morne esprit, le prophète sublime qui rêvait à Patmos et lisait frémissant de si lugubres mots dit à son aigle : ô monstre, il faut que tu m’emportes, je veux voir Jéhovah.
L’aigle obéît, des cieux ils franchirent les portes. Enfin Jean arriva.
Il vit l’endroit sans nom dont nul archange n’ose traverser le milieu.
Et cet endroit redoutable était plein d’ombre à cause de la présence de Dieu.

Les messes des églises africaines seraient probablement moins dansantes et moins prosaïquement festives si les fidèles avaient un peu plus de foi et d’abord l’intuition de l’infinie grandeur de Dieu. L e mystique en reste sans voix. Pascal on se souvient en était effrayé. Or, c’es triste à force de fantaisie et de représentation anthropomorphes de Dieu, l’inculturation a fini par désacraliser l’espace du lieu de culte. On s’y déplace désormais comme on le fait sur n’importe quel espace public. La messe par exemple n’est plus le déroulement pathétique d’un drame, mais un moment festif pendant lequel il n’est pas interdit de s’abandonner aux ondulations de la danse !

Des auteurs qui se sont exprimés sur cette question de l’inculturation du christianisme en Afrique on attendait qu’ils nous parlent des choses graves de la foi et du combat social qu’elle implique. On note malheureusement une forte tendance à se focaliser sur l’accessoire. Je nomme accessoire le souci de distinction de l’Eglise Africaine par des pratiques cultuelles particulières dont on peut se demande on quoi elles favorisent l’élévation de l’âme. On brode sur des touches culturelles typiquement africaines dont il est douteux qu’elles soient pour l’Eglise un enrichissement. Le procès qu’on fait à l’Eglise missionnaire d’hier qui eut le mérite d’être exigeante en matière de célébration du culte est certainement un mauvais procès. Cette Eglise là nous a donné à force d’exigence des hommes et es femmes remarquables par la pureté de leur foi et la dignité de leur vie. Emile Biayenda aujourd’hui donné en modèle de vie chrétienne en était. La piété bruyante dont on fait une propriété des cultures et des religions africaines est en fait une injure aux africains. Ceux-ci ne sont pas incapables de piété recueillie. Ceux-ci ne sont pas capables de communiquer, même avec Dieu que dans le bruit. L’enquête historique et anthropologique apporte un démenti formel à des affirmations péremptoires. En revanche, c’est vrai de l’Eglise africaine post coloniale fortement marquée par ce siècle de la postmodernité qui célèbre l’insignifiance et fait l’apologie de la frivolité, corrélativement à l’affadissement de la foi, à l’évaporation du sens du mystère et de la transcendance, relayés par un sacré de substitution : la politique, le sport où les stars sont vénérées à l’instar des divinités.
Il faut donc en convenir, les partisans de l’inculturation volontariste du christianisme en Afrique ont derrière la tête autre chose que le simple souci de spiritualité qui avait été pour Vatican 2 un grand enjeu. A partir du moment où les intellectuels, blessés par une histoire de l’Afrique difficile, entrent en lice et en font leur problème, l’inculturation que tout le monde comprend comme l’aventure du message chrétien à travers une culture devient pour eux lieu de pouvoir, position privilégiée pour faire passer des idées, des significations et des valeurs personnelles, mais présentées comme étant les valeurs et les aspirations de tous les africains. Le petit peuple des paroisses adhère avec d’autant plus d’enthousiasme aux propositions de l’élite qu’il lui voue une admiration dévote et sans bornes. Pour la masse des fidèles, en affirmant la négrification des formes d’expressions du christianisme comme condition d’encrage du christianisme en Afrique, le clergé et l’élite disent la vérité. Rien de plus faux. Portant sur les valeurs universelles, même coulé dans les schémas et les catégories de pensée des philosophes et des théologiens de l’occident, l’essentiel du message chrétien parle à l’esprit et au cœur de tous les hommes. Et puis, il y a de la contamination de l’exemple. Le rayonnement attractif d’un modèle qui fait que le témoin de l’Evangile peut se passer de la parole articulée, sa façon de regarder la vie et de la vivre ne laisse pas indifférent. Et tôt ou tard, amène tel homme, telle femme à se poser des questions qui peuvent être le point de départ d’une conversion. Le père de Foucault passe de nombreuses années au désert du Sahara; y mène une vie d’ascète et de contemplatif. Pas de prosélytisme. Il vit sa foi en silence. Le résultat dans l’immédiat c’est que parmi tant d’arabo-berbères musulmans au milieu desquels il s’était installé, il ne réussit à convertir que Paul son domestique.
Pour qui aurait jugé l’action de cet ermite dans le court terme qui n’est généralement pas le temps de la conversion, l’échec est patent. Mais voici que longtemps après la mort du père de Foucault, Tamanrasset où il avait planté son ermitage, devient le foyer d’une intense vie chrétienne animé par des musulmans qui se convertissent en masse, sans qu’une berbérisation des formes d’expression du christianisme ait été nécessaire. Le christianisme romain un peu sec et froid si éloigné de leur culture, les arabo-berbères de Tamanrasset l’adoptent pleinement. Il est juste marqué par la ferveur mystique des gens venus de l’Islam. Ayant compris d’intuition l’essentiel du message du christianisme, à la différence des clercs de l’Eglise africaine, les arabo-berbères de Tamanrasset ne font du combat pour une libre expression culturelle de ses formes d’expression la condition de naissance d’une Eglise arabo-berbère. Elle est arabo-berbère et chrétienne dès l’instant où ses fidèles sont de culture arabo-berbère. C’est un peu comme au théâtre : la même pièce de Racine, de Corneille ou de Ionesco aura autant d’interprétations de génie qu’il y aura de troupes de talent d’origines diverses à la jouer. C’est pourtant la même pièce, c’est pourtant le même texte ! C’est donc que l’inculturation tapageuse du christianisme en Afrique noire est liée à l’histoire tourmentée de ce continent.

En leur donnant un caractère négroïde, les formes d’expression du christianisme deviennent le lieu d’affirmation de l’identité nègre longtemps niée par l’occident chrétien. En revanche les pays musulmans même d’Afrique noire, qui n’ont pas avec l’Islam le lien colonial que les chrétiens d’Afrique ont avec le christianisme, ces pays là ne semblent pas ressentir le besoin de faire de l’inculturation de l’Islam une condition de son ancrage dans leur société. Résultat : unité de foi, unité deses formes d’expression dans les sociétés et les cultures les plus diverses et les plus différentes les unes par rapport aux autres. Aussi, de Dakar à Jakarta, d’Islamabad à Casablanca et de Casablanca à l’Ile Maurice, mêmes gestes rituels, mêmes paroles rituelles pour dire et célébrer le même Allah ! Chez les chrétiens c’est plutôt Babel !

On peut donc se demander si ce désir et cette volonté de personnalisation de l’expression de la foi au sein de l’Eglise universelle eussent été possibles ou du moins se fussent manifestés avec la même force sans un regard rétrospectif sur un passé d’humiliations et de frustrations, sans le souffle des indépendances et d’abord le cri de révolte de la négritude, avec sa demande pressante de reconnaissance de la culture nègre. De la négritude comme courant de pensée, elle a, en effet les humeurs et les audaces. Les ambigüités et les hésitations. Combattant de l’inculturation de la foi chrétienne, Meinard Hegba ne fait pas mystère de ses attaches à la négritude dans ses revendications les plus radicales : « le christianisme œcuménique, écrit-il, doit prendre chez nous une saveur pimentée ; il doit même, et ceci est postulé par son anti-impérialisme culturel, être influencé par la négritude » (Meinard Hegba, Christianisme et négritude, in Des prêtres Noirs s’interrogent, Présence Africaine).
Ainsi juste pour se singulariser, comme la négritude, les promoteurs de l’inculturation réclament jusqu’aux carences de la culture africaine. En tout cas dans le texte cité nous retrouvons les grands enjeux de la négritude « née en nous, écrit Alioune Diop, du sentiment d’avoir été frustrés au cours de l’histoire, de la joie de créer et d’être considérés à notre juste valeur ; la négritude n’est autre que notre humble et tenace ambition de réhabiliter les victimes et de montrer au monde ce que, précisément, l’on avait spécifiquement refusé : la dignité de la race noire. » (Alioune Diop, Deuxième congrès des écrivains et artistes noirs, Présence Africaine numéro 24-25, pp 42-43). Pour Julien Penoukou « inculturer signifie insérer le message chrétien dans une culture, y adhérer avec ses modes de penser d’agir, de vivre, avec ce qu’on est et aspire à être » (Efoue Julien Penoukou, L’impératif de l’inculturation de la foi chrétienne. Bulletin de Théologie africaine volume 5, numéro 10, juillet-décembre 1983). Sans doute, mais de telles affirmations portent dans leurs flancs quelques ambiguïtés et ne s’accordent pas toujours avec l’évangile ; puisque c’est à notre capacité à nous séparer d’avec les idéologies de notre culture que le christ nous reconnait comme ses disciples. Cette prise de distance d’avec nos cultures idolâtrées est le signe du chrétien « voila, rapporte l’évangéliste que tes disciples font ce qu’il n’est pas permis de faire le Sabbat »t, (Mathieu.12,2). Et plus loin, « pourquoi tes disciples transgressent-ils la loi des anciens ? », (Mathieu. 15,2).
La principale préoccupation des partisans de l’inculturation volontariste devrait être, semble-il, comment dans une exigence constante de lucidité, un arrachement à soi de tout le corps et la volonté généreuse d’ouverture, avec le souci permanent de la mesure et du goût, comment ajuster les valeurs de l’évangile et celles des cultures africaines en constante évolution ? Comment faire pour surmonter leurs désaccords là où il y a désaccord ? Comment faire pour surmonter leurs désaccords là où il y a désaccord ? Sans chipoter sur la question de savoir si d’avoir été moulé dans les catégories culturelles de l’occident, le message chrétien reste accessible ou non aux africains. Nous venons de voir que du temps de l ’Eglise missionnaire, ces différences ne furent pas tellement un obstacle. L’acceptation humble d’une telle éthique éviterait à l ’Eglise africaine bien des fantaisies inutiles et bien des gesticulations grotesques.



Dominique Ngoie-Ngalla



* : Conférence prononcée au colloque universitaire Emile Biayenda, tenu à l’Institut catholique de Paris, les 14 et 15 février 2008.

Par Dominique Ngoïe Ngalla et Philippe Cunctator qui nous livrent leurs réflexions sur le monde d'aujourd'hui : de l'Afrique clopinant sur le chemin de la modernité au reste du monde, de la complexité des enjeux politiques aux péripéties du fait religieux, nous découvrons sous la plume de Dominique l'âme du poète qui rêve d'un autre monde, mais n'oublie ni les brûlures de l'histoire ni la dure réalité du temps présent...

Quelques ouvrages de Dominique Ngoïe-Ngalla...





L'Evangile au coeur de l'Afrique des ethnies dans le temps court
; l'obstacle CU, Ed. Publibook, 2007 .




Route de nuit, roman. Ed. Publibook, 2006.




Aux confins du Ntotila, entre mythe, mémoire et histoire ; bakaa, Ed. Bajag-Méri, 2006.




Quel état pour l'Afrique, Ed. Bajag-Méri, 2003.




Lettre d'un pygmée à un bantu, mise en scène en 1989 par Pierrette Dupoyet au Festival d'Avignon. IPN 1988, Ed. Bajag-Méri, 2003.




Combat pour une renaissance de l'Afrique nègre, Parole de Vivant Ed. Espaces Culturels, Paris, 2002.




Le retour des ethnies. La violence identitaire. Imp. Multiprint, Abidjan, 1999.




L'ombre de la nuit et Lettre à ma grand-mère, nouvelles, ATIMCO Combourg, 1994.




La geste de Ngoma, Mbima, 1982.




Lettre à un étudiant africain, Mbonda, 1980.




Nouveaux poèmes rustiques, Saint-Paul, 1979.




Nocturne, poésie, Saint-Paul, 1977.




Mandouanes, poésie, Saint-Paul, 1976.




L'enfance de Mpassi, récit, Atimco, 1972.




Poèmes rustiques, Atimco, 1971.