O beatos nimis, sua si norint agricolas bona ! Oh trop heureux laboureurs, s’ils savaient leur bonheur ! (Virgile, Les géorgiques). Ainsi disait des gens du labour, Virgile, le doux et timide poète de Mantoue, il y a deux mille ans. Bonheur viril et vrai que savent encore goûter, aujourd’hui, quelques agriculteurs d’Occident. A la paix de leur humble univers, ils ajoutent, pour leurs semailles et leur récolte, le versement d’une subvention par leur Etats. Toujours suffisante certes, en face de tant de besoins, mais ils connaîtraient certainement pire sans cette politesse de leurs Etats. Les paysans africains qui ne semblent pas le souci prioritaire de leurs autorités en savent quelque chose ! Ceux du Congo-Brazzaville ont toute l’attention de leurs élus, mais pas pour améliorer leurs misérables conditions d’existence. Leur maigre production est obérée de toutes les taxes du monde. Ils en deviendraient fous s’ils pouvaient mesurer leur degré d’infortune. Et comment, partis, le cœur en joie, de leurs lointains villages, et rendus à Brazzaville pour écouler leur récolte dont ils attendent un petit rayon de joie et au moins une petite journée de bonheur, comment seraient-ils heureux si, dans cette ville, et dans leur pays ils sont traités en étrangers et joyeusement rançonnés ? Ils doivent, en effet, avant même d’avoir vendu, acquitter des frais exorbitants de police, de mairie, de douane et des Eaux et Forêts, dès leur descente de camion-bus ou du train ? Le petit commerçant ahuri, ne comprend pas ; il sait que ne sont normalement frappés de droits de douane que des articles d’importation, en tenant compte de leur valeur et de leur prix à l’exportation. Et que viennent faire les Eaux et Forêts, la police, et surtout la mairie dans ces taxations ? Le mukalu produit à Mossaka, à Loukolela, est-il un article d’importation ? Ou le foufou produit à Madingou, à Mont-Belo, Mouyondzi, Loudima ? Ou les animaux d’élevage de ces contrées de notre pays ?
Paradoxalement, un certain nombre d’articles venant de l’étranger, mais destinés à aider les paysans, sont exonérés des droits de douane : tracteurs, et autres outils agricoles. Ces pratiques étranges que probablement n’a pas ordonnées le code de commerce de notre pays ont lieu chaque jour, sous la barbe des autorités concernées. Comment donc les interpréter autrement que comme les signes d’une crise sociale grave dont la poussée grandissante, comme une pieuvre envahit tous les secteurs de la vie sociale, en commençant par le secteur public progressivement, insensiblement démissionnaire de sa tâche prioritaire : le maintien de l’ordre. L’apathie, ou, plus négativement, la volonté de rapine et de concussion qui a gagné un nombre fou d’agents de ce secteur est inquiétant. Il faut plaindre le chef de l’Etat.
De toute évidence, il prêche dans le désert. Pas beaucoup ne l’écoutent. La cavalcade des anti-valeurs contre lesquelles il s’est croisé est en marche ! Mais un tel niveau de désordre, ça n’est pas par hasard ; il est le résultat de l’accumulation de petits désordres sur plusieurs décennies, depuis les indépendances. Ni ici ni ailleurs dans le monde, la politique politicienne n’a jamais rien produit d’autre que des citoyens inciviques et médiocres. Savons-nous qu’entrer en politique, c’est comme entrer en religion ; et les mêmes exigences : être tout à tous, un fonds inépuisable de générosité et de compassion ? A condition d’apporter à sa naissance de réelles dispositions intellectuelles et morales qui vous permettent d’exercer avec honneur et bonheur les fonctions si exigeantes de gouvernement, ou de guide religieux. Seulement, dans notre pays où la formation de l’homme (intelligence, la sensibilité et le cœur) est confiée, depuis pas mal de temps, à des institutions (école primaire, collège, lycée, université, séminaire (petit et grand) qui périclitent, faute d’idéal à réaliser et de modèle à incarner, une élite authentique consciente de son rôle, tardera à naître. Une élite qui, dans un combat quotidien de corps avec le destin de tout peuple, se dresse, pour lui tracer son chemin, et frappe aux portes du futur. Mandela n’aura-t-il jamais d’émule ? Ou, maudite, en quelque sorte l’Afrique est-elle condamnée à une vie immuable de végétal, ou d’animal sauvage qui ignore la loi ?
1 commentaire:
C'est dingue, on n'a jamais entendu ça: taxer les pauvres paysans, maraichers et pêcheurs aux points d'entrée des denrées à Brazzaville (Gare centrale et Mikalou. On est juste censé payer un impôt sur les revenus ou sur les gains qu'on réalise, mais se voir imposer des taxes douanières au sein d'un même Etat relève d'une incongruité inouïe. Ce pays soufrfre d'une inflation fiscale que seuls mesurent ceux qui y sont soumis. Certaines réflexions de congolais mécontents de payer des impôts font sourire à ce qu'elles laissent entendre qu'on ne paye pas d'impôts au Congo. On en paie et même beaucoup. Quant à l'incurie, la faiblesse des contrôles des procédures au niveau de chaque administration, elle témoigne du peu d'intérêt à la bonne marche des choses des chefs des administrations (les ministres) et des chefs de l'exécutif (le Premier Ministre et son chef). Pour le reste en Afrique, les intellectuels et tous ceux qui font l'effort de se libérer du joug atroce de la bêtise, de la paresse et de la facilité sont traités comme des extra-terrestres et leur souci d'ordre dérange tellement que tout est fait, lorsqu'on arrive pas à les acheter, à les humilier ou les enfermer dans une situation qui leur empêche toute audibilité et visibilité, de sorte qu'ils ne peuvent susciter le débat. Un pays d'IMBECILES!
Enregistrer un commentaire